Société

France : après la trêve olympique, l’activité politique reprend ses droits

Le président français Emmanuel Macron (au centre) prononce un discours lors d'une réunion avec les représentants des parties prenantes qui ont contribué à l'organisation et à l'accueil des Jeux olympiques de Paris 2024, au palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 12 août 2024. AFP

Quand, autour de minuit ce 11 août 2024, sur la scène-monde du Stade de France, le drapeau olympique passa des mains de la Maire de Paris, Anne Hidalgo, à celles de Karen Bass, son homologue de Los Angeles, le Président de la République, Emmanuel Macron, a dû l’admettre : la parenthèse enchantée s’est refermée. La France a organisé les 33ème Jeux olympiques d’été, le monde a applaudi. Il y avait de la concorde nationale dans l’air… Mais le Président de la République poursuit sa quête du futur Premier ministre ou de la future Première ministre et semble prendre son temps. Il laisse les observateurs de la vie politique française se perdre en conjectures et cela encore durer plusieurs semaines. En attendant, des noms circulent pour occuper Matignon…

La cérémonie de clôture des JO de Paris 2024 à peine bouclée, la politique reprenait le devant de la scène. Depuis la dissolution de l’Assemblée nationale décidée par Emmanuel Macron et les législatives perdues par le camp présidentiel mais pas gagné par les oppositions de gauche et d’extrême-droite, la France est dirigée par un gouvernement mené par Gabriel Attal et démissionnaire en charge des « affaires courantes ».

Quand on a des objectifs communs, quand on travaille ensemble, rien n’est insurmontable.

Dans un entretien à « L’Equipe » ce 12 août 2024, interrogé sur cette dissolution juste avant les Jeux olympiques, Emmanuel Macron : « Oui, et alors ? Beaucoup de gens disaient : c’est terrible, ça va gâcher les Jeux. Cela les a-t-il gâchés ? Non ». Et d’affirmer que cela a créé « un esprit de responsabilité, un sursaut. Parce qu’il y a une continuité de l’Etat, dont je suis le garant. Il ne faut pas écouter les Cassandre. Tous ceux qui vous disent que les clivages sont plus importants… Quand on a des objectifs communs, quand on travaille ensemble, rien n’est insurmontable ».

A la recherche d’une majorité pour gouverner

Certes mais au lendemain des législatives, il a fait savoir qu’il ne voulait gouverner ni avec l’extrême-droite/le Rassemblement National (RN) de Marine Le Pen et de Jordan Bardella, ni avec la gauche radicale-La France Insoumise (LFI) de Jean-Luc Mélenchon, parti le plus important du Nouveau Front Populaire qui compte également le Parti socialiste (PS), le Parti communiste (PCF) et les écologistes.

A ce jour, le Premier ministre démissionnaire n’a toujours pas réussi à mettre en place la coalition souhaitée par le Président de la République.

Il a chargé Gabriel Attal, nouveau président à l’Assemblée Nationale du groupe Renaissance, le parti présidentiel, de constituer une alliance dans l’« arc républicain », de Droite Républicaine (ex-Les Républicains) aux écologistes. A ce jour, le Premier ministre démissionnaire n’a toujours pas réussi à mettre en place la coalition souhaitée par le Président de la République qui, en maître autoproclamé des horloges, a annoncé que, respectant la « trêve olympique et politique », il ne prendrait pas de décision au plus tôt dans les jours qui suivent le 15 août…

AFP

L’ancien ministre du Travail de Nicolas Sarkozy, le nom de Xavier Bertrand est cité comme futur Premier ministre mais il a la réputation d’être girouette et de se placer dans le sens du vent. (Photo by Philippe HUGUEN / AFP).

La candidate du NFP bloquée par Macron

Depuis quelques semaines, le NFP, avec le bataillon le plus nombreux de députés à l’Assemblée nationale, a enfin, après de longues négociations entre ses quatre membres, trouvé sa représentante : Lucie Castets, 37 ans et haute fonctionnaire à la Mairie de Paris, et veut l’imposer pour le poste de Premier ministre au Président de la République. Lequel contre-attaque : « Un nom ne fait pas la fonction ».

Après avoir éliminé la solution d’un gouvernement technique avec des ministres spécialistes de leur domaine et non encartés dans un parti, Emmanuel Macron laisse, avec gourmandise, filtrer des noms de « possibles ».

Après avoir éliminé la solution d’un gouvernement technique avec des ministres spécialistes de leur domaine et non encartés dans un parti, Emmanuel Macron laisse, avec gourmandise, filtrer des noms de « possibles ». Celui qui fait le « buzz » ces dernières semaines : Xavier Bertrand, 59 ans, membre de la Droite Républicaine, ancien ministre de Jacques Chirac et de Nicolas Sarkozy et présentement président de la région Hauts-de-France.

Deux problèmes : Xavier Bertrand a la réputation d’être girouette et de se placer dans le sens du vent, et avec Emmanuel Macron, ils entretiennent une énorme détestation l’un pour l’autre. Enfin, Xavier Bertrand lorgne la présidentielle de 2027, tout comme le chef de la DR, Laurent Wauquiez. Des observateurs de la chose publique voient là une « entente cordiale » entre Emmanuel Macron et Laurent Wauquiez pour faire exploser Bertrand…

Un ancien Premier ministre de François Hollande en piste ?

Un autre nom alimente les conversations et dîners en ville parisiens : Bernard Cazeneuve, 61 ans, ancien ministre de l’Intérieur puis Premier ministre de François Hollande. Homme de gauche réputé modéré, il est très peu apprécié par la gauche menée par le « sous-commandant Marcos de la Canebière », surnom de Jean-Luc Mélenchon. Avec ses proches, ce dernier a déjà fait savoir qu’à peine nommé, un gouvernement Cazeneuve serait confronté à une motion de censure à l’Assemblée nationale et tomberait aussitôt…

Même si la situation à l’Assemblée nationale ne lui est pas favorable avec un bloc de députés deuxième en nombre, il a confié à quelques proches qu’il prendra son temps pour la nomination d’un Premier ministre.

Un journaliste politique chevronné aime rappeler qu’Emmanuel Macron prend plaisir à mener les politiques et les observateurs sur de fausses pistes. Et que, même si la situation à l’Assemblée nationale ne lui est pas favorable avec un bloc de députés deuxième en nombre, il a confié à quelques proches qu’il prendra son temps pour la nomination d’un Premier (ou d’une Première) ministre et de son gouvernement. Et qu’il peut poursuivre sa quête jusqu’au début octobre, date à laquelle débutera la session d’automne de l’Assemblée nationale avec le vote du budget. Dans l’entretien à « L’Equipe », Emmanuel Macron a dit, une nouvelle fois : « Je suis optimiste ». Il ne parlait pas seulement des Jeux olympiques et paralympiques…

Serge Bressan (correspondant à Paris)