SOCIETE

Quinze jours après les inondations, la solidarité continue sous l’église Saint-Vincent


LIEGE. Un peu plus de quinze jours après les inondations qui ont ravagé la région liégeoise, la solidarité est toujours bien vivante dans les centres de crises, et d’autant plus peut-être, au sein de ceux mis en place par une poignée de volontaires touchés par les terribles images diffusées, et la réalité toute proche. A Liège, sous l’église Saint-Vincent, chaque jour de 8 h à 20h, ils sont encore une vingtaine à récolter et offrir des kits de vie, ou de survie aux familles sinistrées venues de Liège, mais aussi de bien plus loin. Si le cœur a ses raisons, la raison a aussi du cœur. Deux semi-remorques de dons sont attendus ce mardi. Les volontaires de « sous l’église St-Vincent » ont besoin de mains fortes.

Elles s’appellent Aurore, Dorothée, Vinciane. Ensemble, spontanément,  le 15 juillet dernier, les deux premières, mères de familles et cousines, ont eu envie d’agir et venir en aide aux victimes sinistrées. Rapidement rejointes par Vinciane, elles lançaient un centre de récolte de dons, à Beyne-Heusay d’abord, puis à Liège. « Nous sommes originaires de Soumagne, on ne pouvait pas rester sans rien faire », confie Aurore. Très vite, grâce à l’aide de leur réseau, elles disposent d’un local temporaire pour accueillir les dons spontanés et rapidement trop nombreux pour le site. Depuis plus de dix jours, les volontaires se sont fixés dans les sous-sols de l’église Saint-Vincent, à proximité du pont de Fragnée.

« On est ici chaque jour de 8h à 20h, on récolte les dons de toutes sortes : vaisselles, vêtements, chaussures, vivres, évidemment, matelas, lits pour enfants, produits d’hygiène et d’entretien, produits pour animaux, draps,… On classe tout par secteur, heureusement on dispose d’un bel espace, mais comme vous voyez c’est plein. Depuis la semaine dernière, les dons entrent et sortent, de nombreuses familles viennent ici retirer ce dont elles ont besoin. On prépare des kits avec les volontaires. Les bénévoles présents ici sont presque tous ceux de la première heure. Mais j’avoue, toute aide est bienvenue même quelques heures », poursuit Aurore.  « Ce qui se passe est dramatique mais la solidarité des gens est immense, on a des volontaires qui viennent nous aider tous les samedis, ils viennent de Ath exprès », ajoute Dorothée.

Aurore et Dorothée

 

Le règne et le courage de la débrouille

A l’entrée du sous-sol, derrière l’église, les personnes sinistrées laissent leurs coordonnées avant d’entrer. « On vient de Charleroi, on a déjà été relogés en deux endroits, là on est sur Oupeye », confie Benoit accompagné de son épouse Muriel. Ils ont tout perdu. « On n’a plus rien, c’est le règne de la débrouille pour tout, l’enfer du côté des aides publiques. Nos 5 enfants ont dû être placés, on espère retrouver un logement rapidement vers Dinant, ma femme y a de la famille, mais quand et comment… heureusement, y a tout ça, là, on garde espoir, il le faut», ajoute-t-il. Ensemble, ils sont venus chercher un peu de tout…Ils repartiront avec des kits préparés par les volontaires plus des choses glanées à droite à gauche à leur guise. « Même pour le transport de tout ça c’est la débrouille, on ne dispose pas de véhicule », précise Benoît en attendant sur le petit parking qu’un volontaire le reconduise à Oupeye.

Manque de produits d’hygiène, de nettoyage et de produits pour animaux

Plus loin, une bonne nouvelle, Nadia et son compagnon ont pu réintégrer leur maison mais il n’y a plus rien. Ils sont venus chercher des jouets, des casseroles, de quoi s’habiller…Ils habitent Chênée. « On était déjà venus ici après les inondations pour venir chercher de quoi manger simplement. Là, on peut prendre un peu plus, heureusement que ce centre existe, je ne remercierai jamais assez cette équipe », confie-t-elle.
« En matière de dons, on dispose de beaucoup et de tout mais on manque de produits d’hygiène (déodorants, bains douches ainsi que des produits de nettoyage et des aliments pour les animaux (chiens, chats, lapin, oiseaux) », renchérit Aurore. « Les gens viennent ici prendre ce qu’ils veulent, c’est le principe. Aider, soutenir c’est notre volonté. On a eu droit à quelques témoignages très poignants depuis le début. D’ailleurs, ce centre est aussi un peu thérapeutique modestement, pour toutes les personnes concernées par les inondations. Les familles touchées se parlent, nous racontent ce qui leur est arrivé et comment ils s’en sont sortis. Hier, un homme nous a confié avoir sauvé la perruche d’un voisin en la cachant dans sa manche pendant des heures. D’autres ont vu leur voisin attendre des heures assis sur le toit de leur maison, d’autres encore ont été sauvés en jet-ski… grâce aux réflexes de voisins. On se rend compte à quel point tout ce qui est arrivée était juste impensable ». A quel point aussi, sans la solidarité spontanée de la population, le bilan aurait pu être bien pire.

Deux semi-remorques à vider

Ce mardi, les volontaires de sous l’église Saint-Vincent attendent l’arrivée de deux semi-remorques de dons. Il va falloir entamer le tri, répartir au plus vite pour que toute cette générosité reparte rapidement à destination des familles qui se pressent toute la journée depuis des jours sous l’église à la recherche de biens de survie qui leur offriront un peu de normalité au milieu du désastre. Ces familles proviennent d’Angleur, Chênée, Trooz principalement mais certaines sont venues de plus loin. « On est motivé, mais on sent bien que le temps passe, les bénévoles sont un peu moins nombreux, l’équipe de base est toujours là. On ne lâchera rien », reprend Dorothée enthousiaste à agir.

A la porte, un retraité se présente. « J’aimerai aider, je reviens de vacances, que puis-je faire ? » Aurore l’accueille avec un large sourire, les autres volontaires le saluent. Dorothée lui montre l’espace de récolte plein comme œuf. « Voilà, on va vous expliquer, merci déjà d’être venu ». Cela se passe comme ça chez les volontaires de sous l’église Saint-Vincent. Cette équipe de gens qui ne se connaissaient pas et au cœur gros comme ça s’est transformée en famille, une famille qui se retrouve chaque jour. Si vous avez un peu de temps, vous savez quoi faire.