On attendait avec impatience le discours (annoncé depuis plusieurs jours) de Hassan Nasrallah, ce vendredi 3 novembre. La question qui hantait toutes les chancelleries, inquiètes de voir le conflit entre Israël et le Hamas s’étendre et se transformer en nouvelle guerre régionale, était de savoir si l’organisation chiite libanaise allait ou non « entrer dans la guerre ». La réponse qui y a été apportée est typique des ambiguïtés habituelles du Hezbollah, le mouvement mais maintient la pression sur Israël. Son leader, Hassan Nasrallah, a insisté sur le fait que ni son organisation, ni l’Iran n’avaient été mêlés à l’attaque du 7 octobre, mais que « toutes les options étaient ouvertes… ».
Dans un discours d’une heure, prononcé vendredi après-midi 3 novembre et frappé d’une ambiguïté assez typique du Hezbollah, son chef Hassan Nasrallah a menacé Israël et les Etats-Unis, mais sans formellement annoncer que son mouvement allait entrer dans la guerre. En bref, il maintient une ambiguïté stratégique qui oblige l’Etat hébreu à maintenir des moyens importants sur sa frontière nord.
« Nous n’étions pas prévenus et l’Iran n’a rien à voir avec ce qui se passe… »
Il est d’abord revenu sur les attaques terroristes du 7 octobre. Cette offensive a été lancée, a-t-il dit, à « 100% » par les Palestiniens. «Ils l’ont gardée secrète, nous n’avons pas été prévenus. Il n’y avait et il n’y a pas d’autres options que d’attaquer l’État hébreu… L’autre option est le silence, l’attente de plus d’oppression, de plus de morts, de plus de tueries… La décision était sage, courageuse, prudente et digne de tous les sacrifices ».
L’autre option est le silence, l’attente de plus d’oppression, de plus de morts, de plus de tueries.
Dans la foulée, il a totalement dédouané l’Iran de toute responsabilité : l’Iran, affirme Hassan Nasrallah, n’a rien à voir dans la guerre actuelle et n’a pas été impliqué dans sa conception et sa préparation. Mais il félicite « les factions irakiennes et yéménites » de s’être jointes à cette « glorieuse opération » qui a révélé la « faiblesse d’Israël ». Pour rappel, les rebelles chiites Houthis du Yémen et les groupes Irakiens pro iraniens (financés, armés, entrainés et soutenus par Téhéran) ont lancé des attaques de drones ou de missiles contre Israël ou contre les bases américaines en Iraq ou en Syrie.
Obliger Israël à maintenir des forces militaires à la frontière
Quid de la position de son organisation ? « Certains clament que l’on va s’engager dans la guerre, mais nous sommes engagés dans cette bataille depuis le 8 octobre… Ce qu’il se passe sur notre front peut sembler modeste, mais c’est très important. C’est sans précédent depuis 1948 », répond Hassan Nasrallah.
Il a ensuite enchaîné sur le fait que l’action du Hezbollah oblige Israël à immobiliser à sa frontière nord des troupes et des moyens militaires qu’il ne peut donc engager à Gaza, au sud et que l’évacuation de villes et de villages entiers fait peser un poids économique et psychologique insupportable sur Israël.
Quant à la suite des évènements, elle dépendra de l’évolution de la guerre à Gaza et d’éventuelles « agressions » d’Israël et des Etats-Unis contre « le Liban » ou d’autres parties. « Israël commettrait la plus grosse erreur de son histoire s’il menait une opération préventive contre le Liban », dit-il. En conclusion, assène le chef du Hezbollah, « Tous les scénarios sont ouverts sur notre front libanais, je répète, tous les scénarios sont ouverts… Nous sommes prêts à toutes les possibilités. La perspective d’une guerre totale est réaliste ».
Israël commettrait la plus grosse erreur de son histoire s’il menait une opération préventive contre le Liban.
Seul l’Iran profite de la crise
Le discours de Hassan Nasrallah est sans réelle surprise. Aux yeux de nombreux observateurs, l’implication directe de l’Iran dans l’attaque du 7 octobre ne fait aucun doute. Non seulement Téhéran arme, finance et conseille le Hamas depuis des années, mais différents éléments permettent de penser que son bras armé idéologique, le Corps des Gardiens de la Révolution, a joué un rôle essentiel dans la conception et la préparation de l’attaque.
Et c’est même Téhéran qui aurait décidé du moment exact de son déclenchement et qui aurait donné le feu vert au Hamas, lors d’une réunion tenue à Beyrouth, trois jours avant le 7 octobre.
Stratégiquement, seul l’Iran bénéficie de la crise actuelle : elle pouvait lui permettre, au minimum, d’espérer ralentir ou bloquer le processus de rapprochement entre Israël et les pays conservateurs sunnites du Golfe, que Téhéran perçoit comme une menace existentielle. Cet objectif a été partiellement atteint, mais sans doute pas de manière durable. Un deuxième but de cette guerre par procuration était probablement de déclencher un conflit régional. Pour le moment, cet objectif n’a pas été atteint.
Pas d’implication directe de Téhéran
Pour autant, Téhéran ne souhaite pas s’impliquer directement dans la guerre : malgré les rodomontades du régime iranien, celui-ci ne peut espérer résister à une contre-offensive militaire israélienne et serait certainement incapable de faire face à des attaques américaines.
Malgré les rodomontades du régime iranien, celui-ci ne peut espérer résister à une contre-offensive militaire israélienne et serait certainement incapable de faire face à des attaques américaines.
Par ailleurs, et ainsi qu’on l’a vu, il y a quarante ans au Liban et plus récemment en Irak, Téhéran répugne à s’engager dans des actions offensives directes et privilégie toujours une action indirecte via des organisations « proxys ». C’est ce qui a été fait, dans le conflit actuel en actionnant des milices pro-iraniennes, irakiennes et syriennes (pour attaquer des bases américaines) et les Houthis du Yémen qui ont tiré (sans succès) des missiles et lancé des drones vers Israël au-dessus de la Mer rouge.
Protéger le Hezbollah, essentiel au régime des mollahs
Mais engager directement le Hezbollah dans la guerre serait une toute autre histoire. Cette organisation peut certainement faire beaucoup plus de mal à Israël que ne l’a fait le Hamas (elle compte une centaine de milliers de combattants et est puissamment armée), mais elle ne peut penser gagner, d’autant qu’elle s’attirerait une riposte quasi certaine des Etats-Unis qui ont positionné deux groupes de combats navals dans la région et mis en garde toutes les parties tierces qui seraient tentées d’entrer dans la guerre.
Le Hezbollah peut certainement faire beaucoup plus de mal à Israël que ne l’a fait le Hamas, mais elle ne peut penser gagner, d’autant qu’elle s’attirerait une riposte quasi certaine des Etats-Unis.
Or, le Hezbollah est un élément vital de la stratégie régionale iranienne. Il permet à Téhéran d’influencer fortement la politique libanaise, de soutenir le régime syrien de Bachar al-Assad et de maintenir une menace permanente à la frontière nord d’Israël, menace qui, en dernier ressort, pourrait être activée si, dans les années à venir, Jérusalem attaquait l’Iran pour l’empêcher d’acquérir l’arme nucléaire. Une telle attaque préventive est plus qu’une certitude. Il est donc hors de question de gaspiller une ressource aussi précieuse pour aider le Hamas qui, de toute façon, sera écrasé.
C’est ce qui explique que, jusqu’à présent, l’intervention du Hezbollah s’est résumée à une forme de service minimum : quelques tirs de roquettes ou de missiles, des incursions limitées (du niveau d’une patrouille) mais rien de plus. De quoi démontrer que l’organisation soutient le Hamas, mais sans la mettre réellement en danger, la riposte israélienne restant parfaitement proportionnée.
Hugues Krasner
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