DEFAITE EN VUE POUR LES CONSERVATEURS BRITANNIQUES ?

Le Royaume-Uni: fixées au 4 juillet, les élections générales s’annoncent difficiles pour le parti de Rishi Sunak

Le Premier ministre britannique et chef du parti conservateur, Rishi Sunak, s'exprime lors d'une campagne électorale générale à l'ExCeL, dans l'est de Londres, le 22 mai 2024. AFP

Une des spécificités du système électoral du Royaume-Uni est que son Premier ministre choisit la date des prochaines élections générales, jusqu’au délai légal de son mandat. Rishi Sunak a annoncé ce mercredi 22 mai à 17h20 (heure locale) que celles-ci se tiendront le 4 juillet, laissant ainsi six petites semaines de campagne aux partis conservateur et travailliste pour convaincre les Britanniques. Sous une pluie battante et avec des manifestants aux grilles de Downing Street, avec la musique à fond, cest à peine audible que le Premier ministre a annoncé quil s’était entretenu avec le roi Charles III plus tôt dans laprès-midi pour demander la dissolution du Parlement et confirmer la date des prochaines élections. La dissolution officielle du Parlement aura lieu le 30 mai.

Cette annonce est venue comme une surprise tant pour les conservateurs que pour le reste de la population. Le timing des élections générales est un moment éminemment stratégique pour le Premier ministre qui en fait l’annonce. Plusieurs membres du parti conservateur sont mécontents de la précipitation de Rishi Sunak, alors que la plupart des parlementaires s’attendaient à un scrutin en automne. En effet, le Premier ministre avait jusqu’à fin janvier 2025 pour déclencher une élection. Ses comparses conservateurs espéraient ainsi gagner assez de temps pour mettre en place des législations phares comme la politique d’immigration au Rwanda et le redressement de l’économie.

Pari risqué pour le Premier ministre

Rishi Sunak aurait estimé qu’il était temps de se lancer, alors qu’il avait fait plusieurs annonces fortes de projets de loi qui n’ont pas (encore ?) entraîné une inversion des sondages. Selon Sir John Curtice, politologue, la décision du Premier minstre de déclencher une élection maintenant est « soit très courageuse, soit très stupide. Nous saurons très vite dans les prochaines semaines si son pari sera gagnant ». Il s’est donc jeté dans la gueule du loup, mais en a profité pour déjà assener plusieurs coups au leader des travaillistes, Keir Starmer : « Pendant mon mandat, je nai cessé de vous protéger dans des moments difficiles. Jai dû faire ce qui est juste et non pas ce qui est facile. Keir Starmer, lui, choisira la facilité et vous guidera vers un futur incertain », prévient l’actuel locataire du 10 Downing Street.

Jai dû faire ce qui est juste et non pas ce qui est facile. Keir Starmer, lui, choisira la facilité et vous guidera vers un futur incertain.

Rishi Sunak espère aussi capitaliser sur les bons chiffres de la croissance économique britannique, qui était jusqu’alors officiellement en récession, mais a maintenant réussi à récupérer une croissance positive. Il a aussi mentionné son plan d’immigration au Rwanda pour « arrêter les bateaux (de migrants qui traversent la Manche ndlr) ».

Enfin, il se pose en force tranquille qui assure la continuité vers un futur certain, s’opposant, selon lui aux « promesses vagues et incertaines du parti travailliste ».

AFP

Une photographie publiée par le Parlement britannique montre le principal chef du parti travailliste d’opposition britannique, Keir Starmer, s’exprimant lors de la séance hebdomadaire de questions au Premier ministre (PMQ), à la Chambre des communes, dans le centre de Londres. (Photo par Maria UNGER / UK PARLIAMENT / AFP).

Mobilisation des travailleurs confiants

Les travaillistes, eux, étaient déjà dans les starting-blocks et avaient commencé leur campagne de manière non officielle depuis plusieurs mois. Toutefois, même si le parti de gauche caracole, depuis plus d’un an, en tête des sondages avec en moyenne 20 points d’avance, il ne veut pas se reposer sur ses lauriers et prendre son avance pour acquise. En effet, les dernières élections, qui avaient été déclenchées après la démission de David Cameron et l’élection de Boris Johnson à la suite du référendum sur le Brexit, avaient vu le parti travailliste essuyer sa pire défaite depuis 1932.

Le Premier ministre a enfin annoncé la date des prochaines élections. Un moment dont notre pays a besoin et quil attendait avec impatience.

Keir Starmer s’est exprimé suite à l’annonce de Rishi Sunak. « Le Premier ministre a enfin annoncé la date des prochaines élections. Un moment dont notre pays a besoin et quil attendait avec impatience. Avec la force de notre démocratie, le pouvoir vous sera rendu. Cest une chance de changer pour un mieux, votre futur, votre communauté, votre pays. Ce sera une longue campagne, mais peu importe ce qui est dit ou fait, cette opportunité de changement est ce pourquoi cette élection est là. (…) Tout ce que nous demandons humblement maintenant, cest de remettre la Grande-Bretagne au service des travailleurs », a déclaré le leader des Travaillistes.

Quid des autres nations du Royaume-Uni ?

Outre les députés anglais, ces élections générales permettront aussi d’élire leurs homologues gallois et écossais qui siègent au Parlement britannique, bien que chacune de ces régions ait aussi son propre Parlement. Au Pays de Galles, les travaillistes ont aussi une avance confortable comme en Angleterre, mais c’est en Ecosse que ça se complique. En effet, alors que le Premier ministre écossais, Hamza Yousaf, a démissionné il y a quelques semaines et a été remplacé manu militari par le nouveau chef du parti nationaliste Scottish National Party (SNP), John Swinney, c’est lui qui devra composer avec une campagne électorale qui tombe très mal pour le SNP. Jusque-là fortement majoritaire au Parlement londonien, la majorité du SNP est loin d’être acquise à cause des nombreux scandales internes qui ont éclaboussé le parti pro-indépendance. L’Ecosse sera donc un terrain de chasse particulièrement prisé pour les conservateurs comme pour les travaillistes qui espèrent que chaque siège gagné fera toute la différence.

Léna Job (à Londres)