LEGISLATIVES EN AFRIQUE

Législatives du 17 novembre au Sénégal : raz de marée du Pastef, le parti au pouvoir

Le Premier ministre sénégalais, Ousmane Sonko est le grand vainqueur des législatives du 17 novembre 2024 : son parti décroche 130 sièges sur les 165 que compte l'Assemblée nationale. AFP

A l’occasion d’un message télévisé du jeudi 12 septembre 2024, le Président de la République Bassirou Diomaye Faye annonçait la dissolution de l’Assemblée nationale et convoquait dans la foulée les élections législatives anticipées pour le 17 novembre 2024. Après le scrutin qui s’est déroulé sans aucun incident, malgré une campagne émaillée de violence, les résultats attribuent 130 sièges au parti présidentiel au pouvoir (Pastef). Le taux de participation s’élève à plus de 49%, plus élevé que lors du scrutin de 2022.

Au Sénégal, l’Assemblée nationale compte 165 députés élus au suffrage universel direct pour un mandat de 5 ans. 112 sont attribués au scrutin majoritaire répartis dans les 46 départements du territoire national tandis que 53 sièges sont pourvus selon un scrutin proportionnel. Le référendum constitutionnel de 2016 permet d’élire des députés de la diaspora.

Après trois semaines de campagne électorale, le scrutin s’est tenu le dimanche 17 novembre comme prévu. Si le vote s’est bien déroulé sans aucun incident le jour des élections, il faut noter, tout de même, que la violence a été présente durant la campagne électorale avec l’incendie du siège de la coalition SAMM SA KADOU et des attaques menées contre les convois de la coalition du parti au pouvoir (Pastef) à Koungheul et à Saint Louis.

Les résultats proclamés par la commission nationale des votes le jeudi 21 novembre, au niveau national comme dans la diaspora, placent largement le parti au pouvoir Pastef (Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité ) en tête. Ils lui donnent 130 sièges sur 165. Ces résultats laissent donc apparaître ainsi la victoire sans appel du Pastef dans 40 départements nationaux sur 46 et dans 7 des 8 départements de la diaspora. Le taux de participation s’élève à 49,72% contre 46,64% en 2022. Sur 41 listes au départ, seul 12 auront finalement eu une représentation à l’Assemblée nationale.

Mise d’une Haute cour de justice et d’un parquet financier

En effet, cette large victoire du Pastef indique que les Sénégalais font confiance au projet du parti présidentiel. Les résultats confirment les votes en leur faveur lors de l’élection présidentielle de mars 2024. Ils marquent aussi la fin des anciens partis tels le PS, le PDS, l’AFP, le REWMI et surtout l’échec de l’APR de l’ex-président Macky Sall. Le parti au pouvoir dispose désormais de toutes les marges de manœuvre nécessaires pour accélérer les réformes promises et mener à bien son programme dénommé « Sénégal 2050 » pour l’émergence du pays.

Avec cette majorité écrasante, le Pastef peut facilement mettre en place la Haute cour de justice (HCJ) et abroger la loi d’amnistie votée mars 2024. Au Sénégal, la HCJ est la seule habilitée à juger un ancien président en cas de haute trahison, les Premiers ministres et les ministres pour mauvaise gestion (détournements de fonds publics, corruption, enrichissement illicite, etc.).

Durant la campagne, le premier ministre et tête de liste de Pastef, Ousmane Sonko, est revenu sur la nécessité de la mise en place de cette cour dans le cadre de la reddition des comptes. Dans le même ordre d’idée, un parquet financier a été créé pour poursuivre les autres responsables de l’ancien régime dont les éventuels méfaits ne relèvent pas de la HCJ.

Abrogation de la loi d’amnistie

L’abrogation de la loi d’amnistie constitue l’enjeu majeur de ces législatives. En effet depuis son vote en mars 2024, à la veille de l’élection présidentielle, de nombreux Sénégalais s’étaient indignés contre cette loi qui couvre tous les crimes et délits commis lors des manifestions politiques de février 2021 et février 2024. Le peuple s’attend à ce queune justice soit rendue pour les 83 morts, les blessés, les nombreuses destructions de biens publics et privés. Outre le jugement des responsables de tout bord, une indemnité doit être octroyées aux victimes.

Enfin, les Sénégalais s’attendent avec cette quinzième législature, une assemblée de rupture, une assemblée du peuple et non à la solde de l’exécutif.

Serigne Saliou Leye
Professeur d’histoire et géographie au Sénégal
Diplômé en Justices Transitionnelles (Université Catholique de Louvain/Université Libre de Bruxelles)