Un média d’investigation russe interdit par le Kremlin a enquêté sur la santé de Vladimir Poutine
Depuis plusieurs années, à intervalles réguliers, ressurgissent des rumeurs sur l’état de santé douteux du président russe, tantôt atteint d’un cancer ou de la maladie de Parkinson. Ces dernières se sont intensifiées avec l’entrée en guerre contre l’Ukraine. Selon le site d’investigation Proekt, un média indépendant russe blacklisté par le Kremlin, le président russe souffrirait d’un possible cancer de la thyroïde. Plusieurs spécialistes de la question serait parmi ses visiteurs les plus assidus. Vladimir Poutine, qui fêtera ses 70 ans en octobre prochain, est-il oui ou non en bonne santé ? C’est la question que l’Occident se pose.
Un étrange isolement
L’isolement maximum auquel s’est astreint Vladimir Poutine pendant la longue séquence du COVID-19 et l’extrême distance installée avec ses rares interlocuteurs directs trahissent peut-être autre chose que de simples mesures de prudence sanitaires. Le président russe aurait peut-être de bonnes raisons médicales de nourrir une certaine phobie vis-à-vis du virus.
La crainte que le coronavirus ne vienne très sérieusement aggraver un cancer de la thyroïde ? L’enquête du média indépendant Proekt révèle à tout le moins des informations précises et inédites sur l’armada de médecins dont s’entoure le président russe, particulièrement à des moments où il cesse d’apparaître en public. Est-ce pour se soigner ?
Un cancer de la thyroïde
Selon l’enquête réalisé par Proekt, un médecin spécialiste du cancer de la thyroïde exerçant à l’Hôpital Clinique Central de l’Académie des Sciences de Russie, situé à l’ouest de Moscou, aurait rendu visite plus de 35 fois à Vladimir Poutine en l’espace de 4 ans, essentiellement dans sa résidence de Sotchi située au bord de la mer Noire. Yevgeny Selivanov aurait passé au total 166 jours à ses côtés.

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Ce n’est pas le seul médecin que consulte avec assiduité le président russe. Il aurait ainsi fait appel très régulièrement à des oto-rhino-laryngologistes.
Les médecins Igor Esakov et Alexey Shcheglov auraient ainsi pris respectivement l’avion 59 fois et 38 fois sur une période de 282 jours pour ausculter le président russe. Or, les maladies de la thyroïde, y compris le cancer, sont généralement diagnostiquées en premier lieu par un oto-rhino-laryngologiste, après quoi un oncologue et un chirurgien interviennent dans le traitement. Le visage gonflé du dirigeant russe pourrait être le résultat d’un traitement aux stéroïdes contre le cancer.

Copyright : https://www.proekt.media/Le docteur Dimitri Verbovoy, un spécialiste de la réanimation, serait également consulté par le maître du Kremlin. Le spécialiste est l’auteur d’un ouvrage sur les soins d’urgence à prodiguer dans l’hypothèse d’une maladie aiguë, de blessures graves et d’empoisonnement. L’enquête relève également que Vladimir Poutine a récemment montré publiquement un intérêt particulier pour le problème du cancer de la thyroïde après avoir rencontré, en février 2021, Ivan Dedov, Président du Centre national de recherche médicale pour l’endocrinologie. De cet échange, il résulte que Vladimir Poutine se serait informé auprès de lui du taux de guérison de ce type de cancer, ce à quoi Ivan Dedov lui aurait répondu : 95 à 98%.

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Des bains au sang de bois de cerf
L’enquête de Proekt détaille également d’autres actions qu’aurait entrepris Vladimir Poutine pour se soigner. En plus des stéroïdes, le président russe se serait tourné vers la médecine alternative en essayant les bains de sang extrait de bois de cerf coupés. Le pantocrine, fruit de la recherche russe, est extrait du velours des bois de cerfs Maral. Il aurait des vertus toniques et rajeunissantes. Toujours d’après l’enquête du média russe, Vladimir Poutine n’aurait pas été convaincu de l’efficacité de ces soins, mais il continue toutefois, sur recommandation de son ministre de la Défense, Sergueï Choïgou, de se rendre dans cette clinique des montagnes de l’Altaï, en Sibérie, où ces bains sont prodigués
Proekt, média interdit par le Kremlin
Le 7 octobre de cette année, Vladimir Poutine fêtera son 70ème anniversaire. À cet âge, Joseph Staline avait eu sa deuxième attaque cérébrale, Leonid Brejnev était devenu à tel point incapable de tenir le pays que le pouvoir était passé aux mains de son entourage, Iouri Andropov n’a pas vécu jusqu’à cet âge et Boris Eltsine a démissionné en mauvaise santé. Dmitry Peskov, l’attaché de presse de chef de l’Etat, affirme régulièrement par voie de presse que Poutine est, à l’inverse, « en excellente santé » et qu’ il n’aura aucune difficulté à gérer la Russie jusqu’en 2036, son mandat ayant été prolongé jusqu’à cette date par une loi votée par le parlement en mars 2021 après un référendum constitutionnel à l’été 2020.
Alors, Vladimir Poutine est-il malade ou pas ? Fondé en 2018, Proekt est connu pour ses investigations approfondies sur la corruption des élites russes. En juillet 2021, le ministère de la justice russe a déclaré le média « indésirable » au motif que ses « activités présentent une menace à l’ordre constitutionnel et à la sécurité de la Fédération russe » et a classé son rédacteur en chef, Roman Badanine, et quatre autres journalistes du média sur la liste de groupes et individus désignés comme « agents de l’étranger ». D’après une loi promulguée en 2015, les organisations étrangères actives en Russie peuvent être déclarées « indésirables ». Elles doivent s’autodissoudre sous peine d’être interdites et leurs collaborateurs peuvent s’exposer à des amendes ou des peines de prison s’ils n’obtempèrent pas. Force est de constater que les investigations du média à tout le moins dérangent.
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