EDITO

Jürgen Conings : qu’apportera une démission de la ministre Dedonder?

BELGA

Plus d’une semaine après sa fuite, le caporal Jürgen Conings, soupçonné d’accointances avec l’extrême-droite et d’avoir proféré des menaces à l’encontre de personnalités dont le célèbre virologue flamand Marc Van Ranst, court toujours. Les importants moyens déployés pour le retrouvés n’ont, pour l’instant, pas donné de résultats concluants.

Mais comme l’ont reconnu la ministre de la Défense, Ludivine Dedonder (PS) et le patron de l’armée Michel Hofman, des erreurs ont été commises, notamment au sein du renseignement militaire (SGRS) et de la part de la hiérarchie des forces armées. Problème de communication d’informations, non-respect des procédures et des règles, etc. La Commission de la Défense examinera ce mercredi les premiers éléments des différentes enquêtes diligentées pour faire la lumière sur dysfonctionnements qui ont mené à ce fiasco où un militaire manifestement dangereux a pu avoir accès à des armes de guerre et les sortir des casernes.

Il se pose aujourd’hui des problèmes de responsabilité. Il y a d’une part la responsabilité fonctionnelle de la hiérarchie militaire et, d’autre part, la responsabilité politique de la ministre Dedonder. En réclamant la démission de cette dernière, on peut se demander à quel jeu joue le Vlaams Belang quand on sait que le militaire jugé dangereux aujourd’hui a épousé leurs thèses et idéologies. Toute honte bue, le parti extrémiste se fait aujourd’hui le chantre de la bonne gouvernance et l’honneur politique en réclamant le départ de la ministre socialiste. Certes, Ludivine Dedonder porte une responsabilité politique des erreurs commises par la hiérarchie militaire. Mais il ne tient qu’à elle et à son parti de poser un geste qu’on peut qualifier d’honorable.

Mais au fond, qu’apporterait sa démission ? Si ce n’est donner l’illusion que la politique est l’affaire d’hommes et de femmes irréprochables en tous points. Par ailleurs, sa démission ne ferait que ralentir le processus de séparation du bon grain de l’ivraie qui doit être poursuivi pour éviter d’entacher l’honneur de notre armée. La même analyse vaut pour la hiérarchie militaire qui porte, elle, une responsable fonctionnelle, plus proche de la situation et du terrain des dysfonctionnements. Elle aurait dû voir et sévir.
Que dit le code des valeurs du militaire dans ce cas ? Elle le connaît mieux que quiconque. Il faut impérativement empêcher que les failles qui seront relevées soient encore d’actualité à l’avenir.

Mais « l’affaire Jürgen Conings » met en lumière un autre élément à prendre en considération : le suivi des militaires ayant participé à des opérations périlleuses et traumatisantes. Il faut absolument accorder la plus haute attention à ces soldat(e)s de la nation, ayant risqué leur vie pour autrui, afin que leur vécu d’hommes ou de femmes de terrain serve à quelque chose. Ils ne doivent pas être perdus pour la cause, ignorés ou abandonnés à leur triste sort. Car c’est en ne souciant pas d’eux qu’ils deviennent des proies faciles pour les idées d’extrême-droite, les bras armés d’idéologues aux idées nauséabondes qui exploitent leurs frustrations pour en faire de véritables ennemis de la démocratie et du vivre ensemble.