CONFLIT SOCIAL CHEZ DELHAIZE

Conflit social : le dialogue de sourds se poursuit chez Delhaize

La photo d'illustration montre un camion Delhaize au siège de la chaîne de supermarchés Delhaize, à Zellik, Asse, le jeudi 16 mars 2023. BELGA

Le conseil d’entreprise extraordinaire de ce mardi 21 mars a également tourné court, à l’instar du précédent de la semaine dernière. Les syndicats maintiennent leur revendication principale qui est celle du retrait du projet de franchisation des 128 magasins intégrés. La direction estime que c’est la seule option pour renouer avec la rentabilité des magasins. Elle dit avoir reçu une centaine de questions et en attend d’autres, elle espère avoir l’occasion d’y répondre lors du prochain CE extraordinaire du 28 mars. En attendant, Delhaize assure avoir reçu près de 200 manifestations d’intérêt pour la reprise des magasins à franchiser et dit avoir commencé à faire le tri. Du côté syndical, la mobilisation se renforce. Tous les magasins Delhaize à Bruxelles et en Wallonie sont fermés et l’action s’étend en Flandre ainsi qu’aux magasins déjà franchisés (AD Delhaize). Les syndicats ont un plan d’action qu’ils vont dérouler et sont déterminés à aller au finish.

Le conflit social perdure chez Delhaize et visiblement pas de fumée blanche à l’horizon. Le conseil d’entreprise (CE) extraordinaire organisé ce mardi 21 mars au matin a également tourné court tout comme la précédente réunion de l’organe du 14 mars. « La direction n’entend pas changer son fusil d’épaule et continue à privilégier son projet de franchisation des 128 magasins intégrés de Belgique. Elle nous impose une décision d’une telle violence qu’on n’a pas d’autres choix que de s’opposer comme on le fait. Nous avons un plan d’actions et les travailleurs sont prêts. Nous voulons que le groupe revienne sur son projet », nous a confié Elisabeth Lovecchio, permanente CNE Commerce dans le Hainaut.

Delhaize est bénéficiaire et veut juste concrétiser son projet de franchisation des magasins intégrés pour une question de rentabilité, c’est inacceptable

Syndicalistes traités comme des terroristes

Mardi, elle était sur un piquet de grève pour bloquer un AD Delhaize, un franchisé, « pour montrer  la direction qu’on peut être partout. Aujourd’hui, pratiquement tous les magasins Delhaize à Bruxelles et en Wallonie sont fermés. Le groupe nous traite comme des terroristes et vient avec des molosses aux réunions, alors qu’on veut juste discuter et négocier. Mais on s’oppose au projet de franchisation des 128 magasins. Delhaize est bénéficiaire et veut juste concrétiser son projet pour une question de rentabilité, c’est inacceptable », poursuit-elle.

La responsable syndicale rappelle que contrairement à ce qui est véhiculé, le mouvement de contestation gagne aussi la Flandre. Même son de cloche du côté du Setca. « Delhaize confirme que ce plan est la seule option. Franchise confirmée des 128 magasins. On continue le combat », a résumé Myriam Delmée, présidente du Setca.

Du côté de la direction, le discours est tout autre. « Nous allons continuer les réunions d’information et de consultation. Nous attendons des questions supplémentaires dans le cadre de ces réunions. Nous en avons déjà reçu une centaine. Nous espérons rencontrer les partenaires sociaux pour poursuivre les échanges. Nous sommes convaincus que la franchisation est la seule option pour renouer avec la rentabilité des magasins et assurer la pérennité des emplois. Nous avons reçu près de 200 demandes d’intérêt de la part de repreneurs potentiels pour les 128 magasins et nous sommes en train de faire le tri. Il y a des directeurs en interne candidats et des externes », nous a déclaré Roel Dekelver, directeur de la communication chez Delhaize. Il soutient que 72 magasins sont fermés et que 56 sont encore ouverts en Flandre. Mais le risque d’un blocage intégral est élevé…

Nous sommes convaincus que la franchisation est la seule option pour renouer avec la rentabilité des magasins et assurer la pérennité des emplois.

Harmoniser les conditions dans les commissions paritaires

Une nouvelle réunion du CE extraordinaire est prévue le 28 mars, mais difficile de dire si elle se tiendra et durera plus longtemps que les deux précédentes. Aujourd’hui, vu les positions diamétralement opposées de la direction et des syndicats, on ne voit pas comment il pourrait en être autrement. La direction aurait eu recours à des huissiers pour lever les blocages des magasins en région liégeoise (Rocourt, Flémalle, etc.).

La mobilisation des syndicats dépasse aujourd’hui le cas de Delhaize, car le mouvement de franchisation gagne d’autres enseignes. C’est Intermarché qui a ouvert le bal avec l’intégration des 51 magasins Mestdagh que le groupe français a rachetés et qu’il veut franchiser aussi. « Nous nous battons pour une harmonisation des conditions salariales et de travail dans les commissions paritaires pour éviter que les groupes viennent faire leur marché au détriment des travailleurs. Les responsables politiques commencent à se réveiller, mais ce n’est pas de bonnes intentions dont nous avons besoin, mais d’actes », dit Elisabeth Lovecchio, la permanente CNE Commerce dans le Hainaut. Les syndicats reçoivent des motions de soutien de la part de collègues d’autres secteurs (Audi, Safran Aero Boosters, etc.).