ETATS-UNIS

Le mur anti-migrants entre les États-Unis et le Mexique : un gouffre financier et un fléau écologique


D’une valeur finale d’au moins un quart de milliard de dollars, le mur construit entre les États-Unis et le Mexique, symbole de l’ère Donald Trump, est toujours en place. Les vestiges du chantier s’exposent à ciel ouvert. Ils rouillent au soleil dans un enchevêtrement de tuyaux en PVC, fils électriques, béton préfabriqué et treillis métalliques. L’une des promesses emblématiques d’une politique anti-migrants est aussi un fléau pour la biodiversité. De nombreuses espèces sont en danger. L’ancien locataire de la Maison-Blanche laisse une ardoise économique et écologique salée que l’administration Biden peine à apurer.

Copyright – Des laiteaux en acier rendu complètement inutile par les inondations de la mousson – Groupe Facebook The Great American Border Wall

680 kilomètres de pylônes de six mètres de haut cisaillent cette frontière qui parcourt 3.200 kilomètres entre le Pacifique et le golfe du Mexique, de la Californie au Texas. Pour élever ce mur de cure-dents en acier rougeâtres, les pelleteuses ont creusé le sol, déraciné des arbres et détruit des montagnes jusqu’au dernier jour de l’administration Trump (2017-2021). En janvier 2021, son successeur, Joe Biden, a signé l’arrêt des travaux sous soixante jours, soit pour le mois de mars suivant. Le ministère de la Défense est propriétaire de la majeure partie de cet acier, mais on ne sait pas encore ce qu’il en adviendra. Le secrétaire à la Sécurité intérieure, Alejandro Mayorkas, a déclaré dans un communiqué ce 21 décembre que « le chantier sera confié à l’Agence des douanes et de la protection des frontières afin que tout problème de sécurité et d’environnement puisse être résolu ».

Des conséquences économiques

Selon un calcul du Congressional Research Service, l’administration Trump avait alloué un total de 16,4 milliards de dollars à la construction du mur le long de la frontière au sud du pays. Une note du ministère de la Défense, datée d’avril 2021, estime que l’administration Biden devra assumer jusqu’à 1,4 milliard de dollars en frais de suspension et résiliation de contrats ». En outre, selon le Subcommittee on Government Operations and Border Management (Link vers : https://www.lankford.senate.gov/imo/media/doc/GOBM%20Interim%20Report%20on%20Border%20Wall.pdf), le gouvernement américain dépense actuellement jusqu’à 3 millions de dollars par jour pour rémunérer des sous-traitants afin qu’ils surveillent les matériaux et le site. Le matériel abandonné aurait quant à lui coûté à lui seul 350 millions de dollars.

Copyright – Le matériel à l’abandon – Groupe Facebook The Great American Border Wall

Des conséquences écologiques

Au-delà de l’aspect économique, des conséquences humaines et écologiques sont aussi à déplorer. Même s’il n’est qu’à moitié construit, le mur pousse les migrants à passer par des zones de plus en plus reculées et dangereuses pour traverser la frontière. À certains endroits, un nombre sans précédent de morts est à déplorer. L’écosystème est également menacé. Plus de 1500 espèces de plantes et d’animaux peuplent la frontière. « Jaguars, ocelots, mouflons d’Amérique, cougars, loups gris du Mexique, au moins 93 espèces sont en danger. La destruction de leur habitat et le bouleversement de la chaîne alimentaire causé par le déracinement sont les deux causes principales », alerte l’organisation Defenders of Wildlife dans un rapport In the shadow of the wall – Borderlands Wildlife, Habitat and Collaborative Conservation at Risk (Link vers : https://defenders.org/sites/default/files/migration/docs/defenders-borderreport-parti.pdf).

Si ce désastre environnemental a été rendu possible, c’est à cause du Real ID Act de 2005, un texte qui a permis à Georges W. Bush à l’époque d’outrepasser plusieurs lois environnementales. Durant son mandat, quarante d’entre elles ont été bafouées. Donald Trump, lui, en a contourné plus de quatre-vingt-quatre.

La solution, un démantèlement ?

Via son décret, signé en janvier 2021, Joe Biden a acté la suspension des travaux de construction du mur. Mais le chantier reste un bourbier politique et logistique. Des travaux se poursuivent pour prévenir les inondations et l’érosion par la stabilisation des pentes.

Activistes et élus démocrates souhaitent le démantèlement pur et simple du mur. Ils ne veulent pas continuer à l’entretenir, ce qui coûte cher. Ils souhaitent utiliser les fonds prévus à sa construction pour le déboulonner. Ils souhaitent que Joe Biden légifère.