Israël : Le limogeage du ministre de la Défense ouvre une crise profonde
Le limogeage brutal de Yoav Gallant par Benyamin Netanyahou, ce mardi soir, ouvre une crise politique et morale profonde en Israël. Il est encore trop tôt pour en prédire l’issue, mais une chose est certaine : en dehors du cercle resserré de ses partisans les plus convaincus et de ses alliés d’extrême-droite la décision du Premier ministre révolte la majorité de ses concitoyens. Mardi soir, des dizaines de milliers d’Israéliens sont spontanément descendus dans la rue pour des manifestations qui ont donné lieu à quelques scènes de violence, mais les politiques et la justice ont maintenant la parole.
D’abord, il y a la méthode. Hier soir, Yoav Gallant, convoqué en urgence par Benyamin Netanyahou a appris son limogeage dix minutes à peine avant qu’il soit officiellement annoncé. Un acte d’une grande brutalité, donc. Lorsqu’il a pris la parole, pour une déclaration pleine de dignité de huit minutes, Gallant avait d’ailleurs du mal à cacher son émotion et le salit militaire qu’il a adressé « aux soldats tombés et à leurs familles, aux vétérans blessés, aux otages et à leurs familles et à tous les militaires et [membres des] forces de sécurité » restera, à n’en pas douter, dans l’histoire de l’Etat juif.
Ensuite, il y a le moment : la guerre n’est pas tout à fait terminée à Gaza, elle peut s’aggraver à tout moment sur le « Front nord », contre le Hezbollah et Israël vit sous la menace d’une nouvelle attaque iranienne.
Le moment, dès lors, était-il bien choisi pour chasser un homme qui a passé 35 ans au sein de l’armée, y a occupé de hautes fonctions, entretient d’excellentes relations avec l’allié américain (qui préféraient parler avec lui qu’avec Netanyahou) et a participé aux succès majeurs de Tsahal et des services de sécurité et de renseignement après le 7 octobre ?
Netanyahou évoque « la confiance », Gallant parle de désaccords graves
Enfin, il y a le fond. Pour justifier sa décision, le Premier ministre invoque la confiance : « En pleine guerre, la confiance entre le premier ministre et le ministre de la défense est plus que jamais nécessaire. Au cours des derniers mois, cette confiance s'est érodée ». Yoav Gallant, lui, assure que le divorce s’est joué sur pour cause de désaccords sur « trois sujets ».
Le premier d’entre eux, affirme Gallant, est celui de l’enrôlement des jeunes juifs ultra-orthodoxes dans l’armée (ils sont, jusqu’à présent, exemptés de service militaire) : « Chaque personne en âge de servir dans Tsahal doit être enrôlée. La question n’est pas uniquement sociale, elle est centrale pour notre existence et notre avenir, pour la sécurité d’Israël et celle du peuple de Sion. Nous avons perdu pendant cette guerre de nombreux combattants, des femmes et des hommes. Des défis supplémentaires nous attendent dans les prochaines années. Les guerres ne sont pas terminées. Dans ces conditions, il n’y a pas d’autre choix: tout le monde doit servir dans Tsahal, tout le monde doit participer à la mission de défense de l’Etat d’Israël. Nous n’avons pas le droit de permettre le vote d’une loi discriminatoire et corrompue et de dispenser ainsi un grand nombre de citoyens de prendre leur part à la charge. Le temps du changement est arrivé ».
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