OPINION

Controverse en Belgique autour d’un éventuel transfert en Iran d’un diplomate-terroriste

Assadolah Assadi et ses trois complices. Crédit: Facebook

Le nom d’un Iranien, condamné pour terrorisme, est au centre d’une controverse qui fait des vagues en Belgique, dont le gouvernement vient de présenter un projet de loi pour permettre le transfert de prisonniers avec l’Iran. Assadollah Assadi est le cerveau d’un attentat à la bombe déjoué en 2018 près de Paris et de nombreuses voix se sont élevées pour dénoncer un marchandage honteux avec la dictature iranienne.

Assadi a été condamné par le tribunal d’Anvers en février 2021 à 20 ans et ses trois complices à 18 ans de prison. Avec son renvoi vers l’Iran, où il retrouvera sa libération après seulement quatre années passées derrière les barreaux, la Belgique entend obtenir la libération du belge Olivier Vandecasteele, incarcéré arbitrairement dans la prison d’Evine à Téhéran depuis quatre mois. Son arrestation a eu lieu dans un contexte de très haute tension autour de la condamnation d’Assadollah Assadi par la justice belge.

Des occidentaux arrêtés sous prétexte d’espionnage

Si le traité sur le transfert de prisonniers avec l’Iran est adopté ce jeudi 14 juillet  par le Parlement belge, il ouvrira la porte à l’échange de prisonniers avec la dictature iranienne, connue pour le chantage aux otages dont elle s’est fait une spécialité. Téhéran a pris l’habitude d’emprisonner des Occidentaux (sous prétexte d’espionnage), qu’elle utilise ensuite comme monnaie d’échange diplomatique.

Vincent Van Quickenborne, ministre de la Justice du Gouvernement belge a indiqué la semaine dernière devant les députés : « Effectivement, c’est quelque chose qui doit être mis dans la balance (…) C’est l’avis de nos services de sécurité qui doit être la boussole. Ils nous disent clairement que ne pas conclure ce traité signifie demain encore davantage de prises d’otage et davantage de vies mises en danger. »

La députée belge d’origine iranienne, Darya Safai, qui a personnellement vécu dans une prison iranienne, s’est indignée : « C’est une journée noire pour la Belgique. Cela porte atteinte à notre sécurité si nous cédons au chantage des mollahs. Cet accord fera de la Belgique un refuge sûr pour les terroristes. Le gouvernement devrait avoir honte. Ceux qui ont voté pour le deal avec l’Iran peuvent-ils encore se regarder dans le miroir ? »

Libérer un terroriste condamné

Le chef de groupe, N-VA,  la Chambre des représentants, Peter De Roover, a, pour sa part, dénoncé la dérision de la justice et a estimé que « L’accord avec l’Iran vise à libérer un terroriste condamné. Cela constitue un tournant et va saper la justice internationale ».

La condamnation d’Assadi par le tribunal d’Anvers avait eu lieu au terme d’un procès historique, car c’était la première fois qu’un diplomate-terroriste du régime iranien était jugé et envoyé derrière les barreaux sur le sol européen. L’affaire compte 25 parties civiles, des personnalités politiques aux États-Unis et en Europe.

L’accord avec l’Iran vise à libérer un terroriste condamné. Cela constitue un tournant et va saper la justice internationale.

L’attentat à la bombe avait été approuvé par les hautes sphères du régime, notamment par le Conseil suprême de sécurité nationale du régime iranien et avait reçu l’aval du Guide suprême, Ali Khamenei, en personne.

Assadi avait utilisé son immunité diplomatique et les installations de l’ambassade pour transporter la puissante bombe de Téhéran à Vienne dans un avion de ligne. Il avait remis l’engin doté de 500 grammes d’TATP, transporté dans une valise diplomatique, à deux de ses complices pour la poser dans le grand rassemblement de l’opposition iranienne à Villepinte près de Paris.

Appel pour un rejet de la loi de transfèrement

L’évènement avait réuni des dizaines de milliers de membres de la diaspora iranienne venues des quatre coins du monde pour revendiquer la fin du régime des mollahs en Iran. De nombreux députés et des personnalités européennes, arabes, africains et américains avaient également fait le déplacement en solidarité à la cause iranienne et pour soutenir le programme de Maryam Radjavi, dirigeante du Conseil national de la Résistance Iranienne (CNRI), pour un Iran libre et non nucléaire.

Les unités de résistance en Iran sont un puissant réseau à l’intérieur du pays affilié au CNRI et préconisent le renversement de la dictature à travers les manifestations populaires et le soulèvement national.

Si ce projet de loi est adopté, personne en Europe ne connaitra de sécurité et d’immunité contre les assassins au pouvoir en Iran. 

La coalition de l’opposition est la bête noire du régime, qui a cherché à éliminer ses opposants par les tueries en Iran, et par les assassinats et les attentats terroristes à l’étranger.

Maryam Radjavi a appelé les représentants du peuple belge au parlement à rejeter le projet de loi et a estimé que si le projet de loi est adopté, « le fascisme religieux au pouvoir en Iran sera bien plus agressif dans ses actes terroristes en Europe. Aujourd’hui, si ce projet de loi est adopté, personne en Europe ne connaitra de sécurité et d’immunité contre les assassins au pouvoir en Iran. »

Marchander sur la vie de milliers de personnes qui étaient en danger lors du rassemblement de Villepinte en 2018 est une tache de honte indélébile et constituera le plus grand encouragement au terrorisme et au crime sur le sol européen. Il convient d’y mettre fin.

Hamid Enayat

Ecrivain

Politologue et expert de l’Iran basé à Paris