LES JO PRENNENT LE PAS SUR LA POLITIQUE

France : en attendant le futur Premier ministre, les JO imposent une trêve olympique et politique

Le président français Emmanuel Macron pose avec des athlètes français lors d'une visite au village olympique, à Saint-Denis, au nord de Paris, le 22 juillet 2024, avant la cérémonie d'ouverture des Jeux olympiques et paralym-piques de Paris 2024. AFP

Trois mots martelés encore et encore. « Nous sommes prêts ». Après un voyage express le 18 juillet dernier à Woodstock, petite ville à l’est de Londres et lieu de naissance de Winston Churchill (1874-1965) pour le quatrième sommet de la Communauté politique européenne, Emmanuel Macron s’est offert ce 22 juillet une journée à L’Île-Saint-Denis, dans l’immédiate banlieue nord-parisienne. Le Président de la République a fait le tour du « propriétaire » du Village Olympique, à quatre jours de l’ouverture des Jeux olympiques et paralympiques de Paris (26 juillet-11 août puis 28 août-8 septembre). Durant l’évènement, le Président de la République, Emmanuel Macron, a appelé à une trêve et n’entendrait pas nommer de sitôt le futur Premier ministre. En attendant, la gauche démontre son incapacité à s’entendre et la Droite républicaine se tâte.

« Nous sommes prêts », dit encore Emmanuel Macron aux élus, aux forces de l’ordre, aux pompiers et aux bénévoles présents au Village Olympique, évitant toute allusion à la situation politique que connaît la France depuis la dissolution de l’Assemblée nationale qu’il a décidée dans la foulée des élections européennes (9 juin) et les législatives (30 juin et 7 juillet).

Pas une allusion non plus au spectacle sans grande tenue offert ces jours derniers à l’Assemblée nationale qui a renouvelé le mandat de présidente à Yann Braun-Pivet, ou encore l’incapacité des forces de gauche (Nouveau Front Populaire/NFP) de se mettre d’accord sur un nom à proposer pour le poste de Premier ministre, ou encore le repli autant défensif que flou du Rassemblement National (RN) de Marine Le Pen, premier parti en nombre (avec 126 députés ou143 avec les élus alliés LR-Ciotti) mais avec aucun poste à responsabilité à l’Assemblée nationale.

Quand le Président Macron n’est pas d’humeur

Dans les couloirs élyséens, on note que le Président de la République est, ces temps-ci, d’humeur amère. Pour preuve, le commentaire qu’il aurait fait à certains ministres : « Il faut arrêter de suite ce pitoyable spectacle »… Le 17 juillet, Emmanuel Macron avait finalement accepté la démission du Premier ministre, Gabriel Attal et de son gouvernement, tout en lui demandant immédiatement d’« assurer les affaires courantes », mais en ne précisant aucune date de terme à cette mission. Il l’a aussi chargé de monter une coalition entre le centre-droit (Ensemble pour la République, le MoDem et Horizons), la Droite Républicaine (DR, ex-Les Républicains) et des socialistes, communistes et écologistes « Macron-compatibles », qui pourrait « les rassembler autour d’un bloc sur la sécurité, l’autorité et la justice, un autre sur le pouvoir d’achat et un troisième consacré à la lutte contre les inégalités de destin », glisse un visiteur régulier de l’Elysée.

Refusant une cohabitation avec le RN (extrême-droite) de Marine Le Pen et Jordan Bardella, il veut prendre de vitesse et à contrepied la gauche estampillée NFP sous l’emprise de Jean-Luc Mélenchon, le « sous-commandant Marcos de la Canebière » comme le surnomme le sénateur centriste Claude Malhuret.

Pacte de non-agression entre la DR et la macronie

Toutefois, Emmanuel Macron reste vigilant sur l’attitude trouble de Laurent Wauquiez et Bruno Retailleau, respectivement président du nouveau groupe DR à l’Assemblée nationale et au Sénat : ce 21 juillet, ils ont présenté devant la presse un « pacte législatif », qui est plus un pacte de non-agression de l’action du gouvernement qu’un accord de présence à la tête de ministères. Toutefois, dans les rangs de la DR, certains seraient prêts à travailler avec la « macronie » (du moins, avec ce qu’il en reste), parmi lesquels Xavier Bertrand, président de la région Hauts-de-France qui, ces derniers jours, a multiplié les signes de disponibilité immédiate pour succéder à Gabriel Attal à l’hôtel de Matignon.

Même si grand nombre des Français ne comprennent pas la situation actuelle, un proche de l’Elysée est catégorique : Emmanuel Macron n’entend pas nommer de Premier ministre avant la fin des Jeux olympiques et paralympiques, peut-être même encore plus tard. Dans l’immédiat, alors que l’Assemblée nationale est en vacances jusqu’au 2 août avec une session extraordinaire, le Président de la République appelle à une « trêve olympique et politique ».

S’il a promis de se baigner dans la Seine (mais sans caméras), d’« être discret pendant les Jeux » et de « ne pas en faire un événement politique », il n’en oublie pas moins deux grands rendez-vous : le 20 septembre, l’envoi à Bruxelles d’un programme de redressement budgétaire, et le 1er octobre, le dépôt d’un projet de loi de finances pour adopter (ou non) le budget 2025. D’ici là, comme le souhaite Emmanuel Macron et contrairement à la composition de l’Assemblée nationale sortie des urnes le 7 juillet dernier, la situation aura-t-elle été clarifiée ? En attendant, vive le sport !

Serge Bressan (correspondant à Paris)