Médias : Les social natives s’informent sur TikTok, Twitch et Instagram
Le Digital News Report 2022 de l’institut Reuters détaille la consommation médiatique des personnes âgées de 18 à 34 ans. La jeune génération s’informe différemment de ses aînés. Ils ne consultent pas, ou peu, les médias traditionnels comme la radio, la télévision et la presse papier, leur préférant les réseaux sociaux. S’ils accordent une faible confiance aux différents modes traditionnels d’accès à l’information et aux journalistes, ils n’en demeurent pas moins friands d’actualités, mais sous un autre format. TikTok en particulier devient la nouvelle horloge du monde dont il fixe le tempo avec ses vidéos courtes et engageantes. Une formule devenue le graal de toutes les plates-formes qui s’efforcent de reproduire la formule magique, avec plus ou moins de succès.
Le dernier rapport de l’institut Reuters (Link vers : https://reutersinstitute.politics.ox.ac.uk/sites/default/files/2022-06/Digital_News-Report_2022.pdf) détaille la consommation médiatique des personnes âgées de 18 à 34 ans. Cette classe d’âge englobe deux types d’informés : les social natives, ces jeunes adultes, âgés de 18 à 24 ans, biberonnés aux réseaux sociaux ; et les digital natives, les 25-34 ans qui ont, eux, grandi avec le numérique, mais pas avec Meta (ancien Facebook), Instagram et consorts. Il s’avère qu’ils n’entretiennent pas le même rapport avec les différents modes d’accès à l’information. 45 % des 25 et 34 ans se rendent sur les sites Internet ou les applications mobiles des médias généralistes pour suivre l’actualité. En comparaison, seuls 28% de leurs compatriotes âgés de 18 à 24 ans en font autant. Ces derniers sont plus susceptibles de s’informer grâce aux réseaux sociaux, aux agrégateurs et aux moteurs de recherche que leurs aînés.
Leur péché mignon : les sources d’information très visuelles comme Instagram, Telegram, Twitch et TikTok. L’application chinoise s’est imposée, en quelques années à peine, dans la routine médiatique des social natives. Ainsi, 8 % des 18 à 24 ans l’utilisent pour suivre les dernières actualités. Ils sont toutefois bien plus nombreux à consulter Twitter (21 %) et Instagram (17 %) dans cette optique. Si leurs aînés, les digital natives, s’informent aussi sur les réseaux sociaux, ils sont bien plus fidèles à Meta, avec qui ils ont grandi.
L’information différemment
Les jeunes générations préfèrent les réseaux sociaux aux médias traditionnels pour de multiples raisons. Elles apprécient tout particulièrement le ton informel des contenus informatifs que ces plateformes hébergent, ainsi que la liberté de traitement médiatique qu’elles permettent. « À la télévision, on voit toujours les mêmes choses, mais sur YouTube, Spotify, TikTok, il y a une grande variété », explique ainsi un Brésilien de 18 ans aux chercheurs de l’institut Reuters. « On peut avoir accès à tout ça et voir qu’il y a de la diversité et des façons de vivre différentes des nôtres ».
Si l’information peut être plus légère sur les réseaux sociaux, elle n’est pas pour autant décorrélée des grands événements mondiaux, comme la guerre en Ukraine. Les smartphones généralisent les possibilités du direct, tant pour les journalistes que pour les personnes qui ne sont pas des professionnels des médias. Ces outils permettent à des militaires de s’improviser reporters de guerre et de poster des vidéos montrant le conflit tel qu’ils le vivent « de l’intérieur » sur TikTok.
Lassés par les news anxiogènes
Près de 40 % de la population mondiale éviterait sciemment de prendre connaissance des dernières actualités, contre 29 % en 2017. Ce phénomène est particulièrement visible dans certains territoires comme le Brésil et le Royaume-Uni, mais aussi chez les jeunes générations. Un tiers des moins de 35 ans se détournent des news, parce qu’elles ont un impact négatif sur leur humeur et 39 %, parce qu’ils les trouvent trop répétitives. Cette lassitude s’explique par le fait que les moins de 35 ans souhaiteraient que l’actualité reflète mieux leurs préoccupations, comme la santé mentale et le bien-être, la justice sociale, l’environnement et le changement climatique.
Une tendance confirmée par une autre étude réalisée par la News Media Alliance. L’organisation professionnelle américaine avait constaté que « les Américains âgés de 21 à 29 ans, soit la génération Z, veulent se voir dans les médias et veulent se sentir reconnus en leur proposant des contenus qui leur ressemblent ».
Désinformation et propagande
Mais cette facilité d’accès à l’information n’est pas sans danger. C’est le constat posé par NewsGuard, une start-up fondée en 2018 aux États-Unis dans le contexte de l’explosion du flux de fake news partagées sur les réseaux sociaux au moment de l’élection présidentielle américaine. L’entreprise spécialisée dans la lutte contre la propagation des fausses informations et l’évaluation de la fiabilité de l’information en ligne a récemment publié sur son site un compte rendu à ce sujet (Link vers : https://www.newsguardtech.com/fr/misinformation-monitor/mars-2022/).
Les utilisateurs de TikTok, entre autres, se retrouvent confrontés à des contenus mensongers ou à de la propagande à propos notamment de la guerre en Ukraine. L’algorithme de la plateforme recommanderait même ces contenus fallacieux. L’enquête réalisée montre que chercher des termes génériques liés au conflit, comme « Ukraine » ou « Donbass » pousse TikTok à suggérer de nombreuses vidéos contenant de fausses informations dans les vingt premiers résultats, avance le rapport, précisant qu’il s’agit à la fois d’infox pro-russe et « pro-Ukraine.