Sans-papiers : conjuguer fermeté, pragmatisme et empathie


Relégué au second plan et ne bénéficiant que d’une relative publicité médiatique en raison de la crise sanitaire, la grève de la faim de plus de 400 sans-papiers, entamée depuis le 23 mai dernier, s’étale désormais au grand jour. Mais au lieu de recevoir l’attention nécessaire de la part des autorités politiques fédérales en raison de la gravité du mouvement et des conséquences pour leur santé, les sans-papiers en situation irrégulière n’ont eu pour réponse qu’un discours de fermeté dénué d’empathie et de compréhension : pas de régularisation collective.

La situation de certains candidats à la régularisation est la conséquence de la longueur du traitement des dossiers d’asile.

Que des individus en situation irrégulière prennent le risque de sortir de l’ombre et de mettre leur vie en danger dans l’espoir d’obtenir des solutions à leur situation précaire témoigne de l’état de détresse dans lequel ils sont. Pour justifier la fin de non-recevoir à leur revendication de régularisation, le Gouvernement fédéral indique que l’accord du gouvernement Vivaldi ne mentionne pas la régularisation collective de sans-papiers.

Certains leur répondront qu’ils sont responsables de leur situation. Ils n’avaient qu’à rester dans leur pays respectifs, certains condamnés à souffrir en silence sous le joug d’un régime dictatorial soutenu au nom de je ne sais quel intérêt par l’occident, d’autres obligés d’endurer une situation économique qui ne leur offre aucune perspective d’épanouissement. D’autres encore sont l’objet de persécutions ou de harcèlement en raison de leur orientation sexuelle. D’autres raisons peuvent encore être épinglées. Mais, ce n’est jamais de gaieté de cœur ou par caprice que des individus prennent le chemin de l’exil, loin des leurs et bravant divers obstacles, y compris la mort, pour chercher refuge ou assistance dans un autre pays. La situation de certains candidats à la régularisation est la conséquence de la longueur du traitement des dossiers d’asile.

Comme on le lira par ailleurs, ce n’est pas parce que l’accord de gouvernement ne mentionne pas de régularisation collective qu’on ne peut pas le faire. Celles de 2000 et de 2010 sont un exemple du pragmatisme et du courage politique, du souci de solidarité ainsi que d’un sursaut d’altruisme pouvant justifier des décisions exceptionnelles de régularisation. En 2000, près de 42.000 sans-papiers ont bénéficié de la normalisation de leur situation et environ 25.000 en 2010. Ces décisions ont-elles grevé le budget de la sécurité sociale ? Ont-elles entraîné une augmentation déraisonnable du déficit public ? Non, au contraire. Car Nombre de ses personnes en situation irrégulière travaillent et contribuent à la richesse économique collective du pays. D’autres aspirent à suivre des formations afin de contribuer au développement de ce pays. Il y a des dizaines de métiers en pénurie dans différents secteurs (construction, santé, industrie, personnel de maison, etc.).

Une décision de régularisation collective avec des critères clairs, objectifs et précis permettra d’ailleurs d’éviter toute récupération politique du dossier des sans-papiers par des partis extrémistes de droite. En 2000 et 2010, les régularisations ont permis de résorber les arriérés de dossiers d’asile. Elles ne sont pas incompatibles avec une politique d’asile accélérée et une politique de retour. Elles n’ont pas créé d’appels d’air comme certains semblent le craindre. Il y a urgence à traiter le dossier des sans-papiers pour empêcher que la situation ne débouche sur des drames qu’on aurait pu éviter. La mise en place d’un dialogue constructif entre toutes les parties impliquées dans le dossier serait déjà un bon début.


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