Fondateur du Front National, Jean Marie Le Pen est décédé à l’âge de 96 ans.
L’ancien homme politique français est décédé ce mardi 7 janvier 2025 à l’âge de 96 ans à Garches (Hauts-de-Seine), dans un établissement où il avait été admis il y a plusieurs semaines. Sa famille a indiqué que « Jean-Marie Le Pen, entouré des siens, a été rappelé à Dieu ce mardi à 12h » dans un communiqué relayé par l’agence de presse, AFP. Il avait fondé le Front National en 1972, un parti qui avait compté dans ses rangs des ex-Waffen SS qui avait combattu sous les ordres des nazis durant la Seconde Guerre mondiale. Défendant des idées racistes, xénophobe et antisémites, il s’était hissé au second tour de l’élection présidentielle française de 2002. Le parti a changé sa dénomination en Rassemblement National en 2018 et repris par sa fille Marine Le Pen qui a initié un processus de dédiabolisation du parti. La mort de Jean-Marie Le Pen a été annoncée alors qu’une partie de la classe politique française était réunie mardi devant l’Hyper Cacher de la Porte de Vincennes, dix ans après les attentats de janvier 2015. Retour sur le personnage le plus sulfureux de la politique française.
Breton aux origines modestes Jean-Marie Le Pen a participé à l’ascension et à la normalisation de l’extrême droite en France. Après les atrocités de la Seconde Guerre mondiale, l’extrême droite avait été mise au ban de la société française, jusqu’à ce qu’elle soit ressuscitée par Jean-Marie Le Pen dans les années 1970, lorsqu’il crée son parti politique, le Front National, en 1972.
Le combat contre l’homme est fini. Celui contre la haine, le racisme, l’islamophobie et l’antisémitisme qu’il a répandus, continue.
Il a été candidat à l’élection présidentielle cinq fois, dont une fois où il s’était qualifié au second tour face à Jacques Chirac en 2002, à la surprise générale du monde politique. Cependant, il avait échoué à franchir les portes de l’Elysée, faisant face au premier « barrage républicain », qui avait vu les électeurs de tous bords voter pour Jacques Chirac afin d’empêcher une prise de pouvoir par l’extrême droite.
Il a cependant été élu plusieurs fois député à l’Assemblée nationale entre 1956 et 1988, puis député européen entre 2004 et 2019, date à laquelle il s’est retiré définitivement de la vie politique.
De nombreux démêlés avec la justice
La carrière de Jean-Marie Le Pen a été marquée par de nombreuses condamnations en justice pour ses propos antisémites et racistes. Il avait notamment été condamné en 1999 pour apologie de crime de guerre et contestation de crimes contre l’humanité, après avoir qualifié les chambres à gaz de « détail de l’histoire ».
Il a aussi été condamné à plusieurs reprises pour provocation à la haine, discrimination, violences raciales, injures publiques et violences.
Le respect de la dignité des morts et du chagrin de leurs proches n’efface pas le droit de juger leurs actes. Ceux de Jean-Marie Le Pen restent insupportables.
Sa dernière condamnation remonte à 2019, lorsqu’il avait été reconnu coupable d’injures publiques visant des homosexuels, après avoir critiqué le discours du compagnon du policier tué lors de l’attentat islamiste de 2017 sur les Champs-Elysées, et pour avoir associé homosexualité et pédophilie sur son blog.
Jean-Marie Le Pen avait également été accusé d’avoir pris part à des actes de torture lorsqu’il était soldat pendant la guerre d’Algérie.
Dans l’affaire en cours de jugement concernant les faux assistants parlementaires au Parlement européen, pour laquelle le Rassemblement National est accusé, Jean-Marie Le Pen avait été mis en examen. Cependant, en 2019, son cas avait été dissocié des autres mis en examen en raison de son état de santé. En 2024, la cour avait estimé que ses capacités physiques et mentales ne lui permettaient pas de comparaître.
La décision concernant cette affaire devrait être rendue dans le premier semestre de 2025. Cinq ans de prison, dont trois avec sursis, et cinq ans d’inéligibilité ont été requis contre Marine Le Pen dans le dossier.
Une fin politique aux airs de tragédie grecque
C’est par la petite porte que Jean-Marie Le Pen est sorti lorsqu’il a été évincé de son propre parti en 2011, au moment où sa fille Marine Le Pen a pris les rênes du FN.
Elle a ensuite mené avec succès un processus de « dédiabolisation » du parti d’extrême droite, tournant ainsi la page de l’image sulfureuse de son père, marquée par de nombreux propos polémiques qui lui avaient valu des poursuites et des condamnations judiciaires.
Cette refonte du parti, bien que bénéfique dans les urnes pour le désormais Rassemblement National, a fracturé la relation entre le père et la fille. Peu de soutiens de la première heure sont restés fidèles à Jean-Marie Le Pen après son éviction du FN. Et même si certains proches l’ont suivi, la transformation du FN s’est faite sans le patriarche, relégué à une vision d’extrême droite désormais dépassée.
Il s’est ensuite progressivement retiré de la vie politique, annonçant sa retraite en 2019, après des soucis de santé.
Les réactions de la classe politique
Jordan Bardella, président du RN, s’est exprimé, appelant à la compassion, alors que les commentaires fusent sur les réseaux sociaux, dénonçant les frasques de la figure sulfureuse qu’était Jean-Marie Le Pen : « Jean-Marie Le Pen est mort. Engagé sous l’uniforme de l’armée française en Indochine et en Algérie, tribun du peuple à l’Assemblée nationale et au Parlement européen, il a toujours servi la France, défendu son identité et sa souveraineté. Je pense aujourd’hui avec tristesse à sa famille, à ses proches, et bien sûr à Marine dont le deuil doit être respecté », a publié Jordan Bardella sur le réseau X (ex-Twitter).
Je pense aujourd’hui avec tristesse à sa famille, à ses proches, et bien sûr à Marine dont le deuil doit être respecté.
L’opposition, elle, n’oublie pas, à l’image de Jean-Luc Mélenchon, qui s’est opposé aux Le Pen, père et fille, tout au long de sa carrière politique. « Le respect de la dignité des morts et du chagrin de leurs proches n’efface pas le droit de juger leurs actes. Ceux de Jean-Marie Le Pen restent insupportables. Le combat contre l’homme est fini. Celui contre la haine, le racisme, l’islamophobie et l’antisémitisme qu’il a répandus, continue », a écrit le leader de La France insoumise.
Léna Job