TERRORISME

L’Iran se prépare-t-il à accueillir en grande pompe Assadollah Assadi ?

Des militants de l'opposition iranienne protestent avec une affiche représentant le responsable iranien Asadollah Assadi, à Bruxelles, en octobre 2018. D.R.

Assadollah Assadi (50 ans) est l’homme que la Belgique veut renvoyer à ses commanditaires en Iran. Incarcéré depuis 2018 à la prison de Beveren, le diplomate iranien a été condamné, en 2021, à 20 ans de prison par un tribunal anversois pour sa participation active à la planification d’un attentat déjoué lors d’un congrès du Conseil national de la résistance iranienne (CNRI), à Villepinte (Paris), rassemblant des milliers de personnes. L’homme a, entre autres, fait passer en Europe une bombe en provenance d’Iran réceptionnée dans une valise diplomatique à l’aéroport de Vienne. Or, les autorités iranienne ne reconnaissent pas le verdit rendu par la justice belge. Le conflit est ouvert depuis et la pression est mise sur des otages étrangers détenus en Iran, ce qui a conduit la Chambre des représentants belge à approuver, le 20 juillet dernier, un traité belgo-iranien sur l’échange de criminels condamnés. Aladdin Touran, membre de la commission des affaires étrangères du CNRI (Conseil national de la résistance iranienne) nous explique pourquoi ce transfèrement semble imminent et pourquoi l’impunité est une arme de destruction massive des mollahs. Révélations.

Selon l’opposition iranienne, une cérémonie d’accueil était prévue pour le retour du terroriste Assadollah Assadi à l’aéroport de Téhéran vers la fin août ou le début du mois de septembre. Et cette information semble aller dans le sens de l’actualité. Assadollah Assadi (50 ans) devrait rentrer en grande pompe chez lui en échange du travailleur humanitaire Olivier Vandecasteele (41ans), arrêté à Téhéran le 24 février dernier. Ce vendredi 16 septembre, un ouvrage enquête, fournissant le récit complet du complot terroriste contre le Sommet mondial Free Iran en juin 2018, « Terrorisme diplomatique, Anatomie de la terreur d’État iranienne », sera présenté au public. Plusieurs parties civiles de l’affaire, dont Ingrid Betancourt, ancienne sénatrice colombienne et candidate à la présidence ainsi que Robert Guy Torricelli, ancien sénateur américain (démocrate), victimes potentielles de l’attentat déjoué, s’exprimeront lors du point de presse. Aladdin Touran nous livre des éléments nouveaux avant ce point presse.

Un membre actif des services de renseignement iraniens

L’ouvrage fait le compte rendu du complot depuis sa conception, sa planification et son exécution minutieuse. Il s’appuie, en grande partie, sur les documents de l’enquête judiciaire. Des révélations qui soulignent qu’Assadollah Assadi n’est pas un terroriste ordinaire, mais qu’il a été dirigé par le sommet du régime iranien. S’il a officiellement exercé comme diplomate auprès de l’ambassade d’Iran en Autriche, il a en fait été employé pendant des années par le ministère du Renseignement et de la Sécurité (MOIS) et il coordonnait des activités clandestines dans toute l’Europe. Amir Saadouni (42 ans), l’homme de Wilrijk qui devait faire exploser la bombe à Villepinte, a d’ailleurs admis qu’il connaissait bien Assadi depuis 2007 et que ce dernier le payait pour infiltrer le CNRI (Conseil national de la résistance iranienne) depuis 2015.

D’après notre réseau d’informations, le transfèrement d’Assadi est une question de jour. D’ailleurs, la presse iranienne s’en fait déjà l’écho. Une cérémonie officielle était prévue fin août à l’aéroport de Téhéran.

Une légitimation du terrorisme

Pour Aladdin Touran, Il est fort à craindre que le retour potentiel d’Assadi en Iran n’enhardisse le régime à étendre ses activités terroristes en Europe. « D’après notre réseau d’informations, le transfèrement d’Assadi est une question de jour. D’ailleurs, la presse iranienne s’en fait déjà l’écho. Une cérémonie officielle était prévue fin août à l’aéroport de Téhéran. Le comité de réception était prêt. Le régime du grand ayatollah Ali Khamenei voulait qu’Assadi soit honoré devant son propre peuple comme un héros national. Cela fait partie de la stratégie. Conforter son pouvoir par la crainte à l’intérieur du pays comme à l’international et montrer que l’Iran n’abandonne jamais les combattants iraniens à l’étranger à leur sort ».

Cette stratégie semble aller dans le sens des déclarations de M. Khatibzadeh, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères de la République islamique d’Iran (IRNA) le 10 mai dernier : « toutes les étapes de l’arrestation, du procès et de l’émission d’une sentence judiciaire pour Assadollah Asadi ont été réalisées en violation flagrante des dispositions de la Convention de Vienne sur les droits diplomatiques, et la protestation de la République islamique d’Iran a déjà été officiellement annoncée à l’Autriche, l’Allemagne et la Belgique (…) Nous rejetons les accusations et nous demandons sa libération immédiate (…) En plus de sa libération immédiate, nous suivons la question de l’indemnisation, de la restauration de la dignité et de l’engagement de non-répétition ».

Déjà plusieurs précédents

Aladdin Touran nous rappelle par ailleurs que « la même chose est arrivée par le passé à Mohammad Jafari Sahraroudi, Kazem Darabi, Ghafour Darjazi et Aniss Naghash, considérés comme des criminels de guerre ailleurs dans le monde. Ils ont été accueillis comme des héros et ont obtenu des postes élevés au sein du Gouvernement iranien. ». Et de nous préciser : « c’est aussi le plan prévu avec Assadi. Sa famille s’est vu offrir une villa dans le nord de l’Iran après son arrestation. Il est maintenant question d’une résidence à Téhéran, où Assadi pourra immédiatement recommencer une nouvelle vie dans l’entourage du guide Ali Khamenei dès le jour de son retour. Les enfants d’Assadi poursuivent d’ailleurs déjà leur scolarité dans le lycée Farhang Highschool dirigé par un proche de Khamenei, où sont préparés les futurs cadres du régime ».

Il est maintenant question d’une résidence à Téhéran, où Assadi pourra immédiatement recommencer une nouvelle vie dans l’entourage du guide Ali Khamenei dès le jour de son retour.

La stratégie de la menace

Plusieurs pôles de pouvoir coexistent en République islamique d’Iran et la division menace. À cela s’ajoute la conviction permanente du nationalisme iranien d’être encerclé et menacé, ce pourquoi les négociations entre l’Iran et les grandes puissances échouent perpétuellement, encore tout récemment sur la question du nucléaire, malgré moultes sanctions économiques imposées depuis 2006 au pays par la communauté internationale. Parallèlement à la répression à l’intérieur du pays, le régime théocratique poursuit son œuvre terroriste au-delà de ses frontières. « La seule parade des mollahs pour assoir leur influence et garder le contrôle est donc la stratégie de la dissuasion par la menace terroriste. Le message est aussi répressif vis-à-vis du peuple iranien. On est les plus fort vis-à-vis du monde étranger, mais on tient aussi le pays avec une main de fer, ce qui soutient que toute forme de rébellion intérieure ne serait pas la bienvenue », nous explique Aladdin Touran.

Résister aux tactiques iraniennes

Selon plusieurs rapports des Nations Unies et d’Amnesty International, le président de l’Iran depuis 2021, Ebrahim Raïssi, a été impliqué dans le massacre de 30.000 prisonniers politiques en 1988, la grande majorité d’entre eux étant des moudjahidines du peuple, les principaux opposants politiques de la République islamique. De manière plus générale, Amnesty International parle d’une « immunité systématique des personnes impliquées dans la torture » en Iran. L’impunité totale des auteurs et responsables de violations des droits de l’homme devient un phénomène très inquiétant.

Le 8 septembre dernier, 68 juristes et défenseurs des droits de l’homme belges et internationaux ont adressé une lettre ouverte au Premier ministre, Alexander de Croo (Open VLD). Ils demandent instamment au Gouvernement belge de ne pas renvoyer le terroriste iranien, Assadollah Assadi, en Iran et de résister aux tactiques iraniennes. Renvoyer Assadollah Assadi en Iran ne ferait qu’alimenter la culture d’impunité qui existe chez les responsables iraniens.

Cela créerait, en outre, un dangereux précédent et affaiblirait sérieusement l’Etat de droit en Europe. L’article 13 du traité de transfèrement signé avec l’Iran stipule en effet que : « Chaque partie peut accorder la grâce, l’amnistie ou la commutation de la peine conformément à sa Constitution ou à d’autres lois ». Cette disposition permet donc au Gouvernement iranien de libérer Assadollah Assadi dès son arrivée sur le sol iranien. Cela encouragera de facto davantage le terrorisme et rassurera les responsables iraniens sur le fait qu’ils pourraient échapper à toute responsabilité dans les crimes internationaux majeurs.

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QUAND UN TRAITÉ BELGO-IRANIEN ACCORDE L’IMPUNITÉ AU FASCISME RELIGIEUX DES MOLLAHS

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