Le pape François à Marseille : première visite papale depuis Clément VII


Au cœur de l’été, en août dernier, il était à Lisbonne pour les JMJ (Journées mondiales de la jeunesse). En ce tout début d’automne, grand voyageur, le pape François, 86 ans, est en visite à Marseille, ces 22 et 23 septembre. Aucun pape n’était venu à Marseille depuis Clément VII… en 1533 ! Avec ce séjour, le pape vient clôturer la troisième édition des Rencontres méditerranéennes, lancées en 2020 à Bari (Italie) et regroupant 70 évêques et 70 jeunes, lesquels auront débattu de problématiques communes à l’espace méditerranéen comme le dialogue interreligieux et interculturel, mais aussi et surtout de la question migratoire. Contrairement au séjour du roi Charles III du 20 au 22 septembre, la visite du pape François n’est pas une « visite d’Etat », comme l’a rappelé le Vatican qui ajoute : « François va à Marseille, pas en France »… Le souverain pontife célèbrera une messe en plein air au Stade-Vélodrome de Marseille devant plus de 60 000 fidèles (et / ou curieux ?) à laquelle assistera le Président de la République, Emmanuel Macron.

Pourquoi Marseille ? « Cela aurait pu être à Beyrouth, Rabat ou Barcelone… mais on a choisi Marseille », confie Mgr Jean-Marc Aveline, le cardinal de la cité phocéenne. Qui ajoute : « Marseille attire François. Pour une raison toute simple : cette ville est une périphérie entre Europe et Méditerranée, Orient et Occident et, surtout, c’est une zone de fractures. (…) De toute façon, la ville l’attire ».

Deuxième ville de France avec près de 875 000 habitants, Marseille est une ville multiethnique dont un tiers de la population serait de confession musulmane. Ces jours derniers, comme pour oublier le spectacle pathétique proposé par le football et l’Olympique de Marseille, la population attend François avec enthousiasme et bienveillance. Sur le Vieux-Port, on peut même croiser un Marseillais qui confie : « Je vais aller voir François comme j’irais voir Bruce Springsteen ». Pour ce séjour papal, 5 000 policiers et gendarmes ainsi que 1 000 agents de sécurité privée seront déployés dans la ville.

 Un pape ni francophile, ni francophone à Marseille

Le pape François et la France. En poste au Vatican depuis le 13 mars 2013, François est réputé ni francophile, ni francophone. Bien que sa visite à Marseille soit présentée comme une première, il n’en est rien : le 25 novembre 2014, il avait effectué un aller-retour à Strasbourg et prononcé un discours devant le Parlement européen, puis une allocution au Conseil de l’Europe. Arrivé à Strasbourg à 10 heures, il en était parti à 13 heures 50…

Marseille attire François. Pour une raison toute simple : cette ville est une périphérie entre Europe et Méditerranée, Orient et Occident et, surtout, c’est une zone de fractures.

Les spécialistes du Vatican expliquent que le pape n’a pas d’attache particulière avec la France, si ce n’est un grand intérêt pour le philosophe Blaise Pascal (auquel il a consacré une Lettre apostolique (« Sublimitas et miseria hominis ») et un écrivain catholique oublié, Joseph Malègue (1876-1940), auteur du roman « Augustin ou le maître est là » dans lequel le pontife a relevé l’expression « classes moyennes de la sainteté ».

Politiquement, chef de l’Etat du Vatican, François a repoussé de nombreuses invitations lancées par la Conférence des évêques de France ou par le Président de la République Emmanuel Macron lui-même. Pour une raison toute simple : le pape François tient la France (comme l’Italie et l’Espagne) pour une nation de « vieille chrétienté » et privilégie les « périphéries », « des pays où le catholicisme est souvent très minoritaire, qui pèsent traditionnellement peu dans la diplomatie du Saint-Siège, et qui apparaissent comme des acteurs de second rang dans l’échiquier international », commente un historien des religions.

Le travail de Mgr Jean-Marc Aveline

Le rôle de l’archevêque de Marseille. « Le pape François à Marseille, c’est lui ! » Tous sont, dans la cité phocéenne, unanimes : la venue du Saint-Père est l’œuvre de Mgr Jean-Marc Aveline, 64 ans, prélat de Marseille où il a été successivement évêque auxiliaire (2013- 2019), archevêque (depuis le 8 août 2019) et cardinal depuis le 27 août 2022…

Nombre d’observateurs de la chose catholique signalent que Mgr Aveline serait le « cardinal préféré » du pape et son « homme de confiance en France ». Et que c’est lui, et lui seul, qui a convaincu le souverain pontife pour le voyage à Marseille, lequel a tenu à lui « dire oui, en personne ». Déjà, certains vaticanistes vont même jusqu’à glisser que Mgr Aveline pourrait être appelé, tout prochainement, à de hautes fonctions à la Curie romaine, administration de l’Eglise catholique et du Vatican.

Rencontre avec le Président Macron

La polémique Macron à la messe. Après une cérémonie à l’Arc de Triomphe de Paris, puis un dîner d’Etat dans la Galerie des Glaces au château de Versailles en cette mi-semaine, le Président de la République Emmanuel Macron rencontrera le pape François dans la matinée de ce samedi 23 septembre (après trois rencontres au Vatican en 2018, 2021 et 2022, et de nombreux et fréquents échanges téléphoniques), puis assistera dans l’après-midi à la messe célébrée par le Saint-Père au Stade-Vélodrome de Marseille devant plus de 60 000 fidèles (et / ou curieux ?).

Je n’irai pas en tant que catholique, j’irai comme président de la République. Je n’aurai moi-même pas de pratique religieuse lors de cette messe.

Dès l’annonce de cette information, une polémique a éclaté, surtout dans les rangs de la gauche française, sur le thème : comment un Président de la République, plus haut représentant de la laïcité, peut-il, « es qualités », assister à une messe ? On peut même entendre, dit à mi-voix, qu’Emmanuel Macron se serait invité à cette messe…

Le Président de la République a tenu à préciser : « Je n’irai pas en tant que catholique, j’irai comme président de la République. Je n’aurai moi-même pas de pratique religieuse lors de cette messe ». Les historiens de la chose publique rappellent que des présidents de la République ont déjà assisté à des messes papales, notamment Valéry Giscard d’Estaing lors de la visite de Jean-Paul II en France en 1980…

Serge Bressan (correspondant à Paris)


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