Les Engagés : l’irrésistible ascension de « Pac-man » Prévot
Le président des Engagés, Maxime Prévot, a développé une startégie qui a assuré la renaissance de l'ex-cdH. bePress Photo Agency / BOURGUET Si l’on devait élire la révélation politique de l’année, Maxime Prévot figurerait certainement parmi les nominés. Non pas parce qu’il est un néophyte en politique – il ne l’est pas -, mais parce que le président des Engagés a accompli, avec son nouveau mouvement participatif, une remontada qui relève de l’exploit ou, selon les croyances, du miracle politique. Pour le bourgmestre de Namur, il faudra confirmer la victoire des élections régionales et fédérales du 9 juin 2024 dans les urnes lors des communales de ce dimanche 13 octobre 2024. Et pour Maxime Prévot, les planètes semblent plutôt bien… engagées.
Maxime Prévot, c’est un peu le Pac-man de la politique wallonne. Il ne cesse de grignoter des voix dans tous les autres partis. Rendons à César ce qui est à César : l’expression, inspirée par le vieux jeu vidéo des années 80, est de Martin Buxant, le journaliste politique vedette de RTL-TVI et de Bel RTL. Mais elle reflète bien – le bruit en moins – l’incroyable progression des Engagés dans les sondages et dans les urnes depuis plusieurs mois.
De l’avis de décès à la remontada
Quand Maxime Prévot utilise le mot « remontada » le soir du 9 juin 2024 au soir des élections régionales et fédérales pour remercier les militants et les candidats des Engagés, il sait de quoi il parle. En 2019, lors de son accession à la présidence de l’ex-cdH, il découvre un champ de ruines. Plus personne ou presque ne croit en l’avenir de ce parti, dont de nombreux observateurs annoncaient la mort prochaine. La première crise que doit affronter le président des Démocrates humanistes, au lendemain de son élection, est interne, avec le retrait de plusieurs parlementaires et élus, comme Véronique Salvi ou Isabelle Poncelet. Catherine Fonck prendra la même décision quelques années plus tard.
La première crise que doit affronter le président des Démocrates humanistes, au lendemain de son élection, est interne, avec le retrait de plusieurs parlementaires et élus.
Maxime Prévot, lui, se demande comment sauver le navire du naufrage. Un capitaine ne doit jamais abandonner son navire, mais face à la chute de son parti dans les sondages et dans les urnes, ainsi qu’à la situation dramatique des finances des villes wallonnes – dont Namur, bien que loin d’être la plus mal gérée, n’est pas épargnée -, il s’interroge sur son avenir en politique. Face à cette descente aux enfers, le bourgmestre de la capitale de la Wallonie prend deux décisions capitales, risquées et courageuses, qui vont changer le destin de son parti et la vie politique francophone.
Stratégie et marketing politiques
A l’issue des élections législatives de 2019, catastrophiques pour l’ex-cdH, il choisit de rejoindre l’opposition, malgré les appels répétés du PS et d’Ecolo. Et puis, n’ayant plus rien à perdre, Maxime Prévot opte pour une « refondation » totale de son parti. Pas un simple lifting de façade, mais une prise de risque maximale, loin du bruit quotidien de la politique.
Il met à profit sa cure d’opposition pour lancer des ateliers, des réflexions, des appels à de nouveaux candidats et, surtout, change de concept. Le parti devient un mouvement horizontal, même si, en fin de compte, c’est Maxime Prévot qui décide de tout. Plus important encore, il s’entoure de véritables professionnels de la stratégie, qui vont pousser l’analyse assez loin. Le nom et les couleurs ne sont que la façade, mais en profondeur, les Engagés ont effectué un travail gigantesque qui leur permet de trouver de nouvelles cibles – les femmes, par exemple -, un positionnement plus au centre-droit et de nouvelles thématiques.
C’est du marketing et de la stratégie politique appliquée. Les autres partis, qui se voient dépassés, rattrapés ou menacés par les Engagés, devraient y réfléchir…
bePress Photo Agency / BOURGUET L’année 2024 semble être celle du retour en grâce des Engagés. Les résultats des communales de ce dimanche 13 octobre donneront les indications finales. (Photo Philippe BOURGUET / bePress Photo Agency/bppa).
Le mariage raté avec Défi
On pense notamment à Défi, qui avait été approché pour fonder un cartel centriste complémentaire, avec une jambe en Wallonie (Les Engagés) et l’autre à Bruxelles (Défi). Une information révélée à l’époque par votre serviteur, qui avait provoqué pas mal de remous chez Défi. D’ailleurs, des dissensions internes à Défi avaient très vite fait capoter le projet, ce que doivent amèrement regretter aujourd’hui les héritiers du parti d’Olivier Maingain.
A Bruxelles comme en Wallonie, les Engagés vont travailler prioritairement avec le MR. Mais attention à Pac-man Prévot.
La suite est connue : l’arrivée de visages connus et de professionnels de la société civile sur les listes des Engagés, une campagne électorale sans faute, une présence massive sur les réseaux sociaux et dans les médias populaires, un positionnement au centre qui a permis aux Engagés de siphonner les électeurs écologistes, et même de séduire des sympathisants socialistes, déçus par l’évolution d’un PS trop aligné sur les thématiques de la gauche radicale et du PTB.
En position de force pour arriver en tête ?
Aujourd’hui, Pac-man Prévot semble en position de force avant les élections communales. Sa victoire à Namur paraît incontestable, mais les derniers sondages montrent que l’irrésistible ascension des Engagés n’est pas terminée, puisqu’ils figuraient même devant le PS lors du dernier Grand baromètre de RTL-TVI. De plus, le parti centriste a toujours bénéficié d’une bonne implantation locale, notamment dans les provinces du Luxembourg et de Namur, mais aussi dans certaines villes moyennes et communes rurales des provinces de Liège, du Hainaut et du Brabant wallon.
Aujourd’hui, Pac-man Prévot semble en position de force avant les élections communales.
A Bruxelles comme en Wallonie, les Engagés vont travailler prioritairement avec le MR. Mais attention à Pac-man Prévot. Il a encore rappelé, dans une vidéo qui a provoqué quelques tensions chez certains Libéraux, que les Engagés étaient un parti différent du MR et que le style de Prévot n’avait rien à voir avec celui de son homologue du MR, Georges-Louis Bouchez. D’ailleurs, tandis que le PS et le MR se déchirent dans les médias et sur les réseaux sociaux, Maxime Prévot joue la force tranquille, celle que même le Palais Royal lui a reconnue en le rappelant à la rescousse au mois d’août 2024, quand le formateur Bart De Wever était en difficulté.
Pac-man Prévot ne le dira jamais, mais il rêve secrètement de grignoter encore quelques voix ce 13 octobre pour installer son parti tout près du sommet de la vie politique wallonne. Réponse dimanche soir…
Demetrio Scagliola
