POLITIQUE

Quand un traité belgo-iranien accorde l’impunité au fascisme religieux des mollahs


Le couperet de la machine à voter est tombé. Les députés ont ratifié, ce mercredi 20 juillet, un traité belgo-iranien sur le transfert des condamnés, vivement critiqué par les opposants iraniens en exil en Europe, qui y voient la porte ouverte à la remise à Téhéran de détenus iraniens, jugés en Belgique et  condamnés pour crimes terroristes. Le Conseil National de la Résistance iranienne (CNRI) condamne fermement l’adoption de cet accord qu’elle qualifie de honteux. « Il est incompréhensible que la Belgique devienne ainsi le point faible de l’Europe dans la lutte internationale contre le terrorisme », estime Maryam Rajavi, sa présidente. Des avocats, des associations de défense des droits humains, certains députés de la coalition gouvernementale, mais aussi une partie de la communauté internationale, ont tenté de s’y opposer, soulignant que le texte est une violation manifeste de la résolution 1373 du Conseil de sécurité de l’ONU. Ils ont invité à « ne pas céder au chantage iranien » en échange de la libération éventuelle d’otages, mais sans succès.

Sur les 131 députés présents, 79 ont voté en faveur du traité, 41 l’ont rejeté et 11 se sont abstenus juste après minuit, après un débat tardif mercredi. La signature de ce traité ouvre, entre autres, la voie au transfèrement d’Assadollah Assadi, un terroriste condamné par les tribunaux belges à 20 ans de prison pour son rôle dans un attentat à la bombe visant un rassemblement d’opposants au régime iranien en France. Il pourrait être gracié en Iran.

Depuis plusieurs semaines, l’opposition iranienne manifestait, à Bruxelles, contre l’adoption ce texte. Mardi, des actions de protestation ont aussi eu lieu devant les ambassades ou consulats de Belgique à Londres, Berlin, Paris, Stockholm, Vienne, Copenhague, Genève, Amsterdam, Washington, Toronto, Ottawa, Vancouver, Sydney ou encore Melbourne.

Refuser la « diplomatie des otages »

À la Chambre, dans l’opposition, les Engagés, DéFI, la N-VA et le Vlaams Belang ont aussi appelé à le rejeter, car son approbation serait synonyme pour la Belgique de céder aux pressions iraniennes en acceptant la « diplomatie des otages », soit une porte de sortie, en Europe, aux agents iraniens qui orchestrent des attentats terroristes. Le texte suscite aussi le malaise chez certains élus de la majorité, y compris au sein du MR. Denis Ducarme n’a pas participé au vote, qu’il a qualifié de contraire à sa conscience.

« Depuis longtemps, je suis engagé dans les dossiers de terrorisme. Ici, sur le plan des principes, on ne respecte pas la séparation des pouvoirs, et en particulier l’autorité de la chose jugée. Il n’y a pas de garantie que la peine sera exécutée en Iran. Au contraire, on sait que la personne sera graciée en Iran, alors qu’elle a été condamnée pour un crime terroriste. Certains pays ont déjà procédé à des échanges de prisonnier avec l’Iran mais, ici, il est question d’un terroriste ». Le député MR a d’ailleurs quitté l’hémicycle au moment du vote.

Ces oppositions à la signature du traité controversé n’ont toutefois pas été suffisantes pour faire basculer le résultat final d’un vote qui s’est conclu majorité contre opposition. Le PTB s’est, quant à lui, abstenu.

Des réactions en cascade

Sur les réseaux sociaux, les réactions politiques ne se sont pas fait attendre. Georges Dallemagne (Les Engagés) a de critiqué un « texte de libération de terroristes ». « La signature et l’approbation de ce traité sera une erreur, une faute. La Belgique envoie le message que sa justice est à vendre », a renchéri François De Smet (DéFI).

Theo Francken (N-VA) ne mâche pas nous plus ses mots : « l’approbation de l’accord iranien visant à remettre le super terroriste Asadi à l’Iran voyou. C’est choquant », a-t-il tweeté.

Un choix politique

Lors de la discussion générale qui s’est tenue un peu plus tôt, le mardi, la nouvelle ministre des Affaires étrangères, Hadja Lahbib, a défendu le texte. « Les services de renseignement soutiennent la ratification de ce traité car il favorisera, selon eux, la sécurité des Belges dans la région », a-t-elle indiqué. « Dans les négociations qui ont mené à la conclusion du traité, il n’a toutefois jamais été question de cas individuels », a-t-elle encore assuré. Les députés ont donc été mis devant un fait accompli. Ils ont été incités à voter en invoquant le levier bien connu des « impératifs de sécurité nationale ».

Dans un message publié sur Twitter, Maryam Radjavi, la présidente élue du Conseil National de la Résistance iranienne (CNRI), a déclaré : « Comment peut-on appeler ce vote une victoire de la démocratie ? Une démocratie ne peut exister que si les deux parties croient aux mêmes valeurs et les appliquent. Le régime des mollahs est une théocratie parsemée de caractéristiques dictatoriales. La substance et le nom du traité reviennent à accorder l’impunité au terrorisme du fascisme religieux et aux mollahs. Rien ne justifie ce vote éhonté ».

Personne n’est plus en sécurité

Maryam Radjavi a aussi tenu à rappeler, en s’appuyant sur des documents, figurant au dossier de l’actuel condamné et détenu pour faits de terrorisme, qu’Assadollah Assadi avait menacé la Belgique d’actes terroristes en mars 2020 par le biais de groupe armés en Iran, en Irak, en Syrie, au Liban et au Yémen. Que risque-t-il de faire en rentrant au pays s’il devait être transféré ?
« Les adeptes de la complaisance et des accords secrets cherchent à transformer la prise d’otages de citoyens belges en Iran en une tactique contre les victimes du terrorisme et cherchent à satisfaire le bourreau avec le sang des victimes. Se contenter de la libération d’un otage belge en Iran, c’est faire un pas en avant et 100 pas en arrière car, à l’avenir, personne ne sera plus en sécurité. Chaque citoyen européen et américain en Iran sera désormais un otage potentiel »