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Djihadisme en Syrie : 16 femmes et 35 enfants rapatriés en France

Ces enfants de djihadistes et ces femmes étaient retenus dans le camp de Roj, contrôlé par les Kurdes, dans le nord-est syrien - Archives AFP

Fin juin, la Belgique a rapatrié plusieurs enfants de djihadistes et leurs mères de nationalité belge, « épouses de Daech », après les avoir exfiltrés du nord-est de la Syrie. Un mois plus tard, la France emboîte le pas de cette politique de rapatriement collectif basée sur l’intérêt supérieur de l’enfant. Ce mardi 5 juillet, l’opération s’est tenue en toute discrétion depuis le camp syrien de Roj. Les autorités françaises avaient une liste de noms d’enfants et de femmes de combattants djihadistes à devoir rapatrier. Au total, 16 mères âgées de 22 à 39 ans et 35 mineurs ont ainsi pu être récupérés. Dès leur arrivée sur le sol français, les femmes ont été remises aux autorités judiciaires. Quant aux enfants, ils ont été pris en charge par les services de protection de la jeunesse. Jusqu’ici, l’Hexagone, relativement réticent, prônait un examen au cas par cas des dossiers.

Régulièrement, les associations appellent à rapatrier les enfants retenus dans des camps syriens avec leurs mères djihadistes. « Ces enfants grandissent entourés de barbelés, dans la boue, et dorment sous des tentes de fortune, été comme hiver. Ils manquent de soins, ne bénéficient d’aucun soutien psychologique et ne sont pas scolarisés », dénonce le collectif Familles unies qui regroupe notamment des grands-parents de ces enfants.
La France n’avait plus diligenté d’opération depuis 16 mois. En février dernier, après avoir examiné des requêtes concernant le rapatriement de 49 enfants français détenus en Syrie, le comité des droits des enfants de l’ONU avait estimé que par son inaction, la France violait les droits de ces derniers. « La France a la responsabilité et le pouvoir de protéger les enfants français dans les camps syriens contre un risque imminent pour leur vie en prenant des mesures pour les rapatrier », avait-il estimé.

Que va-t-il se passer pour eux ?

 Les 16 femmes rapatriées ont toutes la nationalité française, à l’exception de deux d’entre elles qui ont des enfants français, précise le Parquet national anti-terroriste (PNAT). Parmi ces femmes, figure Émilie König, 37 ans, l’une des recruteuses françaises les plus actives de Daech, et inscrite depuis 2015 sur la liste noire américaine des terroristes internationaux. Elle a été mise en examen et incarcérée. Les autres femmes ont été remises aux autorités judiciaires. Huit d’entre elles ont été placées en garde à vue en exécution d’un mandat de recherche. Les autres faisaient l’objet d’un mandat d’arrêt.

Ne pas les rapatrier, c’est donner des munitions pour alimenter la propagande djihadiste.

Les mineurs ont, quant à eux, été pris en charge par les services d’aide à l’enfance, sous la protection du juge des enfants, et soumis à des examens médicaux. Un seul d’entre eux a été placé en garde à vue en raison « d’éléments susceptibles de caractériser sa participation à une association de malfaiteurs terroriste ».

Dans tous les cas, une condition a été imposée aux femmes pour être accueillies sur le territoire français: avoir exprimé des regrets et renoncer à l’idéologie djihadiste. La filiation française des enfants a aussi dû être prouvée.

 


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Victimes de l’endoctrinement parental

Tous les pays sont loin d’avoir adopté la même politique concernant le rapatriement d’enfants de djihadistes. Jusqu’ici, les autorités françaises prônaient une politique « au cas par cas » concernant les éventuels retours de femmes et enfants de djihadistes français capturés en Irak et en Syrie. C’est la première fois, depuis la chute de l’organisation Etat islamique (EI), qu’un rapatriement « massif » est organisé.

Parmi les pays les plus « vertueux » en termes de « retours », figurent les pays du nord de l’Europe : le Danemark, la Finlande et la Suède. Mais, tous s’accordent sur un point : laisser ces enfants en Syrie, c’est faire en sorte qu’ils deviennent les terroristes de demain, avec des risques d’endoctrinement dans les camps.
Ne pas les rapatrier, c’est donner des munitions pour alimenter la propagande djihadiste. La politique du retour se veut aussi humaniste, soit : judiciariser les mères, prendre en charge les enfants et maintenir le lien maternel. Même si leurs mères sont en détention, des dispositifs sont mis en place pour que les enfants puissent continuer à les voir.

La Belgique compte, avec la France, parmi les pays européens ayant vu partir le plus grand nombre de combattants étrangers après le déclenchement de la guerre en Syrie en 2011. Plusieurs milliers d’enfants nés depuis sont toujours présents dans les camps en Syrie et en Irak.