Société

Seule et ruinée, la veuve de Bernard Tapie doit rembourser des dettes de 300 millions d’euros


C’est l’équivalent des dettes que l’ancien ministre et homme d’affaires français laisse à son épouse, Dominique Tapie, et qu’elle devra rembourser. Elle est aujourd’hui obligée de quitter leur Hôtel de Cavoye où ils ont résidé pendant 34 ans et que Bernard Tapie aurait vendu, à l’insu de son épouse, au milliardaire François Pinault. Elle doit quitter l’immeuble d’ici fin février. La seule solution pour la veuve et ses enfants serait de renoncer officiellement à l’héritage. Et dans quelques jours va débuter le tournage de Wonder Boy, une série produite par Netflix et tirée de la vie de Bernard Tapie. Le clan de l’ex-ministre redoute le pire avec cette série…     

D’un côté, le 7ème arrondissement parisien, celui des ministères. De l’autre, Saint-Germain-des-Près… Là, dans cette rue des Saints-Pères, il y eut Sonia Rykiel, il y a toujours les éditions Grasset ou encore Sciences Po- et au 52, l’Hôtel de Cavoye, un hôtel particulier ayant appartenu au couturier Hubert de Givenchy, une surface d’habitation de 600 m², une cour pavée et un jardin d’environ 1 000 m². En 1986, alors âgé de 43 ans, Bernard Tapie achète cette propriété parisienne, par l’intermédiaire de sa société Financière et Immobilière, Bernard Tapie.

Dans cette décennie 1980 qu’on a appelée « les années fric », rien n’est trop beau, trop bling bling pour ce repreneur d’entreprises en « difficultés », animateur d’émissions télé (Ambitions sur TF1) et patron d’équipes sportives (cyclisme, voile et football) surnommé dans cette décennie 1980 « le roi Tapie » ou encore « Wonder boy » (en référence à l’entreprise qui fabriquait des piles électriques). Le 3 octobre 2021, après de longs mois de bataille acharnée contre un cancer de l’estomac et de l’œsophage, il meurt dans sa chambre de l’Hôtel de Cavoye…

Les années fastes de Bernard Tapie

Tenu (au moins par ses concurrents) pour un businessman sans états d’âme, méthode qu’il appliquera dans le sport avec, en 1993, une affaire de corruption la veille d’un match de foot opposant l’Olympique de Marseille (dont il était le président) et Valenciennes, Bernard Tapie figurait, dans le classement des fortunes françaises en 2016, au 400ème rang avec une fortune estimée à 150 millions d’euros. Les Guignols de l’Info, dans les années 1980-1990 sur Canal+, en avaient fait une vedette, n’hésitant pas à le montrer en joueur un peu roublard de bonneteau pour décrypter la « méthode à Nanar ». Cette méthode qui lui permit de faire fortune et d’acquérir en 1982 le « Phocéa », voilier quatre-mâts de 72 mètres et revendu en 1997 ; en 2010, une résidence secondaire en Seine-et-Marne (estimée à 2 millions d’euros) et , en 2014 le yacht « Reborn » de 76 mètres et vendu 44 millions d’euros en 2014 ; en 2011 pour 16 millions d’euros, un jet privé de 10 places cédé en 2014… sans oublier la villa Mandala à Saint-Tropez, estimée 50 millions d’euros et mise aujourd’hui en liquidation…

On y ajoutera les 403 millions d’euros reçus dans le cadre de l’affaire Adidas- Crédit Lyonnais- somme qu’il fut condamné à rembourser lors d’un premier jugement mais, en appel, la cour a requis cinq ans de prison avec sursis et 300 000 euros d’amende, une requête envoyée aux oubliettes au lendemain de la mort de Bernard Tapie…

AFP

Bernard Tapie et sa femme le 30 mai 1993 à Marseille. (Photo / AFP)

Triste déchéance pour l’ancien fortuné

Mais d’ici la fin de ce mois de février 2022, Dominique Tapie va devoir déménager- confidence d’un proche de la famille : « Dominique doit en effet quitter ce petit bijou meublé d’antiquités d’ici à trois semaines ». Femme de Bernard Tapie depuis leur mariage en 1987, aujourd’hui veuve de l’entrepreneur et homme d’affaires, elle a appris récemment qu’elle doit quitter l’Hôtel de Cavoye, le domicile qu’elle a partagé avec son mari pendant trente-quatre ans.

La propriété de la rue des Saints-Pères n’appartient plus au couple depuis qu’avant de mourir, Bernard Tapie l’a vendu, pour 80 millions d’euros, à l’homme d’affaires français François Pinault, 24ème fortune mondiale (estimée à 32 milliards d’euros). Dans son édition du 10 février dernier, l’hebdomadaire Paris-Match faisait sa « une » avec une photo pleine page de Dominique Tapie promenant son chien- titre : « L’héritage Tapie. Sa femme ruinée. Pourquoi il ne l’a pas protégée ».

Ainsi, on apprend qu’elle a été contrainte de vendre ses sacs Hermès, qu’elle vit avec la pension de reconversion de la retraite d’ancien ministre et député de son mari (environ 450 euros par mois), qu’elle arrive tout juste à payer ses factures de téléphone et d’électricité, que la boîte aux lettres de la rue des Saints-Pères déborde de courriers des huissiers. Qu’à 71 ans, elle est obligée de faire appel à la générosité d’amis (parmi lesquels l’ancien ministre Jean-Louis Borloo, surnommé « l’ange gardien ») pour payer le salaire de ses employés de maison et aussi son coiffeur et son professeur de danse. Et aussi que Bernard Tapie aurait vendu l’Hôtel de Cavoye sans en parler à son épouse- elle aurait dit à François Pinault, nouveau propriétaire venu lui rendre visite : « Je ne savais pas que mon mari avait vendu »… Commentaire de la journaliste de Paris-Match : « Ils donnaient l’illusion que tout était comme avant comme dans les années 1980 et en fait ils étaient les clochards les plus célestes de Saint-Germain-des-Prés »…

Renoncer officiellement à l’héritage

Malgré l’abandon de l’obligation du remboursement des 403 millions d’euros (affaire Adidas- Crédit Lyonnais) et la vente de la propriété de la rue des Saints-Pères, il a été signifié à Dominique Tapie que les dettes contractées par son mari sont de l’ordre de 300 millions d’euros. Qu’il lui faudra rembourser, dans les meilleurs délais, aux créditeurs. Mais son conseil a indiqué qu’elle est, aujourd’hui, « seule et ruinée » et sera en peine de rembourser.

Une seule solution pour la veuve et les quatre enfants : renoncer officiellement à l’héritage- les quelques biens immobiliers (la résidence secondaire en Seine-et-Marne) et mobiliers serviront alors à rembourser, pour une part minime, les créditeurs. Commentaire d’une amie proche : « Dominique est une vaillante, elle tente d’être philosophe et dit qu’il faut tout recommencer à zéro mais c’est un cauchemar. Tout est parti en fumée ».

Et dans quelques jours, en mars tout proche, va débuter le tournage de Wonder Boy, une série télé en préparation depuis cinq ans initialement vendue à Canal+ mais que Bernard Tapie avait réussi à bloquer. Ce qu’il n’a pu faire avec Netflix, qui a repris l’histoire. Le clan Tapie craint le pire…

Serge Bressan (à Paris)


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