MOBILISATION

Royaume-Uni: les enseignants battent le pavé pour des salaires décents 

Les enseigants ont manifesté ce 1er février à Londres pour revendiquer de vraies augmentations de salaires. AFP

Ce mercredi 1er février, les enseignants membres du National Education Union (NEU) travaillant dans les écoles et les collèges de sixième en Angleterre et les enseignants et membres du personnel de soutien dans les écoles du Pays de Galles étaient en grève. La principale revendication des grévistes est d’ordre salarial. Les salaires des enseignants ont baissé en moyenne de 11 % en termes réels entre 2010 et 2022, selon l’Institute for Fiscal Studies.

A l’appel de leurs syndicats, les enseignants et professeurs de l’enseignement britannique ont observe une journée de grève ce mercredi 1er février et battu le pavé dans la journée. La principale revendication des grévistes porte sur les salaires. Selon l’Institute for fiscal studies, Les salaires des enseignants ont baissé en moyenne de 11 % en termes réels entre 2010 et 2022. De leur côté, les syndicats affirment que le salaire des enseignants a chuté de 23 % au cours de cette période. En Angleterre et au Pays de Galles, la plupart des enseignants ont enregistré une augmentation de leur salaire de 5 % l’année dernière.

En Irlande du Nord, de nombreux enseignants se sont vu offrir une hausse de salaire de 3,2 % pour 2021/22 et 2022/23, et en Ecosse, ils ont obtenu jusqu’à 6,85 %.

Les syndicats affirment que ces augmentations ont largement été absorbées par l’inflation et qu’au final, les enseignants ont plutôt enregistré des réductions de salaire. Mais le gouvernement affirme qu’il a déjà accepté un financement supplémentaire de 2 milliards de livres sterling pour les écoles en Angleterre.

40.000 manifestants à Londres

A Londres, plus de 40.000 travailleurs ont paralysé le centre de la capitale mercredi. Ils ont défilé dans la ville lors d’une manifestation organisée par le syndicat de l’éducation nationale (NEU) et d’autres organisations des travailleurs de l’enseignement (UCU, PCS, Aslef) dans le cadre d’une journée d’action.

Les grévistes manifestants ont été rejoints par des militants syndicaux d’autres secteurs (transports/RMT, secteur public/Unison, communication/CWU) ainsi que des étudiants, des militants pour le climat, des sages-femmes et d’autres syndicalistes.

Les enseignants ont quitté les stations de métro de Oxford Circus pour se rendre à Portland Place devant les studios de la BBC où la manifestation a commencé.

Alors que les affiliés du NEU remontaient Regent Street pour rejoindre la manifestation, les piquets de l’UCU devant l’Université de Westminster ont applaudi. « Au cours de ma longue carrière dans l’enseignement, j’ai vu des coupes massives dans l’éducation et dans nos écoles, la situation dans nos écoles est intenable. Nous avons des défis financiers que nous n’avons jamais vus auparavant, donc l’impact pour les enfants est vraiment réel. Mon principal message est de financer nos écoles. Faire en sorte que les écoles aient l’argent dont elles ont besoin pour offrir une éducation à nos enfants », nous a confié Deborah, une gréviste.

les enseignants en ont juste assez de ne pas être payés équitablement pour leur travail.

Les manifestants se sont dirigés vers Downing Street, la résidence du Premier ministre britannique, aux sons de sifflets, de chants, de tambourins, d’acclamations, de la musique et de la danse.

Le tout dans une ambiance bon enfant. La foule est composée majoritairement composée de jeunes femmes. Les manifestants brandissaient des pancartes affichant leurs revendications:  « Pay up ».

Ils les scandaient: « Non, ce n’est pas un mais, pas de coupes dans l’éducation », « Que voulons-nous ? Salaire équitable », « Quand est-ce que nous le voulons? Maintenant! », « Que voulons-nous ? L’égalité salariale quand le veut-on ? Maintenant »,  « pouvoir de l’Union »…

Un peu plus loin sur Regent Street, Loïs, une jeune femme nous explique que « les enseignants en ont juste assez de ne pas être payés équitablement pour leur travail. L’augmentation de salaire qui a été proposée n’est pas financée et c’est une réduction de salaire en termes réels. Ce n’est pas assez bon. Le message principal est de respecter de nombreuses communautés et travailleurs différents et de nous payer ce que nous méritons ».

Le burn-out des enseignants 

Les manifestants rappellent aussi un mal qui ronge les enseignants: le burn out. « Nos écoles sont vraiment sous-financées et  cela rend notre travail d’enseignant plus difficile. Nous n’avons pas les ressources dont nous avons besoin par exemple l’accès à des services en matière de santé mentale. Le burn-out des enseignants est une réalité. Je sais que pour certains enseignants, la crise du coût de la vie affecte leur situation. Je connais des collègues qui ont du mal à nourrir leur famille et à trouver un mode de vie décent tout en travaillant à temps plein en tant qu’enseignant. Le gouvernement doit accorder plus de financement aux écoles s’il veut que nous fournissions une bonne éducation aux enfants du pays », témoigne Natasha, institutrice dans une école primaire, croisée à Picadilly Circus.

« On est complètement épuisés », renchérit Sarah, 28 ans, une autre enseignante. Elle n’est pas optimiste sur l’avenir de sa profession. « Un tiers des enseignants partira après 5 ans, je suis dans ma 4ème année d’enseignement et je me sens déjà à bout de souffle. Mon école n’a pas assez d’argent pour le chauffage, j’ai eu des jours où il faisait 8 degrés dans ma classe. Les élèves doivent venir avec des bonnets et des gants », observe-t-elle.

Un tiers des enseignants partira après 5 ans, je suis dans ma 4ème année d’enseignement et je me sens déjà à bout de souffle.

Infirmières et ambulanciers dans la rue lundi prochain

L’enseignante précise qu’elle et ses collègues sont parfois d’y aller de leurs poches pour acheter les fournitures scolaires aux élèves. « Nous devons acheter des crayons, du papier, des gommes… parce que l’école n’en a pas les moyens. Nous comptons aussi sur la générosité des parents ». Et pourtant, les conditions de vie des enseignants sont loin d’être enviables. « Nous sommes en découvert tous les mois, certains d’entre nous doivent aller dans des banques alimentaires. Si on devait fait grève comme les Français, on aurait déjà fait beaucoup plus ».

Selon le gouvernement, la manifestation de ce mercredi 1er février a mobilisé jusqu’à 500.000 travailleurs dans le pays. Elle est présentée comme le plus important jour d’action de revendications depuis une décennie. Le mécontentement ne concerne pas seulement les enseignants. La semaine prochaine, ce sont les travailleurs des services de santé (NHS, infirmières, ambulanciers, etc.) qui se croiseront les bras durant quatre jours d’action revendicative dès lundi. Ils desncendront aussi dans la rue.

Alexander SEALE (à Londres)