Une fois la sortie en forêt terminée, les armes des chasseurs ne perdent pas leur dangerosité. Certains de ces hommes peuvent les utiliser pour tuer leur femme. Sur 39 féminicides commis en France en 2021, 13 ont été commis par armes à feu. Mis en avant par diverses associations, ce chiffre permet de compléter des statistiques publiques peu détaillées sur le sujet. La Fondation des Femmes, qui lutte contre les violences faites aux femmes, dénonce une « baisse de vigilance de l’Etat ». Anne-Cécile Mailfert, présidente de la Fondation, estime que la confiscation automatique des armes en cas de plainte pour violences intrafamiliales n’est pas suffisamment appliquée.
Le 5 mai 2022 dernier, une femme âgée de 31 ans, mère de trois enfants, est morte après avoir été abattue en pleine rue par son compagnon armé d’un fusil de chasse de calibre 12. Touchée aux cuisses, elle s’est effondrée au sol. Son agresseur l’a aspergée d’un liquide avant de l’immoler par le feu. La maison de la victime située à quelques centaines de mètres du lieu du drame était concomitamment découverte en partie incendiée.
L’homme était pourtant connu des services de police. Il a été condamné en juin 2021 à 9 mois de prison ferme pour « violences volontaires par conjoint » sur la même femme qui est décédée. D’après le parquet de Bordeaux, le couple était depuis séparé. Ensemble, ils ont eu trois enfants, nés en 2008, 2013 et 2016.
Médecin légiste et psychiatre au CHU Poitiers, Alexia Delbreil étudie depuis une dizaine d’années la thématique des homicides conjugaux. Dans une étude portant sur l’homicide conjugal, et conduite en collaboration avec le spécialiste en criminologie clinique Jean-Louis Senon, elle évoquait déjà en 2018 au sujet des armes à feu « des armes d’opportunités, que l’on retrouve fréquemment dans les foyers », précisant que « parmi les armes blanches, 75% sont des couteaux de cuisine. De même, parmi les armes à feu, les fusils de chasse représentent 71% des cas ».
En ce qui concerne les hommes, qui représentant 80 à 85 % des homicides, ils rentrent dans deux grandes catégories : des situations de violences conjugales mélangées à de l’alcoolisme chronique et des situations de séparation de couple.
Reporterre affine ces chiffres pour 2020 et 2021. Le constat est net : les meurtriers sont quasiment exclusivement des hommes, ces derniers tuent leur (ex)compagne et le plus souvent, se suicident dans la foulée. Reporterre a identifié 94 morts provoquées par des armes de chasse en 2020, et 95 en 2021. Dans le détail, sont comptabilisés en 2020 : 38 hommes tués, 27 femmes tuées, 26 suicides, deux accidents auto-infligés et un décès provoqué par l’intervention en riposte du Groupe d’intervention de la gendarmerie nationale (GIGN). Et en 2021 : 41 hommes tués, 24 femmes tuées, 27 suicides, et trois morts provoqués par une intervention du GIGN.
La base de données de Reporterre met au jour un grand nombre de féminicides, suivis d’une tentative de suicide de la part du conjoint ou ex-conjoint. Dans la majorité des cas, l’acte est concomitant de la rupture conjugale. Globalement, environ 32 % des féminicides sont perpétrés à l’aide d’une arme à feu, dont des fusils de chasse.
D’après le décompte du collectif Féminicides par conjoint ou ex-conjoint, un fusil de chasse a été utilisé dans au moins 27,54 % des 102 féminicides de 2020, et 25,44 % des 106 meurtres de 2021. Soit 1 féminicide sur 4 provoqué à l’aide d’une arme de chasse. Par ailleurs, le risque de meurtre d’une femme est cinq fois plus élevé dans un foyer pourvu d’une arme à feu.
« Dans le contexte du récent féminicide de Mérignac, « le fusil et les cartouches retrouvées lors de l’interpellation du conjoint agresseur étaient détenus en toute illégalité. Il a déclaré les avoir acquis auprès de ‘voleurs. La détention d’armes à feu par des hommes violents avec leur conjointe est symptomatique d’une vigilance qui diminue au niveau de l’Etat », affirme Anne-Cécile Mailfert, présidente de la Fondation des femmes, tire la sonnette d’alarme
Mais ce nouveau drame est l’occasion pour l’association de rappeler que la confiscation des armes à feu après un dépôt de plainte pour violences intrafamiliales doit être automatique.
Au mois de février dernier, Gérald Darmanin, alors ministre de l’Intérieur, et Marlène Schiappa, alors ministre déléguée auprès du ministre de l’Intérieur, ont donné pour instruction dans un communiqué de presse de systématiser les saisies d’armes, et ce dès le dépôt de plainte. Mais, dans les faits, la présidente de la Fondation des femmes estime que cette mesure est encore trop peu appliquée.
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