JUSTICE

Hulot accusé d’agressions sexuelles : quelles suites judiciaires ?


Le parquet de Paris a ouvert une enquête préliminaire. L’ancien ministre de la Transition écologique est accusé d’agressions sexuelles et viol par six femmes dont une mineure au moment des faits. Les victimes évoques 20 ans d’omerta. Nicolas Hulot conteste quant à lui les faits et dénonce des « affirmation purement mensongères et un tribunal médiatique ». Dans la tourmente, il a néanmoins annoncé quitter « définitivement la vie publique », dont la présidence d’honneur de sa Fondation, créée en 1990, pour protéger ses proches des retombées éventuelles de l’affaire.
L’homme s’est réfugié à Saint-Lunaire, en Bretagne, dans sa propriété avec vue sur mer. Que risque réellement l’ancien ministre en justice au regard du droit français alors que les témoignages se succèdent et que le politique se désolidarise ?

C’est un autre désert qu’il découvre. L’animateur vedette d’« Ushuaïa » qui contribué grâce à son émission à imposer l’écologie dans le débat public avant d’être ministre, s’est transformé en paria. Six femmes accuse Nicolas Hulot d’agressions sexuelles, dont quatre dans une enquête d’Envoyé Spécial, diffusée le jeudi 25 novembre sur France 2. Sylvia, Cécile, Claire… les témoignages sont glaçants. Des journalistes ont réalisé pendant quatre ans un travail d’enquête colossal sur ceux qui, parmi les politiques, savaient. Au lendemain de l’émission, la justice a ouvert une enquête. Les faits auraient été commis pour la plupart entre 1989 et 2001. Si en matière de journalisme, il n’y a pas de prescription, quels sont les suites possibles à cette affaire dans la mesure où la loi dite « Schiappa » du 3 août 2018 prévoit que le délai de prescription est de 30 ans pour le viol et de 10 ans pour l’agression sexuelle et l’atteinte sexuelle à compter de la majorité de la victime ?

A la recherche de faits non prescrits

En 2018, l’hebdomadaire français l’Ebdo, aujourd’hui disparu, révélait pour la première fois qu’une plainte pour agression sexuelle avait été déposée en 2008 à l’encontre de Nicolas Hulot par Pascale Mitterrand, la petite-fille de l’ancien président de la République, pour des faits qui auraient eu lieu en 1997. L’affaire étant prescrite, elle avait alors été classée sans suite. Si l’ancien animateur avait clamé son innocence et a porté plainte contre le média pour diffamation, les nouveaux témoignages replongent l’ancien ministre de la Transition écologique au cœur du scandale.

Le parquet de Paris a néanmoins pour habitude d’ouvrir systématiquement des enquêtes sur les accusations de violences sexuelles contre des mineurs, même si les faits semblent prescrits. C’est donc la deuxième fois qu’une enquête vise l’ancien ministre de l’Ecologie. Les investigations ont été confiées à la brigade de protection des mineurs de la direction régionale de la police judiciaire. Les enquêteurs ont pour mission de « déterminer si les faits dénoncés peuvent caractériser une infraction pénale et si, au vu de leur ancienneté, la prescription de l’action publique est acquise » et de rechercher par ailleurs d’éventuelles autres agressions qui elles ne seraient pas prescrites.

Les journalistes de France 2 assurent en effet qu’elles auraient rencontré à plusieurs reprises d’autres femmes rapportant d’autres faits semblables aux récits rendus publics. Deux femmes, l’ancienne animatrice belge Maureen Dor et une ancienne employée de TF1, ont en outre transmis à Envoyé spécial des témoignages écrits sur des faits dont elles accusent aussi Nicolas Hulot. Du côté politique, une ex-militante EELV (Europe Ecologie Les Verts) dit avoir été écartée de sa campagne car elle « l’excitait trop ». La fille d’une « ancienne ministre du gouvernement Jospin » porterait également de sérieuses accusations.

Macron se désolidarise

Nicolas Hulot estime « subir depuis quatre ans le poison de la rumeur ». Ce mercredi 1er décembre, Emmanuel Macron s’est exprimé sur ce dossier en introduction du Conseil des ministres à l’Élysée. « Il faut que la parole se libère et c’est très bien qu’elle se libère », a notamment déclaré le président. « La justice ne se fait pas dans les médias, pas dans les tribunaux médiatiques », a-t-il toutefois fustigé.
« La position du gouvernement sur ce sujet est constante. Nous n’accepterons jamais une société de l’opacité ou de la complaisance, et nous ne voulons pas non plus d’une société de l’inquisition ». Ces propos sont nettement plus nuancés que ceux que le président de la République avait tenus lors d’un Conseil des ministres en 2018, peu de temps après les révélations de l’Ebdo. Il avait alors apporté son soutien sans réserve à Nicolas Hulot, en l’invitant à « tenir dans des moments difficiles »  et en le maintenant dans ses fonctions.