Drôle de journée pour les deux « Eric » de la politique française : l’un est exclu, l’autre se sent trahi
C’est le séisme au sein de la droite française depuis qu’Eric Ciotti a fait sauter les ligues en annonçant mardi 11 juin en annonçant qu’il avait répondu favorablement à un accord avec le Rassemblement National. Ce mercredi après-midi 12 juin, il a été exclu du parti Les Républicains (LR) dont il assurait la présidence depuis 2022. Son exclusion a été prononcée à l’unanimité des membres présents au bureau politique. Ce sont la secrétaire générale, Annie Genevard et l’eurodéputé sortant, François-Xavier Bellamy chargés d’assurer l’intérim à la tête du parti jusqu’à l’élection d’un nouveau président de parti. Mais le président exclu fait de la résistance et soutient que la réunion du bureau ne respecte pas les statuts du parti et qu’« aucune des décisions prises n’emporte de conséquence légale. Elle peut avoir des conséquences pénales ». Il assure conserver son mandat de président des LR. Le parti Reconquête, créé par Eric Zemmour a aussi implosé après l’appel de Marion Maréchal-Le Pen aux membres à voter pour les candidats de l’alliance entre le RN et le président démis, Eric Ciotti. Les temps sont durs pour les deux « Eric » de la politique française…
Ce mardi 11 juin, après l’annonce surprise d’Eric Ciotti de nouer une alliance avec le Rassemblement National (RN), un mur s’est construit entre lui et son parti, Les Républicains (LR). Plusieurs membres avaient d’ailleurs démissionné en protestation, et plusieurs ténors du parti de droite avaient appelé à une démission immédiate u député sortant des Alpes-Maritimes. Ce mercredi 12 juin, le parti a pris les devants et a exclu Eric Ciotti du parti en invoquant « une violation de leurs statuts internes ». Dans une conférence de presse devant le siège des LR, la nouvelle présidente par intérim Annie Genevard a déclaré : « Eric Ciotti est en rupture totale avec les statuts et la ligne portés par Les Républicains ». Et de justifier la décision. « Les statuts prévoient que le Président du Parti n’a pas dans ses attributions de prendre une décision personnelle sur une ligne qui n’est pas partagée par son mouvement, qui est contraire à son statut et contraire à sa charte des valeurs ».
Elle a précisé que les LR présenteront bien des candidats face au Rassemblement National lors des élections législatives des 30 juin et 7 juillet prochains, « dans la clarté et l’indépendance ».
Laver l’honneur Sali par Eric Ciotti
Laurent Wauquiez, ténor des LR, possible candidat à la présidentielle de 2027, qui était resté jusqu’alors assez silencieux sur l’affaire, était aujourd’hui au premier plan de la chute d’Eric Ciotti avec qui il est pourtant ami. Il assume la décision de son parti « Notre conviction, c’est que dans une crise qui est aussi lourde et dans une tempête qui s’annonce aussi difficile pour notre pays, quand on fait de la politique, on ne répond pas par des petites embrouilles. On le fait en défendant ses convictions. On peut convaincre, on peut échouer à convaincre, mais on le fait dans la clarté, on le fait avec une colonne vertébrale ».
Les statuts prévoient que le Président du Parti n’a pas dans ses attributions de prendre une décision personnelle sur une ligne qui n’est pas partagée par son mouvement.
Pour Xavier Bertrand , président du Conseil régional des Hauts-de-France, « Les Républicains ont voulu laver leur honneur qui avait été sali par Éric Ciotti hier. Il peut s’opposer autant qu’il veut, maintenant les choses sont claires ».
La riposte d’Eric Ciotti
Eric Ciotti ne s’avoue pas vaincu et a a répliqué, via le réseau social X (ex-Twitter). « La réunion organisée cet après-midi a été mise en œuvre en violation flagrante de nos statuts les Républicains. Aucune des décisions prises à cette réunion n’emporte de conséquence légale. Elle peut avoir des conséquences pénales. Je suis et reste le président de notre formation politique, élu par les adhérents ».
Qui a raison ? Pour l’instant, personne n’a de vue claire sur les répercussions légales que cette exclusion du président des LR pourra avoir, ou si la violation des statuts invoquée par les ténors du parti LR pousser dehors Eric Ciotti tient la route. Mais Les Républicains doivent clarifier urgemment ce point avant que les listes d’investitures soient bouclées d’ici dimanche.
Dans ce mélodrame politique, beaucoup de Républicains s’offusquent de l’attitude d’Eric Ciotti qui s’est barricadé depuis ce matin dans l’immeuble abritant les bureaux du parti. Dans une tentative d’obtenir un regain de légitimité, il a envoyé un mail aux militants Républicains dans lequel il les invite à se manifester sur une plateforme ouverte pour l’occasion afin d’exprimer leur soutien à sa décision d’alliance avec le Rassemblement National. Ce mercredi après-midi, il a annoncé que 10 000 personnes avaient déjà signé la pétition pour « Une union des droites ».
Xavier Bertrand a promis qu’une consultation des adhérents LR aura lieu très prochainement pour définir l’orientation politique du parti.
Cependant, il s’agit là d’un pari risqué pour les Républicains qui pourraient se retrouver divisés de plus belle, avec, d’un côté des adhérents qui suivent Eric Ciotti dans sa volonté d’une alliance avec l’extrême droite, et de l’autres, les ténors du parti qui viennent d’exclure Ciotti à l’unanimité.
Eric Zemmour exclut Marion Maréchal-Le Pen de Reconquête
Mais la crise frappe aussi le parti Reconquête créé par Eric Zemmour. En effet, la vice-présidente exécutive de son parti, Marion Maréchal-Le Pen, députée européenne nouvellement élue a lancé ce mercredi un appel à voter pour les candidats de l’alliance entre le RN et le président démis des LR, Eric Ciotti. Elle a dénoncé une « triple faute » dans le chef d’Eric Zemmour parce que ce dernier souhaite présenter des candidats contre le RN. « Présenter des candidats de Reconquête dans les circonscriptions législatives, c’est prendre le risque infini de faire gagner des députés macronistes ou d’extrême gauche », a défendu la nièce de Marine Le Pen.
Présenter des candidats de Reconquête dans les circonscriptions législatives, c’est prendre le risque infini de faire gagner des députés macronistes ou d’extrême gauche.
Eric Zemmour a réagi par une longue explication sur X. « (…). Je suis écœuré et blessé, comme tous les militants, les sympathisants et les électeurs, par la trahison de Marion Maréchal à qui nous avons tous fait confiance, à qui nous avons tout donné : la tête de liste aux Européennes, les sacrifices des militants, les moyens de Reconquête. A peine 48 heures après avoir été élue par 1,3 million d’électeurs Reconquête, elle a choisi de vendre notre parti, d’estimer qu’il n’était plus légitime à porter ses idées, de nous attaquer par la calomnie », écrit Eric Zemmour.
Et de préciser : « Comme les électeurs, les sympathisants et les militants de Reconquête, j’étais, je suis et je serai toujours pour le rassemblement. J’affirme que Reconquête et moi-même sommes prêts à retirer des candidats en cas d’accord avec le RN, Les LR et tous les autres partis de bonne volonté souhaitant la défaite d’Emmanuel Macron et des islamo-gauchistes ». Pour lui, Marion Maréchal-Le Pen s’est exclue elle-même de Reconquête.Il a accusé Marion Maréchal-Le Pen de « mentir » et d’être « entourée par des professionnels de la trahison ». Il vise Guillaume Peltier, Nicolas Bay, vice-présidents de Reconquête et Laurence Trochu. Les trois personnalités politiques ont été élues, dimanche, avec Marion Maréchal-Le Pen, eurodéputées Reconquête. Elles vont désormais poursuivre leur carrière politique en dehors de Reconquête.
L. J.