Royaume-Uni: le Premier ministre Starmer veut « tourner la page de décennies de laxisme migratoire »

Le Royaume-Uni pourrait devenir une « île d’étrangers » s’il ne renforce pas ses politiques migratoires, a averti cette semaine le Premier ministre britannique Keir Starmer. Présentant une série de mesures strictes destinées à faire baisser l’immigration, le chef du gouvernement britannique a affirmé vouloir « tourner la page de décennies de laxisme migratoire » en durcissant les critères d’obtention des visas d’entrée La preference nationale sera privilégiée dans les embauches. Il prévoit d’expulser advantage de ciminels étrangers.Selon les estimations officielles, ces réformes pourraient entraîner une baisse de 100 000 entrées nettes de migrants par an. L’objectif des différentes mesures est de ramener le solde migratoire à 300 000 d’ici 2029, loin des 728.000 entrées enregistrées sur les douze mois précédant juin 2024, et encore plus derrière les 900.000 atteints sous le précédent gouvernement conservateur.
Un virage assumé face à la tentation du leader d’extrême droite, Nigel Farage
Cette annonce intervient quelques jours après les élections locales, marquées par une percée spectaculaire du parti d’extrême droite Reform UK, dirigé par Nigel Farage. Un sondage IPSOS récent montre que de plus en plus de Britanniques perçoivent Reform UK comme le principal adversaire du Parti travailliste, devant les conservateurs traditionnels.
La Grande-Bretagne a servi d’expérimentation sur l’ouverture des frontières à l’échelle nationale. Les dommages causés à notre pays sont incalculables.
Face à ce paysage politique en mutation, le Premier ministre britannique, Keir Starmer, a rompu avec la ligne historique de son parti, en adoptant une rhétorique et des mesures traditionnellement associées à la droite dure. « La Grande-Bretagne a servi d’expérimentation sur l’ouverture des frontières à l’échelle nationale. Les dommages causés à notre pays sont incalculables », a-t-il déclaré.
Certains médias britanniques n’ont pas tardé à critiquer ce rapprochement idéologique, l’accusant de reprendre les politiques migratoires de Reform UK.
Visas, diplômes, langue : la barre monte
Le livre blanc présenté à Downing Street détaille une réforme d’ampleur. Désormais, tous les types de visas (travail, études, regroupement familial) seront soumis à des critères plus stricts :
• Niveau de diplôme relevé : Pour obtenir un visa de travail, un diplôme plus élevé sera requis, tant pour les demandeurs que pour leurs personnes à charge.
• Exigence linguistique renforcée : Pour toute demande de visa, une maîtrise minimale de l’anglais est désormais obligatoire. Même les proches accompagnants devront justifier d’une compréhension de base.
• Rapprochement familial conditionné : La maîtrise de l’anglais devient un critère incontournable pour les regroupements familiaux.
• Résidence permanente : Le délai pour y accéder est doublé, passant de 5 à 10 ans, sauf pour certaines professions jugées stratégiques (médecins, infirmiers).
Un visa « parent endeuillé » permettra en revanche une régularisation immédiate pour les parents dont l’enfant britannique ou résident permanent décède.
Former plutôt qu’importer la main-d’œuvre : changement de doctrine
Le gouvernement prévoit également la fin progressive, d’ici 2028, du visa pour les aides-soignants étrangers, initialement créé pour pallier les pénuries dans le secteur des services sociaux.
Les universités seront également impactées :
• La durée du visa post-études sera réduite à 18 mois.
• Une taxe de 6 % sera prélevée sur les revenus issus des étudiants étrangers, destinée à financer les étudiants britanniques.
Les entreprises doivent investir dans la formation, pas dans l’importation de compétences à bas coût.
Les entreprises, quant à elles, devront donner la priorité à l’embauche nationale. Keir Starmer a dénoncé la « dépendance excessive » au recrutement de main-d’œuvre étrangère peu rémunérée, au détriment de la formation des jeunes Britanniques. « Les entreprises doivent investir dans la formation, pas dans l’importation de compétences à bas coût », a-t-il insisté.
Expulsion des criminels étrangers
Le plan prévoit aussi d’expulser davantage de criminels étrangers, et de revoir l’interprétation des lois sur les droits de l’homme, notamment pour restreindre les recours jugés abusifs au nom de « circonstances exceptionnelles ».
Il inclut également la réforme du test de résidence pour l’obtention de la nationalité.
La ministre de l’Intérieur, Yvette Cooper, a tenu à rappeler que ces mesures visent à corriger les « erreurs structurelles » du précédent Gouvernement conservateur : « Nous avons hérité d’un système d’immigration qui a échoué. La fin de la libre circulation a été remplacée par une expérience de marché libre incontrôlée », a-t-elle déclaré.
Un contrôle « juste et équitable »
Le plan s’accompagnera aussi d’une répression accrue des réseaux de traite d’êtres humains.
Surtout, ces mesures sont pensées comme un levier de croissance, et non comme un frein à l’économie. « Nous avons connu notre solde migratoire le plus élevé pendant une période de stagnation. L’idée que plus de migrants signifie plus de croissance ne tient pas ».
Keir Starmer n’exclut pas de nouvelles restrictions si la pression sur le logement et les services publics devait persister : « Si nous devons aller plus loin, nous le ferons »
Une des valeurs fondamentales de notre parti est le contrôle de l’immigration. Nous devons choisir qui vient, selon les compétences et les besoins du pays.
Enfin, il insiste sur la philosophie qui sous-tend ce tournant : le contrôle. « Une des valeurs fondamentales de notre parti est le contrôle de l’immigration. Nous devons choisir qui vient, selon les compétences et les besoins du pays. Et cela doit être équitable ».
Une île qui se ferme… à double tour ?
Keir Starmer veut rompre avec l’image d’un Royaume-Uni passoire. Mais à force de verrouiller ses frontières, le pays pourrait bien refermer aussi ses fenêtres. Car si l’immigration est un courant, elle est aussi une respiration. Reste à savoir si, en se coupant de l’air du large, l’île ne finira pas par s’essouffler elle-même.
Alexander Seale