LE NUCLEAIRE RETROUVE DES COULEURS EN BELGIQUE

Pour le Forum nucléaire belge, l’abrogation de la loi de 2003 ouvre de nouvelles perspectives à l’atome

une vue de la centrale nucléaire de Tihange. Elle vient d'avoir un bon bulletin de sûreté de la part d'experts internationaux de l'AIEA. AFP

L’abrogation jeudi 15 mai de la loi de 2003 sur la sortie du nucléaire a suscité de nombreuses réactions. Pour le directeur général du Forum nucléaire belge, Serge Dauby, il s’agit d’une étape historique, car dit-il, « Enfin, la Belgique, pays doté d’un énorme savoir-faire nucléaire, signale au reste du monde qu’elle jette à nouveau un regard rationnel sur la politique énergétique et le défi climatique, en cessant d’exclure idéologiquement l’énergie nucléaire de la solution ». Le ministre fédéral de l’Energie, Mathieu Bihet (MR) précise qu’il s’agit d’une « étape décisive vers un cadre énergétique robuste et résilient ». Il souligne que c’est le « début d’une nouvelle ère énergétique » pour la Belgique. L’abrogation de la loi de 2003 ouvre la voie à la prolongation de réacteurs existants et la construction de nouveaux réacteurs nucléaires.

Après des années de tergiversations et de négociations, les députés ont voté, jeudi 15 mai 2025, la modification de la loi du 31 janvier 2003 sur la sortie du nucléaire. Cette sortie avait été actée en 1999 sous la pression, à l’époque, des Ecolos qui participaient, pour la première fois, au Gouvernement fédéral. A l’époque, le secrétaire d’Etat à l’Energie s’appelait, Olivier Deleuze (Ecolo).

La Belgique envoie un signal au monde

Comme on pouvait s’y attendre, les écologistes francophones (Ecolo) et néerlandophones (Groen) ont voté contre le texte présenté à la Chambre, alors que le PS et le PTB se sont abstenus. Parmi les nombreuses réactions qui ont salué le vote des députés, il y a notamment celle du Forum nucléaire belge.

« Il ne s’agit pas d’une victoire symbolique, mais d’une étape historique. Enfin, la Belgique, pays doté d’un énorme savoir-faire nucléaire, signale au reste du monde qu’elle jette à nouveau un regard rationnel sur la politique énergétique et le défi climatique, en cessant d’exclure idéologiquement l’énergie nucléaire de la solution », a commenté Serge Dauby, directeur général de l’association professionnelle regroupant la plupart des sociétés et organismes actifs dans le domaine des applications nucléaires.

Pour réussir cette relance, il est urgent de rassembler toutes les parties prenantes au sein d’une « task force ». Nous avons déjà perdu trop de temps au cours de la législature précédente.

Il rappelle toutefois que le travail est loin d’être terminé et qu’il faudrait hâter le pas pour rattraper le retard enregistré depuis le vote de la loi de sortie de l’atome. « En même temps, il ne s’agit que d’une première étape (mais nécessaire) dans la relance du nucléaire. Pour réussir cette relance, il est urgent de rassembler toutes les parties prenantes au sein d’une « task force ». Nous avons déjà perdu trop de temps au cours de la législature précédente. Nous avons besoin d’une politique énergétique belge avec une stratégie à long terme, réaliste et factuelle. Notre industrie et nos citoyens méritent une approche sérieuse, loin des dogmes idéologiques. Le secteur nucléaire se met déjà à la disposition du ministre de l’Energie pour l’aider, lui et son administration, à atteindre les objectifs de transition énergétique et de sécurité énergétique de notre pays », conclut-il.

Pour Serge Dauby, la loi de sortie du nucléaire était une aberration. D.R.

La loi de sortie du nucléaire était une aberration

Le Forum nucléaire assure que la « loi Deleuze s’est avérée être une aberration, avec des conséquences négatives pour la politique énergétique belge que nous ressentons encore aujourd’hui. (…). Jusqu’à aujourd’hui, la loi était restée largement inchangée, interdisant la construction de nouvelles centrales nucléaires. Cette aberration est désormais corrigée et la loi dépassée de sortie du nucléaire est maintenant reléguée dans les livres d’histoire ».

La loi Deleuze s’est avérée être une aberration, avec des conséquences négatives pour la politique énergétique belge que nous ressentons encore aujourd’hui.

Pour rappel, la loi de 2003 condamnait les 7 réacteurs nucléaires belges entre 2015 et 2025. Mais faute d’une vraie stratégie visant à garantir des capacités de production de substitution, la loi de 2003 a été modifiée pour offrir des années de sursis aux réacteurs nucléaires condamnés. Ainsi, le premier réacteur nucléaire Doel 3 n’a été mis à l’arrêt qu’au 1er octobre 2022, suivi de celui de Tihange 2 le 1er février 2025. Doel 1 a été déconnecté le 15 février 2025, alors que Tihange 1 et Doel 2 sont retirés du circuit respectivement le 1er octobre 2025 et le 1er décembre 2025.

De nouvelles perspectives pour le nucléaire

Doel 4 et Tihange 3 ont aussi bénéficié d’une prolongation de 10 ans sous la législature précédente (Gouvernement De Croo) et devrait fermer le 1er novembre 2025. Mais la donne vient de changer et tout est désormais permis…

L’abrogation de la loi de 2003 ouvre de nouvelles perspectives pour l’atome en Belgique. « La construction de nouvelles centrales nucléaires redevient légalement possible, et ce, sans limite de date pour l’exploitation des réacteurs nucléaires (existants et nouveaux) », se réjouit le Forum nucléaire belge.

BELGA

Le ministre fédéral de l’Energie, Mathieu Bihet (MR), se réjouit de l’abrogation de la loi de sortie du nucléaire. (BELGA PHOTO DIRK WAEM).

Atteindre trois objectifs

Le ministre fédéral de l’Energie, Mathieu Bihet (MR) qui a repris le combat qu’avait mené l’ancienne ministre Marie-Christine Marghem (MCC/MR, 2014-2020) a de quoi se réjouir. Il faut dire qu’en tant que député fédéral, il avait déposé une proposition de loi sous la précédente législature pour abroger la loi de 2003. Il en voit l’aboutissement aujourd’hui en tant que ministre de l’Energie.

Nous voulons sortir de l’opposition stérile et passéiste du nucléaire contre le renouvelable. Nous souhaitons un mix énergétique avec le nucléaire et le renouvelable pour atteindre trois objectifs.

« Notre approche est pragmatique. Nous voulons sortir de l’opposition stérile et passéiste du nucléaire contre le renouvelable. Nous souhaitons un mix énergétique avec le nucléaire et le renouvelable pour atteindre trois objectifs. Premièrement, la sécurité d’approvisionnement, nous voulons une énergie abondante. Deuxième point, c’est l’abordabilité, nous voulons une énergie au prix le plus bas possible tant pour le pouvoir d’achat des ménages que pour la compétitivité de nos entreprises. Troisième élément : c’est un mix énergétique bas carbone, avec le nucléaire et le renouvelable, nous tentons d’avoir un mix énergétique et surtout électrique bas carbone pour respecter nos ambitions climatiques », a-t-il vanté sur les réseaux sociaux.

Il assure que l’abrogation de la loi de 2003 est une « étape décisive vers un cadre énergétique robuste et résilient ». Et souligne que c’est le « début d’une nouvelle ère énergétique » pour la Belgique.