Début octobre 2024 a eu lieu la conférence du Parti conservateur à Birmingham, dans le nord de l’Angleterre, une semaine après celle des Travaillistes. Si les Travaillistes étaient encore à la fête, même si la lune de miel semble être terminée pour le parti de gauche, la droite, elle, se remet difficilement de la défaite historique qu’elle a essuyée le 4 juillet 2024 après 14 ans au pouvoir. Les Britanniques avaient en effet sévèrement sanctionné les conservateurs après les mandats successifs désastreux des cinq derniers premiers ministres. Entre les frasques de Boris Johnson, la destruction de l’économie en quelques semaines par Liz Truss, et l’incapacité de Rishi Sunak à insuffler un vent de renouveau, le Parti conservateur a eu de quoi réfléchir lors de cette nouvelle conférence. A l’issue du premier tour, ce sont deux anciens ministres, avec des positions très à droite qui sortent finalistes : Kemi Badenoch et Robert Jenrick. Découvrez leurs discours et position notamment sur des questions sensibles : l’immigration et le congé de maternité.
Après sa défaite en juillet dernier, l’ancien Premier ministre britannique, Rishi Sunak, a rendu sa démission à la tête du Parti conservateur, en même temps que son départ du 10 Downing Street. Et donc depuis juillet, les candidats à son remplacement s’affrontent en interne.
Je vous conseille vivement d’arrêter les luttes internes si nous voulons nous reconstruire en tant que parti.
Alors que, d’habitude, les conférences sont orchestrées par le chef du parti, Rishi Sunak, lui, a fait ses adieux en petit comité et s’est éclipsé avant même la fin de la conférence. Il a tout de même mis en garde les supporters du Parti conservateur. « C’est la dernière fois que je m’adresse à vous en tant que leader du parti. […] Je vous conseille vivement d’arrêter les luttes internes si nous voulons nous reconstruire en tant que parti », a-t-il prévenu.
D’autres figures du parti ont rapidement pris la place, notamment Liz Truss, qui a fait son come-back et en a profité pour tacler Rishi Sunak. « Je suis persuadée que si j’étais restée à la tête du parti, nous n’aurions pas perdu comme nous l’avons fait sous Rishi Sunak », a dégainé l’éphémère Première ministre (6 septembre-25 octobre 2022).
Regagner la confiance des Britanniques
D’autres ténors, comme l’ancien ministre de l’Economie, Jeremy Hunt, se montrent plus humbles. « Alors que la lune de miel entre le pays et les Travaillistes commence déjà à s’achever, le public ne reviendra pas forcément vers nous. C’est pourquoi nous devons faire preuve d’humilité, comprendre que nous avons perdu la confiance du peuple britannique et que nous devons la regagner », a-t-il enchaîné.
Il fait ici référence à un autre danger qui menace la pérennité du parti conservateur : l’extrême droite, avec Reform UK, le nouveau parti de Nigel Farage, l’architecte du Brexit. C’est donc pour faire face à cette nouvelle menace que les Conservateurs ont fortement durci la ligne du parti, notamment en matière régalienne. Ce durcissement s’est ressenti lors des différents discours des quatre candidats restants à la tête du parti.
Pas de sang neuf à la présidence du parti
Tout d’abord, il faut comprendre le système d’élection chez les Conservateurs, car deux forces distinctes ont leur mot à dire lors de la sélection du leader. En effet, une présélection des candidats s’effectue progressivement par le vote des parlementaires conservateurs, qui réduisent la liste à deux candidats. Ces deux finalistes seront ensuite départagés par les membres encartés du parti.
Nous devons faire preuve d’humilité, comprendre que nous avons perdu la confiance du peuple britannique et que nous devons la regagner.
C’est donc un travail d’équilibriste qui attend les quatre candidats restants, qui doivent d’un côté plaire aux députés conservateurs, tout en séduisant aussi les membres du parti, dont les priorités et les attentes sont différentes.
Les quatre candidats sont tous d’anciens ministres ayant servi sous plusieurs Premiers ministres successifs, donc pas de sang neuf pour cette élection. Ils peuvent tous jouer la carte de l’ancienneté. Ce qui les différencie, cependant, c’est leur positionnement sur l’échiquier politique.
Tom Tugendhat, ancien ministre de la Sécurité et ancien militaire, a axé son discours sur les questions régaliennes et sur la réduction des taxes. Il est considéré comme étant du centre-droit, notamment sur les questions sociales. Bien qu’il soit considéré comme l’outsider de la course à la tête du parti, il tente d’insuffler un peu d’espoir en mettant en avant son expérience militaire. « Quand j’étais combattant, et que c’était dur et difficile, nous continuions de nous battre, même quand nous étions à terre et que nous pensions que tout était terminé », a-t-il martelé.
Mais difficile de savoir si ces mots d’encouragement réussiront à convaincre les parlementaires de voter pour lui, d’autant qu’ils lui reprochent de manquer de leadership. S’il devait arriver dans le duo final, il semble tout de même peu probable qu’il puisse convaincre les membres du parti, qui ont une ligne beaucoup plus à droite que les parlementaires.
Être positifs et optimistes
James Cleverly, ancien ministre de l’Intérieur sous Rishi Sunak et Liz Truss, semble avoir convaincu lors de son discours, mais reste en retard par rapport aux candidats en tête. Se positionnant en tant que rassembleur du parti, il a affronté la défaite avec humour et a, lui aussi, tenté d’insuffler de l’espoir. « Parler, c’est facile, mais agir est plus difficile. Nous avons besoin d’un leader capable d’exécuter son projet dès le premier jour à la tête du parti », dit-il. Il a ajouté, en référence aux moqueries reçues par les Conservateurs lors des élections générales, sur leur déconnexion avec la réalité des Britanniques : « Nous devons être enthousiastes, identifiables, positifs et optimistes. Nous devons être plus normaux ». Bien qu’il ait remonté légèrement lors de la conférence et que son discours ait plu au public présent, James Cleverly reste encore à la traîne. Populaire parmi les parlementaires, il l’est moins parmi les membres du parti, qui auront le dernier mot.
A une époque, il n’y avait aucun congé de maternité et pourtant, les gens avaient plus de bébés.
Kemi Badenoch, ancienne ministre du Logement sous Rishi Sunak, s’est révélée comme la favorite des membres du parti, mais elle coince auprès des parlementaires, qui ne sont pas ravis de ses nombreuses frasques. Se positionnant comme la candidate « anti-système » et « anti-woke », elle est connue pour ses nombreuses positions extrêmes qui dérangent une partie des ténors conservateurs. Notamment sur les questions sociales, elle a déclaré en début de conférence que le congé de maternité « coûte trop cher aux entreprises. […] Il faut que les gens se responsabilisent. A une époque, il n’y avait aucun congé de maternité et pourtant, les gens avaient plus de bébés ». Cette déclaration est mal passée auprès de beaucoup et pourrait avoir réduit les chances de victoire de l’ancienne ministre du Logement, malgré sa popularité auprès des membres du parti.
« Je suis une vétéran de la politique. J’ai été ministre dans quatre gouvernements différents, j’ai vu le système de l’intérieur et il est cassé. Pendant trop longtemps, les politiciens ont dit au public ce qu’il voulait entendre et ont fait l’inverse derrière leur dos. Moi, je dis : assez », assène-t-elle.
Une surprise dans la course
Enfin, la surprise de cette course à la tête du parti, et pour l’instant donné favori chez les parlementaires, est Robert Jenrick. Ancien ministre de l’Immigration, il s’impose comme le descendant de Liz Truss et a déjà attaqué le bilan du nouveau Premier ministre, Keir Starmer. « Qui est Keir Starmer ? Nous avons désormais vu qui il est ces dernières semaines. Quelqu’un qui libère des prisonniers, qui amnistie les immigrants illégaux et qui donne une augmentation de salaire aux conducteurs de trains qui sont déjà très bien payés. Pendant ce temps, la majorité silencieuse des gens qui travaillent dur s’attend à une hausse des taxes. Les créateurs de richesses fuient le pays et des millions de retraités ont été trahis », a-t-il chargé.
Qui est Keir Starmer ? Quelqu’un qui libère des prisonniers, qui amnistie les immigrants illégaux et qui donne une augmentation de salaire aux conducteurs de trains qui sont déjà très bien payés
Il a également attaqué le nouveau gouvernement travailliste sur son projet de loi « Net Zero », visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre. Pour lui, le parti conservateur doit se positionner de manière forte sur la question migratoire, il souhaite que le Royaume-Uni sorte de la Convention Internationale des Droits de l’Homme pour pouvoir « reprendre le contrôle » sur « l’immigration démesurée ».
Ce virage sur la Convention Internationale des Droits de l’Homme semble cependant inadapté pour certains parlementaires. « Je pense que nous concentrer sur la Convention Internationale des Droits de l’Homme ne représente pas ce dont les Britanniques ont vraiment besoin. Cela nous fait paraître déconnectés », a réagi l’un des députés conservateurs.
C’est donc à droite toute que se dirige le parti conservateur. En effet, ce sont finalement Kemi Badenoch et de Robert Jenrick qui ont été désignés comme finalistes.
Léna Job (à Londres)
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