LES ENJEUX DE LA VISITE D'EMMANUEL MACRON AU LIBAN

Emmanuel Macron au Liban : soutien à une nation en crise et espoirs de stabilité régionale

Le président français Emmanuel Macron (à gauche) s'apprête à serrer la main de son homologue libanais Joseph Aoun au palais présidentiel de Baabda, lors de sa visite au Liban le 17 janvier 2025. AFP

Une semaine après l’élection de Joseph Aoun à la présidence du Liban, Emmanuel Macron s’est rendu à Beyrouth ce vendredi 17 janvier 2025 pour une visite éclair de 12 heures à haute portée diplomatique. Accueilli par le Premier ministre par intérim, Najib Mikati, le Président français a réaffirmé l’engagement de la France à soutenir un pays plongé dans une crise économique sans précédent et confronté à de profondes tensions régionales. Entre la mise en œuvre d’un cessez-le-feu fragile entre Israël et le Hezbollah, et l’annonce de nouvelles réformes sous le leadership du futur Premier ministre libanais, Nawaf Salam, Emmanuel Macron espère mobiliser l’aide internationale tout en maintenant un dialogue inclusif avec les acteurs locaux, y compris les blocs parlementaires proches du Hezbollah.

L’élection de Joseph Aoun à la présidence du Liban marque un tournant crucial après plus de deux ans de vacance du pouvoir. Ancien chef de l’armée libanaise, Joseph Aoun a su rallier un large consensus parlementaire grâce à l’affaiblissement du Hezbollah, qui a longtemps paralysé le processus électoral dans le pays. Le nouveau contexte politique a offert une opportunité unique pour les forces favorables à un renouveau institutionnel.

Espoir de changement

Dès son entrée en fonction, Joseph Aoun a nommé Nawaf Salam au poste de Premier ministre. Reconnu à l’international pour son parcours en tant que juriste, ancien représentant du Liban à l’ONU et président de la Cour internationale de justice (CIJ) à la Haye, Nawaf Salam symbolise une volonté de réforme et d’ouverture.

Reconnu à l’international pour son parcours en tant que juriste, ancien représentant du Liban à l’ONU et président de la Cour internationale de justice (CIJ) à la Haye, Nawaf Salam symbolise une volonté de réforme et d’ouverture.

Cependant, sa nomination a suscité une vive opposition du Hezbollah et de ses alliés, qui voient en lui une figure trop alignée sur les intérêts occidentaux. Cette divergence met en lumière les profondes fractures politiques au Liban, qui peine à trouver un équilibre entre aspirations réformatrices et pressions internes. Ce gouvernement, bien que contesté, est porteur d’un espoir de changement pour relancer une économie exsangue et rétablir la confiance avec les partenaires internationaux.

 Sécurité régionale : un cessez-le-feu à consolider

La visite du Président français, Emmanuel Macron s’inscrit également dans un contexte de tensions régionales où le Liban joue un rôle central. Le cessez-le-feu conclu en novembre 2024 entre Israël et le Hezbollah reste fragile. Cet accord, soutenu par l’ONU, prévoit le retrait progressif des forces israéliennes du sud du Liban, remplacées par l’armée libanaise dans un délai de 60 jours.

En contrepartie, le Hezbollah, gravement affaibli par 14 mois de conflit avec Israël, doit repositionner ses combattants au nord du fleuve Litani, marquant ainsi une tentative de réduire les frictions dans cette zone hautement militarisée.

Le Hezbollah, gravement affaibli par 14 mois de conflit avec Israël, doit repositionner ses combattants au nord du fleuve Litani, marquant ainsi une tentative de réduire les frictions dans cette zone hautement militarisée

Cependant, des incidents sporadiques, comme des survols israéliens et des accrochages limités menacent de faire voler en éclats cet accord précaire. Au cours de sa visite, Emmanuel Macron a rencontré le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, pour discuter des mesures nécessaires à la consolidation de ce cessez-le-feu.

En plaidant pour un renforcement des capacités de l’armée libanaise, le Président français a aussi réaffirmé le soutien de la France à une souveraineté pleine et entière du Liban sur son territoire, un enjeu clé pour éviter une reprise des hostilités dans cette région instable.

Mobilisation internationale pour le Liban

Au-delà des questions sécuritaires, la visite d’Emmanuel Macron vise à mobiliser l’aide internationale au profit d’un Liban plongé dans une crise économique dévastatrice. Depuis 2019, le pays fait face à une dévaluation de sa monnaie, une inflation galopante et une pauvreté accrue, touchant plus de 80 % de la population.

Le Président français, qui s’est déjà engagé à soutenir le Liban lors de précédentes conférences, entend rappeler l’importance de réformes économiques et institutionnelles pour débloquer les aides promises.

Lors de cette visite, le président français doit aussi rencontrer Nabih Berri, président du Parlement libanais et allié du Hezbollah, dans une démarche de dialogue inclusif. Ce rendez-vous illustre la stratégie du locataire de l’Elysée : maintenir un équilibre entre pression réformiste et respect des dynamiques politiques internes.

Emmanuel Macron, qui s’est déjà engagé à soutenir le Liban lors de précédentes conférences, entend rappeler l’importance de réformes économiques et institutionnelles pour débloquer les aides promises.

Les « gestes symboliques » annoncés par Paris en octobre 2024, comme l’aide à la reconstruction et au développement, devront désormais se traduire en actions concrètes. En retour, la France exige une gouvernance transparente et efficace, condition sine qua non pour rassurer les bailleurs de fonds et éviter que l’aide ne soit détournée.

En l’espace de 12 heures, Emmanuel Macron tente de renforcer le rôle de la France comme partenaire stratégique du Liban. Sa visite illustre une volonté de répondre aux défis multiformes du pays, tout en œuvrant pour une stabilité durable dans une région marquée par les crises.

H. C.