Second tour des législatives en France : grosse désillusion pour le Rassemblement national
La France a voté. Largement, en masse avec une participation record depuis quarante ans de 67,5% des inscrits qui sont allés voter ce dimanche 7 juillet pour le deuxième tour des élections législatives qui avaient été convoquées par le Président de la République Emmanuel Macron après la déroute de son camp et la victoire du Rassemblement National (RN, extrême-droite) lors des élections européennes et la dissolution de l’Assemblée nationale le 9 juin dernier. Dès le début de la soirée, les instituts de sondages annonçaient ce qui prenait l’allure d’une grande surprise : alors qu’il faisait figure de grandissime favori après son arrivée en tête au premier tour, le Rassemblement national est pointé en troisième position derrière le Nouveau Front Populaire (NFP, coalition de la gauche et la gauche radicale) et Ensemble pour la République (majorité présidentielle). En avançant dans la soirée, ces mêmes instituts affinaient leurs estimations, en attendant dans la nuit les résultats officiels communiqués par le ministère de l’Intérieur : environ 190 sièges pour le NFP, entre 164 et 169 pour Ensemble pour la République, 135 à 143 pour le RN et 63 pour le parti Les Républicains (LR, droite).
Durant la semaine de l’entre-deux tours, nombreux étaient ceux qui annonçaient la victoire du RN, allant jusqu’à prévoir une majorité absolue (au moins 289 sièges) à l’Assemblée nationale. Le président du RN, Jordan Bardella, disait et répétait à chaque intervention : « Moi, Premier ministre… », se voyant déjà résidant de l’Hôtel de Matignon. Deux éléments peuvent expliquer la contre-performance de l’extrême-droite (et de son allié LR Eric Ciotti) : d’abord, la mauvaise campagne de Jordan Bardella qui a souvent brillé par son arrogance ; ensuite, la reconstitution d’un front républicain entre la majorité présidentielle et la gauche. « La participation massive à cette élection s’est traduite par un front républicain qui s’est revivifié », a commenté le politologue Jérôme Fourquet.
Visage fermé, Jordan Bardella a noté que « le RN (qui comptait 89 députés dans la précédente Assemblée, ndlr) réalise la percée la plus importante de son histoire. Malheureusement, nous avons subi l’alliance du déshonneur d’Emmanuel Macron et Gabriel Attal avec l’extrême-gauche ».
Quelles alternatives pour Emmanuel Macron ?
Avec cette nouvelle Assemblée nationale, comment gouverner la France ? « C’est au sein du Nouveau Front Populaire qu’il faut nommer le prochain Premier ministre », indique François Hollande, ancien Président de la République (2012-2017) et élu député de la Corrèze ce 7 juillet. Toutefois, le politologue Jérôme Jaffré est catégorique : « Il y aura une instabilité politique en France, un problème de gouvernabilité. On peut même poser la question : Emmanuel Macron pourra-t-il nommer un Premier ministre ? »
Réponse de Jean-Luc Mélenchon, « lider maximo » de La France Insoumise (LFI, gauche radicale) : « La volonté du peuple doit être strictement respectée. Le Président de la République a le devoir, le pouvoir d’appeler le NFP à gouverner ». Et d’ajouter : « Le NFP est prêt à gouverner. Une fois de plus, la gauche a sauvé la République ».
Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, réélu député à Tourcoing (Nord), envisage les jours et semaines à venir : « Il faut peut-être que la majorité présidentielle s’ouvre à la droite républicaine ».
De son côté, Jérôme Fourquet rappelle que « l’Elysée et Matignon ont exclu de travailler avec les extrêmes, la LFI et le RN ».
Démission du Premier ministre sortant Gabriel Attal
Le Premier Ministre Gabriel Attal, réélu député à Vanves (Hauts-de-Seine) a annoncé que, ce lundi 8 juillet, au Président de la République, il présentera la démission de son gouvernement mais qu’il « assumera [ses] fonctions aussi longtemps que le devoir l’exigera ».
Emmanuel Macron, de son côté, a fait savoir qu’il ne fera aucune déclaration dans l’immédiat et qu’il attendra la « structuration » de la nouvelle Assemblée pour « prendre les décisions nécessaires ».
Ce mardi en soirée, il pourrait assister à la demi-finale de l’Euro de football qui, à Berlin, opposera la France à l’Espagne avant de s’envoler le lendemain pour le sommet de l’OTAN à Washington…
Serge Bressan (correspondant à Paris)