Culture

Chronique: “La fille qu’on appelle” de Tanguy Viel


Le dernier roman de Tanguy Viel intrigue et interpelle. Découvrez donc “La Fille qu’on appelle”…. Autrement dit la call-girl ? demande l’un des deux policiers qui reçurent la plainte de Laura au début du roman, Laura qui, âgée d’environ vingt ans, fille d’un ancien champion de France de boxe devenu le chauffeur du maire, s’adressa à ce dernier pour obtenir un logement, bénéficiant d’une recommandation de son père. Elle se montra incapable de résister au maire, lui consentit des privautés (c’est une litote) et finalement déposa une plainte pour, selon la qualification pénale retenue par le Procureur de la République, trafic d’influence.

La principale qualité de ce roman est à chercher dans le style, que l’on pourrait nommer  le « style Minuit », celui de Jean Echenoz, de Jean-Philippe Toussaint, d’Eric Laurrent, d’Eric Chevillard, pour ne citer que les plus connus des membres de l’ancienne « écurie Lindon » (la maison d’édition Minuit a été récemment rachetée par Gallimard).

Comme certains critiques, abordons quelque peu le fond. Laura est-elle une victime du maire ? L’auteur souligne qu’elle consentit à tout dès la première entrevue privée,  qu’elle le reconnut devant les policiers, qu’elle « participa » aux ébats sans réticence apparente. Raison pour laquelle le procureur ne retint que la prévention de trafic d’influence, prévention  abandonnée ensuite quand il apparut que le maire ne l’avait fait profiter d’aucun passe-droit.

Le lecteur est associé par l’auteur aux sentiments intimes de Laura, il sait que celle-ci ne parvient pas à dire non, qu’elle est entraînée malgré elle. Mais le partenaire ?  Comment pourrait-il deviner ?

Quel message entend dégager le roman ? Le dénouement pénal est inéluctable. Sauf à présumer que tout homme est un prédateur, ce que l’auteur ne fait pas dès lors qu’il montre une autre protagoniste, Hélène, abusant de l’attachement pour elle du père de Laura, le ruinant (rappelons qu’il avait été un boxeur réputé) et l’abandonnant quand elle ne put plus en tirer le moindre avantage pécuniaire. Nous restons perplexe.

Tout cela n’a toutefois qu’une importance secondaire si, comme l’écrit Catherine Cusset dans un livre que nous présenterons bientôt (La définition du bonheur), « c’est l’écriture, pas l’histoire, qui fait la littérature » (p.294). Et l’écriture de Tanguy Viel est archétypale du genre proustien (selon nous, il y a, à l’heure actuelle, en littérature française, quatre styles principaux : classique, journalistique, proustien et célinien).

Tanguy VIEL, La Fille qu’on appelle, Ed. Minuit. 16 €

 

 

Jacques MELON

 


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