FRANCE/POLITIQUE

La Droite française (LR) ne tient pas encore son président : Eric Ciotti et Bruno Retailleau seront départagés lors d’un second tour

Eric Ciotti (à gauche sur la photo) et Bruno Retailleau (à droite) portent des lunettes, mais ils emmènent Les Républicains dans des directions différentes. AFP

D’une élection à l’autre. Alors qu’en Belgique se déroulait, dimanche 4 décembre, l’élection présidentielle chez Défi, au même moment en France, les membres du parti Les Républicains (LR) étaient appelés aux urnes pour choisir leur leader et départager trois candidats. En ce début décembre 2022, la donnée du problème est toute simple : pour la droite française, et tout spécialement pour le parti LR, c’est le rebond ou la chute. Et pour l’heure, à l’issue du premier tour de l’élection pour la présidence du principal parti de la droite française, il n’y a pas de réponse puisque Eric Ciotti et Bruno Retailleau s’affronteront, lors d’un deuxième tour, les 10 et 11 décembre prochains. Le futur président devra remettre LR à flot financièrement et imposer une ligne claire à l’ancien RPR. Mais pour certains, les jours des LR sont comptés, ils comparent d’ailleurs la situation du parti à celle du Titanic pendant le naufrage…

Arrivé en tête avec 42,73% des 66 216 votants (sur 91 100 inscrits), Eric Ciotti, 57 ans, député des Alpes-Maritimes, a commenté le résultat : « Cela a été une belle campagne disputée. C’est la première fois dans une élection interne qu’il y a un vrai enjeu, un vrai suspens… Il ne faut surtout pas oublier l’avenir de la France et le devoir d’offrir une alternative pour redresser une France qui sombre ». Bruno Retailleau, 62 ans, sénateur de Vendée, président du groupe LR au Sénat et 34,45% des suffrages des votants LR, ne cachait pas sa satisfaction : « C’est l’assurance que le prochain président, moi-même j’espère bien, aura la légitimité pour présider notre parti, parce que notre chantier sera herculéen », et d’ajouter, se projetant déjà aux commandes du mouvement LR : « Seulement un peu plus de 5 000 voix me séparent du score d’Éric Ciotti, donc au contraire tout est jouable »… Sous-entendu : le candidat arrivé 3ème dans ce premier tour, Aurélien Pradié, avec ses 22,29% de voix tient le résultat final dans ses mains et se retrouve dans le rôle du « faiseur de roi », même s’il a fait savoir qu’il ne donnait aucune consigne de vote à ses partisans… « Avec Ciotti et Retailleau, c’est une finale à droite toute », confie un observateur de la chose publique.

Avec Ciotti et Retailleau, c’est une finale à droite toute.

Une mission qui ne sera pas une sinécure

Et quel que soit le vainqueur, la tâche du nouveau président LR qui succèdera à Christian Jacob, démissionnaire en juin dernier, paraît colossale. Longtemps premier parti de France, axe fort de la Vème République, le parti (hier RPR ou encore UMP) a connu le ridicule avec la cinquième place de Valérie Pécresse au premier tour de la présidentielle 2022 avec un score de 4,78%, puis perdu le mois suivant plus de la moitié de ses députés avec seulement 61 sièges à l’Assemblée Nationale, loin derrière la majorité présidentielle Renaissance !, le Rassemblement national (RN) ou encore La France Insoumise (LFI)…

Alors, à l’heure du déclin, que faire ? Eric Ciotti, surnommé « le porte-flingue » et challenger inattendu de Valérie Pécresse lors de la primaire LR en décembre 2021, est un adepte de la « droite autoritaire », tandis que Bruno Retailleau, surnommé « le curé vendéen » et fidèle de François Fillon, est le chef de file de la « droite conservatrice ».

Pactiser avec la majorité présidentielle ou avec l’extrême droite ?

Les deux candidats se retrouvent sur un point : pas question de travailler avec la majorité et Emmanuel Macron, affirmant haut et fort « pas de dilution de LR dans Renaissance ! ». Ils sont prêts à renverser la table en montrant la sortie à Nicolas Sarkozy et à ses amis prônant le rapprochement avec la majorité présidentielle. Autre point de connexion entre les deux finalistes : on crie bien fort « pas question de pactiser avec l’extrême droite », mais on n’est pas insensible à certains sujets défendus par le RN de Marine Le Pen et Reconquête ! d’Eric Zemmour. Ainsi, Eric Ciotti s’est même laissé à dire : « Plutôt Zemmour que Macron »…

Il y a urgence à assainir nos finances.

Autre sujet auquel, dès son élection le 11 décembre prochain, sera confronté le nouveau président des LR : les finances du parti. Jamais, elles n’ont été aussi mauvaises, double conséquence de la déroute de Valérie Pécresse à la présidentielle 2022 (comme le veut la loi, avec moins de 5% au premier tour, les frais de campagne, estimés à  75 millions d’euros, n’ont pas été remboursés par l’Etat) et de la perte d’une bonne moitié de ses députés à l’Assemblée Nationale, avec une dotation de l’Etat passée de 13 millions d’euros à 10 millions d’euros par an pour la mandature 2022-2027. « Il y a urgence à assainir nos finances », confie un député LR. Ce à quoi Daniel Fasquelle, le trésorier du parti, répond : « Avec nos 93 000 adhérents, nos 61 députés à l’Assemblée nationale et la majorité au Sénat, nous sommes le premier parti de France ». On se console comme on peut… et certains, mesquins ?, comparent déjà le parti LR au Titanic : le navire coule et pendant ce temps, la musique continue…

Serge Bressan (à Paris)