Politique

Etats-Unis : selon le FBI, la Russie et l’Iran veulent semer la discorde après l’élection présidentielle


Le FBI a lancé, lundi soir, 4 novembre 2024, un sévère avertissement : les ingérences étrangères dans le processus électoral ont fortement augmenté ces derniers jours. Avec un changement notable : si, en 2016, Moscou souhaitait faire élire Donald Trump vu comme plus favorable à ses intérêts, ce que visent encore aujourd’hui la Russie et l’Iran, mais c’est une déstabilisation globale de la société américaine qui serait cette fois la priorité. La méthode : semer le doute sur la régularité du processus électoral et sur le résultat de l’élection. Les opérations d’influence illégales devraient donc monter en puissance dans les semaines à venir.

Dans une déclaration commune publiée le 4 novembre 2024, le FBI, en collaboration avec l’ « Office of the Director of National Intelligence » (ODNI) et la « Cybersecurity and Infrastructure Security Agency » (CISA), a souligné les efforts déployés par des adversaires étrangers – en particulier la Russie et l’Iran – pour saper la confiance du public dans le processus électoral et semer la discorde parmi les Américains.

A plusieurs reprises ces dernières semaines, le FBI ou d’autres agences américaines avaient relevé ce risque de déstabilisation. Le dernier communiqué allant dans ce sens remonte à vendredi dernier. Mais lundi 4 novembre, le FBI écrivait : « Depuis notre déclaration de vendredi, la communauté du renseignement a observé que des adversaires étrangers, en particulier la Russie, menaient de nouvelles opérations d’influence visant à saper la confiance du public dans l’intégrité des élections américaines et à attiser les divisions entre les Américains ».

Le FBI en première ligne contre les ingérences

Le Communauté du renseignement (un vocable qui couvre l’ensemble des 18 agences américaines) s’attend donc à ce que ces activités ne s’arrêtent pas au soir des élections, mais s’intensifient au contraire dans les semaines à venir, et à ce que les discours d’influence étrangers se concentrent sur les « Swing states ». Plusieurs services seront, peu ou prou, mis à contribution, mais, évidemment le FBI et le Département de la sécurité intérieure seront en première ligne dans le pays tandis que la CIA déploiera ses moyens pour détecter les menaces informationnelles venant de l’extérieur.

Les acteurs d’influence russes ont récemment publié et amplifié un article affirmant faussement que les responsables des Swing States prévoyaient d’orchestrer des fraudes électorales à l’aide d’une série de tactiques.

La déclaration commune de ce lundi désignait la Russie comme l’acteur le plus agressif dans ces opérations d’influence. Des entités russes ont, ainsi, produit des vidéos et des fausses nouvelles (« fake news ») destinées à remettre en question la légitimité de l’élection, à susciter la peur à l’égard du processus électoral et à dépeindre les Américains comme ayant recours à la violence les uns contre les autres en raison de leurs divergences politiques.

« Les acteurs d’influence russes ont récemment publié et amplifié un article affirmant faussement que les responsables des Swing States prévoyaient d’orchestrer des fraudes électorales à l’aide d’une série de tactiques, telles que le bourrage des urnes et les cyber-attaques », indiquent l’ODNI, le FBI et la CISA.

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Le futur occupant de la Maison Blanche risque de devoir gérer une crise profonde suite à des tentatives de la Russie et de l’Iran pour semer le doute sur la crédibilité des élections. (Photo par Jewel SAMAD / AFP)

IA générative et fausses vidéos

En outre, elles ont attiré l’attention sur une vidéo fabriquée de toutes pièces montrant l’interview d’une personne alléguant une fraude électorale en Arizona, impliquant de faux bulletins de vote à l’étranger et des listes électorales manipulées pour favoriser la vice-Présidente Kamala Harris. Le secrétaire d’Etat de l’Arizona a immédiatement réfuté ces allégations.

Ces vidéos ne sont pas authentiques, ne proviennent pas du FBI et leur contenu est faux.

Selon les agences de renseignement, ces efforts « risquent d’inciter à la violence, y compris contre les fonctionnaires électoraux ». Elles prévoient que les acteurs russes continueront à diffuser « d’autres contenus fabriqués sur ces thèmes […] dans les jours et les semaines qui suivront la fermeture des bureaux de vote ».

Le panel des opérations de guerre psychologique déployé par la Russie est large. Il s’appuie entre autres sur de nouvelles technologies, telles que l’Intelligence artificielle (IA) générative, pour créer et diffuser des contenus. Ainsi, dans une déclaration du 2 novembre 2024, le FBI évoquait deux fausses vidéos circulant en ligne et visant à jeter le doute sur l’élection présidentielle américaine. Sur « X », le Bureau annonçait être « au courant de deux vidéos prétendant provenir du FBI et portant sur la sécurité des élections, l’une affirmant que le FBI a appréhendé trois groupes commettant des fraudes électorales… Ces vidéos ne sont pas authentiques, ne proviennent pas du FBI et leur contenu est faux ».

La Russie veut déstabiliser le pays, l’Iran cible Donald Trump

Le FBI, l’ODNI et la CISA, ne se limitent pas à la menace venue du froid et affirment que l’Iran constitue également une menace importante : « Nous avons évalué que l’Iran a mené des activités cybernétiques malveillantes pour compromettre la campagne de l’ancien président Trump », ont indiqué les agences.

Nous avons évalué que l’Iran a mené des activités cybernétiques malveillantes pour compromettre la campagne de l’ancien président Trump.

Selon elles, les acteurs iraniens pourraient également créer de faux contenus médiatiques destinés à empêcher le vote ou à inciter à la violence, des tactiques qu’ils ont employées lors des cycles électoraux précédents. Téhéran reste en effet déterminé à venger la mort du commandant du corps des Gardiens de la révolution islamique et de la Force Qods, Qasem Soleimani, éliminé à l’aéroport de Bagdad sur ordre de Donald Trump, le 3 janvier 2020. Et le renseignement américain rappelle que le régime des mollahs « a, à plusieurs reprises, désigné l’ancien président comme l’une des cibles prioritaires de sa vengeance ».

« L’intégrité des élections est l’une de nos plus grandes priorités, et le FBI travaille en étroite collaboration avec les Etats et les partenaires locaux chargés de l’application de la loi pour répondre aux menaces électorales et protéger nos communautés alors que les Américains exercent leur droit de vote », a encore déclaré le FBI. « Les tentatives visant à tromper le public avec de faux contenus sur les opérations du FBI sapent notre processus démocratique et visent à éroder la confiance dans le système électoral », poursuit l’Agence.

AFP

Le FBI sonne l’alerte sur les tentatives de destabilisation menées par la Russie et l’Iran pour semer le chaos après els élections de ce 5 novembre 2024. (Photo par Alex Edelman / AFP)

Des preuves qui remontent jusqu’à Moscou

Un rapport de BBC Verify (un département de la radio-télévision publique britannique spécialisé dans l’authentification des contenus circulant dans les médias et sur les réseaux sociaux) a découvert des preuves liant les fausses vidéos à une opération plus vaste, venue de Russie qui a produit, ces derniers mois, des centaines de clips contrefaits ciblant les élections.

Ces vidéos imitaient le contenu d’agences gouvernementales américaines, mais également de plus de 50 organismes d’information internationaux, dont la BBC, France 24 ou encore Fox News. « Nous pouvons relier l’opération à la Russie grâce à certaines fake news dont nous savons qu’elles ont été produites par une société russe », a déclaré à la BBC, Guillaume Kuster, PDG de CheckFirst, une société d’analyse en ligne basée en Finlande qui a mené une enquête indépendante sur le réseau moscovite. Une autre preuve, affirme Guillaume Kuster, réside dans « un ensemble de données auquel nous avons eu accès et qui prouve que l’une des machines utilisées pour envoyer des courriels [par le groupe] était située en Russie ».

Les autorités locales, étatiques et fédérales ont déployé des efforts considérables pour garantir la sécurité et l’intégrité de l’infrastructure électorale de notre pays.

« Il est important de se rappeler que si les élections sont politiques, la sécurité des élections ne l’est pas. La sécurité des élections c’est la sécurité nationale », affirme Cait Conley, conseiller principal de la CISA. « Les autorités locales, étatiques et fédérales ont déployé des efforts considérables pour garantir la sécurité et l’intégrité de l’infrastructure électorale de notre pays. Les Américains doivent être sûrs que leurs votes seront comptabilisés comme ils l’ont été. Ils doivent également savoir que nos adversaires étrangers essaieront de leur faire croire le contraire », a-t-il conclu.

Et ce dans un seul but : répandre le chaos pour affaiblir la première démocratie du monde.

Hugues Krasner


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