Des Républicains anti-Trump dégagent 50 millions de dollars pour contrer l’ancien président

Un groupe de républicains opposés à l’ancien Président américain Donald Trump prévoit de consacrer un budget de 50 millions de dollars pour rassembler et diffuser les témoignages d’anciens partisans. Ces vidéos amateurs révèlent les raisons d’un changement radical de position politique, offrant un aperçu sans filtre de leur expérience. Il s’agit d’une campagne anti-Trump qui donne la parole aux électeurs déçus : « Pour la première fois depuis plus de 50 ans, je ne voterai pas républicain ». Ils sont nombreux à vouloir voter le candidat Démocrate, Joe Biden.
La bannière sous laquelle ils se réunissent est suffisamment explicite: « Republican Voters Against Trump ». Ces électeurs républicains ont placé la lutte anti-Trump au cœur de leur mission. Si le groupe n’en était qu’à ses premiers balbutiements en 2020, il est aujourd’hui un interlocuteur privilégié des journalistes américains, soucieux de comprendre les coulisses des votes pro ou anti Trump.
Désillusions chez les Trumpistes
En 2020, l’organisation avait diffusé un millier de vidéos, toutes basées sur le même principe : donner la parole aux partisans de Trump, déçus par sa politique. En 2024, l’opération coup de poing est de retour avec une première salve de cent témoignages disponibles sur le site web des militants. En trois minutes, les électeurs répondent à une question simple: pourquoi leur vote n’ira pas au camp républicain? Et les réponses sont plurielles.
Pour Dennis, un ancien militaire, la désillusion est survenue lors des multiples discours de Trump à propos de l’armée. « Je ne peux pas croire qu’un commandant en chef puisse dire que ses propres militaires sont des idiots, des perdants. Quiconque agit ainsi ne mérite pas d’être commandant en chef », dit-il.
Beth invoque, quant à elle, l’événement du 6 janvier. Après avoir voté Trump en 2016 et en 2020 depuis la Virginie, elle regrette aujourd’hui son choix. « Je n’hésiterai pas à voter Biden. Car Trump est une sorte de Diable sur un bulletin de vote. Peu importe le nom qui décide de lutter contre le diable, il méritera ma voix ». Beth n’est pas la seule à avoir été choquée par l’assaut du Capitole. Un électeur du Nebraska confie ne plus jamais pouvoir voter Trump après cet incident. « Il est 100% responsable de ce qu’il s’est passé ce jour-là. Je voterai Démocrate. Je ne peux pas croire que ces mots sortent de ma bouche, mais je ne voterai plus jamais pour Donald Trump ».
NEW: Republican Voters Against Trump
We are elevating the voices of former Trump voters who have had enough of Donald Trump and will never vote for him again. pic.twitter.com/agN4DODyB9
— Republican Voters Against Trump (@AccountableGOP) March 12, 2024
Comportements frauduleux
Si une grande majorité des témoins mentionne l’assaut du 6 janvier, certains se montrent plus consternés par les comportements frauduleux du candidat républicain. Dave s’exprime depuis la Pennsylvanie pour pointer les déboires judiciaires de son candidat: « Je suis républicain conservateur, mais je ne supporte pas les mensonges, les tricheries et les activités illégales que Trump perpétue ». Nathan, un jeune électeur de l’Ohio, appelle à la raison: « Vous pouvez rester républicain, mais s’il vous plait, votez Joe Biden ».
Interviewée par le New York Times, la fondatrice du groupe politique, Sarah Longwell, souligne avec force que ces témoins sont bien plus que des électeurs républicains. « Ce sont des électeurs de Trump. Ils ont voté Trump au moins une fois et affirment publiquement qu’ils ne le feront plus jamais ».
Contrairement aux organisations démocrates, le « Republican Voters Against Trump » ne se contente pas de soutenir Biden en faisant la promotion de son bilan. Le travail réalisé est plus minutieux, plus sensible. En donnant la parole aux électeurs déçus, le groupe élargit le spectre et s’adresse à une manne de votants potentiellement plus large. Parmi les 100 vidéos postées sur le site, on trouve des anciens pro-Trump de tous âges, tous Etats, tous parcours, mais ils partagent ce même sentiment d’avoir été trahis par Donald Trump. Certains confient même sentir une certaine gêne lorsqu’ils doivent mentionner leur appartenance politique.

L’assaut du Capitole
Selon Mme Longwell, le témoignage personnel est plus efficace que la publicité traditionnelle qui envahit l’espace public en période de campagne. « Il est très important que les intervenants comprennent qu’on ne construit pas une coalition pro-Joe Biden. Nous construisons une coalition anti-Trump », a-t-elle déclaré.
D’ailleurs, on ne retrouve dans ces vidéos que très peu de politique dure. Les intervenants ne font pas l’éloge de Biden, ils n’évoquent pas les grands sujets de la campagne comme le droit à l’avortement, l’inflation ou l’immigration. L’assaut du Capitole semble avoir été le vrai point de non-retour pour une majorité des intervenants.
Cette nouvelle campagne anti-Trump (dont le coût est évalué à 50 millions de dollars) met en lumière une division profonde au sein du parti républicain. Une division incarnée par Nikki Haley qui n’a pourtant pas convaincu son électorat d’opter pour une voie plus progressiste face à la radicalité de Donald Trump. Après le Super Tuesday, force est de constater que l’électorat républicain est resté largement fidèle à son ancien président.
Catarina Letor (à New York)