SOCIETE

En Belgique, le don de sang n’est pas gay friendly


La Croix Rouge tire régulièrement la sonnette d’alarme. Le stock actuel de sang est au plus bas. La pandémie de Covid-19, les vacances estivales, les récentes inondations sont autant de facteurs cumulés qui perturbent l’approvisionnement et expliquent cette situation critique. Malgré ce constat alarmant, le don de sang n’est pas ouvert à tous de la même manière dans notre pays. Les personnes homosexuelles sont autorisées à donner leur sang à des conditions restrictives seulement. Une discrimination sous couvert de santé et teintée de morale qui constitue aussi un déni de citoyenneté à l’encontre de la communauté LGBTQI+. DéFI a déposé une proposition de loi visant à revoir les conditions du don de sang des personnes en raison de leur orientation sexuelle.

Avant 2017, les hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes (HSH) n’étaient pas autorisés à donner leur sang. La loi du 11 août 2017 a mis fin à cette situation. Ce changement est alors considéré par beaucoup comme une avancée. Mais, la communauté LGBTQI+ considère les conditions discriminantes. Malgré une évaluation approfondie des données scientifiques et épidémiologiques les plus récentes, une période d’abstinence de 12 mois est imposée aux HSH pour le don de sang contre 4 mois pour les personnes hétérosexuelles. Dans plusieurs pays européens, les hommes homosexuels et bisexuels sont autorisés à donner leur sang aux mêmes conditions que les hétérosexuels. Sophie Rohonyi, député fédérale et de François Smet (DéFI), président de DéFI, souhaitent faire supprimer la condition des 12 mois.

Discrimination ou sécurité du sang ?

Le 18 août dernier, le ministre israélien de la Santé a annoncé la fin des restrictions sur le don du sang pour les homosexuels dès le 1er octobre. Une égalité des genres qui est loin d’être similaire en Belgique. « Actuellement, les personnes hétérosexuelles peuvent donner leur sang 4 mois après le premier rapport sexuel avec un nouveau partenaire alors que la condition imposée aux HSH est de 12 mois d’abstinence après le dernier rapport sexuel », nous explique Sophie Rohonyi. « L’argument avancé est celui de la sécurité du sang face à une exposition possible au VIH. Or, lorsque l’on va donner son sang, la qualité du sang est automatique analysée pour tout type de donneur, hétéro ou homosexuel. Imposer une période de 12 mois d’abstinence basé sur cet argument de sécurité est purement et simplement discriminant. En outre, sous-entendre que les personnes homosexuelles ont de facto des comportements à risques est stigmatisant. Vous avez des personnes hétérosexuelles qui ont des vies sexuelles dissolues, comme des personnes homosexuelles qui vivent des couples stables. L’orientation sexuelle n’a donc strictement rien à voir ».

Sensibiliser aux comportements à risques

« La politique de don de sang doit être une politique de prévention fondée sur les comportements à risque du donneur, quel qu’il soit, et non sur son sexe ou son orientation sexuelle » poursuit Sophie Rohonyi. « Je pense qu’il est possible, de respecter un objectif de sécurité du sang tout en envisageant de mieux cerner les comportements à risque quelle que soit l’orientation sexuelle. C’est juste une question de volonté politique ».
Quant aux comportements à risques, « l’Education à la Vie Relationnelle, Affective et Sexuelle » (EVRAS) devrait être distillée de manière généralisée dans tous les établissements scolaires, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui », poursuit la députée. « Et attendre l’âge de 17 ou de 18 ans pour éduquer aux comportements à risques, c’est beaucoup trop tard. La sexualité commence à un âge bien plus précoce. Il faut prendre la question à la base ».

Une résolution est insuffisante

« Une proposition de loi (Link vers : https://www.lachambre.be/FLWB/PDF/55/2055/55K2055001.pdf) se justifie encore plus à la lumière de la réponse qui m’a été donnée par le Ministre Vandenbroucke le 25 mai dernier en Commission. Le Ministre a affirmé qu’une modification de la loi n’était pas l’ordre du jour en raison d’un manque de données d’évaluation de la loi et des systèmes plus ‘laxistes’ en vigueur dans nos pays voisins. Cette position sous-tend un a priori qui ne se justifie pas. Donner son sang est un acte civique et de solidarité qui implique deux conditions fondamentales : la responsabilité du donneur et la qualité de son sang. Un refus non objectivé de corriger une discrimination flagrante démontre à suffisance que le Parlement doit prendre la main et changer la loi. Le PS a déposé une proposition de résolution. Cela ne nous paraît pas suffisant », ponctue Sophie Rohonyi. Une commission santé doit se réunir durant ce mois de novembre pour poursuivre le débat sur le sujet.