SANTE

Allemagne : le statut vaccinal de chacun reconnaissable à sa couleur


Lors d’une conférence de presse, le médecin épidémiologiste et ministre fédéral de la Santé allemand Karl Lauterbach (SPD) a annoncé vouloir intégrer une nouvelle fonctionnalité à l’application Corona-Warn, l’équivalent en Belgique de l’application CovidSafeBE. Le statut vaccinal de chaque personne sera désormais reconnaissable à la couleur de son QR code. Chaque couleur sera aussi associée à différents droits, plus ou moins élargis, selon le statut de vaccination, un système qui existe déjà en Chine. Via l’application, Alipay Health Code, les Chinois sont désormais classés par codes couleurs en fonction de leur supposée dangerosité. Le ministre a par ailleurs énoncé le souhait que, dès le mois d’octobre prochain, les triples vaccinés soit traités comme les non vaccinés. Les critiques fusent. L’Union chrétienne-démocrate d’Allemagne (la CDU) a notamment réagit en taclant le ministre : « le plan Corona pour l’automne doit aider Karl Lauterbach à vider ses stocks de vaccins qui débordent ».

Un modèle de surveillance à la chinoise

Selon la volonté de Karl Lauterbach, ces nouvelles règles s’appliqueront à partir d’octobre dans le but d’inciter à la quatrième et à la cinquième vaccination. D’après ce plan Corona, les Allemands auront besoin de deux vaccins supplémentaires pour pouvoir participer entièrement à la vie publique, sans masque ni test d’octobre à avril. Loin de faire l’unanimité, ce projet défendu est très controversé.

Des avantages à la carte

Les critiques portent, entre autres, sur la proposition d’exempter uniquement les personnes récemment vaccinées de l’obligation de porter un masque. Si ce système est mis en place, les personnes non récemment vaccinée auront le même statut que les non-vaccinés. Une égalité qui leur donnera les mêmes droits ou plutôt les mêmes « absences » de droit que les personnes qui ont refusé les injections.
Pour le ministre de la santé : « Si des vaccins qui protègent contre les infections sont disponibles en automne, ils devront également apporter un avantage aux personnes vaccinées. On ne peut pas renoncer au masque à l’intérieur. Pour les personnes récemment vaccinées, une exception serait justifiable. »

Cette situation de « privilèges » que le ministre envisage comme une incitation à se faire vacciner inquiète les restaurateurs, propriétaires de salle de cinéma et autres patrons d’établissements qui reçoivent du public, mais aussi les défenseurs des libertés fondamentales qui y voient un modèle de surveillance à la chinoise.

Un passe-droits

Pour circuler en Chine, il faut montrer patte blanche en présentant son QR Code médical. Disponible au sein de l’application de paiement mobile Alipay, ce service utilise des données gouvernementales pour évaluer le risque qu’une personne soit porteuse du Covid-19. Chaque individu est ensuite classé selon un code couleur.

Les couleurs du QR code de santé sont établies à partir du niveau de risque déterminé par un algorithme via les données collectées. Selon leur état de santé, les personnes bénéficient de droits différents. Ainsi, un code vert permet de se déplacer librement, le jaune et le rouge signifient jusqu’à deux semaines de quarantaine et l’obligation d’effectuer des tests de dépistage, etc.

 

La STIKO ne recommande pas

La CDU émet de vives réserves. Ces propositions sont en contradiction flagrante avec les recommandations de la STIKO en vigueur, la STIKO étant la Commission permanente pour l’évaluation de la vaccination en Allemagne. Tino Sorge, député CDU du Bundestag, le rappelle sur Twitter : « La Commission permanente pour les vaccinations ne recommande la quatrième vaccination qu’aux personnes âgées de plus de 70 ans. Dans ce cadre dressé, le plan de Lauterbach ne tient pas ».

Les critiques fusent aussi du côté de la science. Le virologue Hendrik Streeck a déclaré au Bild que « se faire vacciner en permanence ne peut pas être la solution ». Et de préciser : « les personnes devraient se faire vacciner si elles veulent réduire le risque d’une évolution grave et pas dans l’espoir d’obtenir plus de libertés ».

 

 

Copyright : Le ministre allemand de la Santé, Karl Lauterbach, le 8 avril 2022 à Berlin – AFP