SOCIETE

#balancetonbar: il y a encore du travail à faire chez certains « mecs »


Depuis quelques jours, les jeunes ne parlent que de cela sur Instagram et Twitter. Suite à de nombreux témoignages d’abus sexuels, un millier de personnes se sont retrouvées jeudi soir au cimetière d’Ixelles, à Bruxelles, en soutien aux victimes d’agressions dans les bars Waff et El Café. Mais, apparemment se rassembler pour dénoncer, soutenir et conscientiser ne suffit pas. Sur les réseaux sociaux, certains hommes diffusent des propos sexistes et aliment la violence à l’égard des femmes. C’est oublier que l’incitation au viol est pénalement répréhensible. « Insta ou la police, qui fait justice » ?

Violences sexuelles banalisées, dans la rue comme sur internet, aucune femme n’y échappe. Le viol n’est pas un fait divers. C’est un phénomène de société. Mais, entre celles qui n’osent pas porter plainte, celles que les hommes rendent responsables et celles, rares courageuses, dont l’affaire est classée sans suite, les violences sexuelles trouvent leurs justifications et le crime est entretenu. De victimes, les femmes en deviennent coupables. L’agression sexuelle est érigée au rang d’une culture qui kidnappe l’histoire des victimes. Véritable cancer sociétal, le viol constitue le seul crime aujourd’hui dans l’imaginaire collectif où la victime est suspectée d’avoir encouragé l’acte ou d’avoir cherché à provoquer son agresseur.

#RapeCulture : la société abuse avant l’homme

La culture du viol est insidieusement omniprésente. C’est celle qui répond aux féministes qu’une bonne baise les calmerait, c’est celle aussi qui nous rabâche, dès la petite enfance, que les hommes ont des « besoins » et qu’ils sont poussés par « nature » à sauter sur une femme, réduisant cette dernière à une proie sexuelle devant « par essence » répondre à leurs pulsions primaires.
Sur les réseaux sociaux, cela donne ces derniers jours, dans le prolongement de l’actualité récente, un florilège inquiétant qui se passe de tout commentaire. Un seul échantillon suffira en lecture :

Cette normalisation de l’agression sexuelle contribue à alimenter les préjugés et à légitimer une augmentation inquiétante des viols en véhiculant l’idée que le corps féminin peut être malmené en toute impunité parce que, de toute façon, « c’est de sa faute ».
Ainsi, selon un sondage réalisé en 2020 par Amnesty International et SOS viol, 48% des victimes d’agressions sexuelles l’ont été pour la première fois avant l’âge de 19 ans et 23% des jeunes pensent que les femmes aiment être forcées, que la violence est sexuellement excitante pour elles. 1/3 des jeunes pensent qu’il est normal d’insister pour avoir des rapports sexuels et que si une personne ne dit pas explicitement « non », cela ne peut pas être un viol. Enfin, 16% estiment que la responsabilité de la victime peut être engagée si elle est vêtue de manière sexy ou provoquante.

 

Copyright : Amnesty International

Briser un silence complexe

« Pas une de plus ! On veut pouvoir sortir sans avoir peur, on veut que vous éduquiez vos fils, on veut que les victimes soient entendues, on veut que la justice agisse, il faut que cela cesse, on n’en peut plus de devoir faire attention lorsque l’on sort », est le message collectif porté par la gent féminine. Et pourtant, briser le silence n’est pas simple.

Toujours selon les statistiques publiées par Amnesty International, 90 % des Belges pensent que la crainte de ne pas être crue est un frein pour se confier. 69 % des répondants pensent également que l’accueil des victimes à la police n’est pas optimal : 14% seulement des femmes qui ont parlé aux forces de l’ordre ont été satisfaites de leur démarche. 63 % des personnes interrogées pensent aussi que la crainte de subir du racisme ou de l’islamophobie peut être un frein dans la libération de la parole.

Copyright : Twitter

Un risque de victimisation secondaire

Enfin, une personne portant plainte pour agression sexuelle n’est aujourd’hui pas à l’abri d’être poursuivie par l’auteur présumé pour « dénonciation calomnieuse ». Sans preuves, sa parole peut être remise en question par l’auteur présumé, ce qui peut constituer une victimisation secondaire grave qui s’additionne au traumatisme de la victime. Entamer rapidement des démarches est le meilleur moyen pour donner un maximum de chance à un dossier d’aboutir.
En effet, le délai pour l’utilisation du Set d’Agression Sexuelle (SAS), l’instrument médical qui permet de récolter les preuves d’une agression est de 72 heures. Après, les traces visibles du viol disparaissent. Le SAS contient des prélèvements numérotés (vêtements, analyses buccales et gynécologiques, cheveux, etc.). Il ne pourra être ouvert que sur autorisation du procureur du Roi. Il est également conseillé à la victime d’éviter de se changer et de se laver afin de récolter un maximum d’indices.

 

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