COVID-19

Entre le ras-le-bol d’une gestion « yo-yo » et la crainte de la suite…


Face à un système de santé, le nôtre, qui a (encore et toujours) de plus en plus de mal à faire face, les hôpitaux tirent la sonnette d’alarme. Un an et demi après le début de la crise sanitaire mondiale, on dirait que les choses ne vont guère mieux. Alors que les chiffres de contamination au Covid-19 ne cessent d’augmenter, les hôpitaux lancent un SOS, air, hélas trop bien connu. Pendant ce temps-là, le Codeco prévu demain et avancé de deux jours, réinvite lentement au télétravail et vise discrètement la vaccination forcée, en tout cas pour les soignants. En outre, deux semaines après l’instauration du  « salvateur », CST dans tout le pays, le constat économique laisse d’ores et déjà un goût amer faisant craindre le pire pour les secteurs visés. Selon le  SNI, syndicat des indépendants, 2/3 des établissements concernés constatent une baisse de chiffre d’affaires. Et demain ?

Il faut que le politique prenne clairement ses responsabilités !

C’est l’un des constats d’une enquête du syndicat neutre et indépendant SNI, menée en collaboration avec Horeca Bruxelles et la Fédération du Loisir, toutes deux affiliés au SNI, auprès de quelques 250 établissements : depuis l’instauration du Covid Save Ticket, 2/3 des établissements concernés constatent une baisse de chiffre d’affaires.
Et malheureusement pour environ 30% d’entre eux, la perte s’élève à plus de 20%.
La raison la plus fréquemment évoquée : « Les clients ne viennent pas parce qu’ils n’ont pas de CST ; c’est surtout le cas en Wallonie et davantage  encore à Bruxelles où le taux de vaccination reste malheureusement beaucoup trop faible. Les groupes deviennent de plus en plus rares. Tout simplement car, dans le groupe, il y a toujours au moins une personne qui n’est pas vaccinée… ».

Entre la peur de la verbalisation et la crainte de la faillite

La crainte de beaucoup d’exploitants Horeca, de loisirs ou de salles de sports ou d’indépendants actifs dans l’événementiel se concrétisent malheureusement. Le CST a un impact négatif sur le chiffre d’affaires et ne pas respecter les mesures en vigueur peut conduire à des sanctions financièrement trop importantes que pour jouer avec le feu.

Ainsi, les secteurs visés par l’instauration obligatoire du CST naviguent entre la peur des sanctions et la crainte de fermer pour toujours… à terme car ils ne pourront faire face éternellement au contexte imposé. Deux semaines après l’instauration du CST en Wallonie et en Flandre et un mois à Bruxelles, le constat est amer pour les secteurs concernés. En effet, 2/3 des établissements concernés constatent une baisse de chiffre d’affaires. L’Horeca bruxellois étant à ce titre davantage touché.

A force de multiplier des mesures spécifiques pour des situations particulières (…), la population risque de ne plus comprendre la logique de ces décisions asymétriques et de ne plus adhérer  (…). Ne pas imposer aveuglément le télétravail participe  à ce devoir de cohérence !

Le CST pire que mieux

Toutefois, une majorité des clients qui le possèdent tendent à le montrer spontanément mais cela n’empêche pas, dans quelque 20% des cas, qu’il y ait des réticences à l’entrée ou des tentatives de fraude. « Le CST ne peut être qu’une solution très transitoire parce que cela entraine notamment un travail supplémentaire pour l’exploitant. Il faut que le politique prenne clairement ses responsabilités ».

Le SNI demande à nouveau aux autorités de prendre leur responsabilité. « Le CST ne pouvait être qu’une solution très transitoire, d’autant plus au moment où cela permettait aux établissements bruxellois d’avoir les mêmes règles qu’ailleurs. Or, depuis l’introduction du CST à Bruxelles, le taux de vaccination n’a augmenté que de 2%. Le CST n’est donc pas, à Bruxelles en tout cas, le moyen de faire en sorte que les non-vaccinés se fassent vacciner. Pendant ce temps, les indépendants des secteurs concernés souffrent de cette mesure ».

Le SOS des médecins en détresse

Dans les hôpitaux, rien ne va mieux. Ces dernières semaines, nous assistons partout, et ailleurs en Europe, à une hausse importante du nombre de contaminations. Avec pour conséquence aussi, une hausse du nombre des hospitalisations et des admissions en soins intensifs. À l’heure actuelle, les soins intensifs accueillent 533 patients et selon les modèles prévisionnels, on devrait atteindre les 300 hospitalisations par jour d’ici la fin de la semaine.

Les coupoles hospitalières demandent également d’envisager la vaccination obligatoire de l’ensemble de la population et de ne plus repousser le débat sociétal en la matière.

Christophe Happe, Directeur général de la fédération de l’accueil, de l’accompagnement, de l’aide et des soins aux personnes (UNESSA).

D’après ces mêmes modèles, cette situation ne risque pas de s’améliorer. Voilà pourquoi le comité Hospital & Transport Surge Capacity (HTSC), l’organe qui surveille les hospitalisations en Belgique, a décidé de faire passer les hôpitaux en phase 1B d’ici le 19/11, ce qui signifie qu’ils doivent consacrer 50 % des lits en soins intensifs et quatre à six fois ce nombre de lits en hospitalisation conventionnelle pour la prise en charge de patients Covid-19.

« Le dernier changement à ce niveau (soit 33 % d’occupation) a eu lieu il y a seulement 6 jours. La vitesse à laquelle l’on passe d’une phase à l’autre en dit long, avec en prime une énorme pression sur les hôpitaux. Les interventions planifiables devront être reportées, les salles d’opérations seront pour beaucoup fermées et les interventions complexes qui requièrent une admission ultérieure en soins intensifs ne pourront tout simplement plus avoir lieu », commente, au nom de toutes les coupoles hospitalières belges, Margot Cloet, administrateur délégué, Zorgnet-Icuro, Dieter Goemaere, Directeur hôpitaux généraux, GIBBIS, Yves Smeets, Directeur général, Santhea, Christophe Happe, Directeur général, UNESSA.

Le manque de personnel amène les hôpitaux à supprimer de plus en plus de lits. Pour l’instant, cette suppression concerne 136 lits en soins intensifs et 1744 lits en soins conventionnels

L’afflux de patients Covid n’est pas le seul souci des hôpitaux. Le manque important de personnel crée en effet une situation des plus pénibles. Les raisons à cette pénurie sont diverses : bon nombre de personnes sont contaminées en raison de l’importante circulation du virus dans la société ou doivent tout simplement respecter une quarantaine.
S’y ajoutent les nombreuses infections ordinaires et l’absentéisme pour cause de maladie de moyenne/longue durée en raison de la fatigue intense accumulée par ces personnes depuis mars 2020.

Le manque de personnel amène les hôpitaux à supprimer de plus en plus de lits. Pour l’instant, cette suppression concerne 136 lits en soins intensifs et 1744 lits en soins conventionnels car les prises en charges ne peuvent plus être assurées. Et ces chiffres ne font qu’augmenter.

Les médecins généralistes tirent également la sonnette d’alarme depuis quelques semaines. Ils ne parviennent plus à suivre le rythme avec un nombre de patients Covid tellement important qu’ils ne peuvent plus administrer les soins généraux. Les urgences déjà bien surchargées doivent à présent s’occuper des patients souffrant de troubles ordinaires non urgents puisque les médecins généralistes sont eux aussi surchargés. Un cercle vicieux s’installe et menace de plus en plus de faire chavirer le système des soins de santé.

Les mesures sanitaires adoptées il y a quelques semaines semblent n’avoir que peu, voire aucun effet. Qui sait si les mesures annoncée lors du Comité de concertation (Codeco) avancé à ce mercredi  changeront la donne. Mais avec quelles conséquences socio-économiques… une fois encore

C’est dans ce contexte que les hôpitaux belges demandent instamment au comité de concertation de prendre des mesures radicales et durables, que la population est capable de respecter sur une période suffisamment longue. Dans ce cadre, les avis des experts du GEMS sont indicatifs. « Les coupoles hospitalières demandent également d’envisager la vaccination obligatoire de l’ensemble de la population et de ne plus repousser le débat sociétal en la matière ».

Les hôpitaux se tournent également vers la population : « La solution est en grande partie entre nos mains. Tout le monde peut contribuer à la préservation du système des soins de santé en se faisant vacciner, en respectant les gestes barrières et en limitant le nombre de ses contacts. Nous aurons tous un jour ou l’autre besoin de soins », poursuit la coupole hospitalière par voie de communiqué.

« Aujourd’hui, nous ne sommes plus en mesure d’offrir les soins auxquels toute personne a droit. Le yo-yo Covid hypothèque bien trop souvent les moteurs de notre système de soins : le savoir-faire et la résilience de nos prestataires de soins. Sans eux, nous ne sommes rien.»

Le retour au Télétravail obligatoire n’est pas cohérent

Enfin, à la veille du Codeco de ce mercredi 17 novembre qui devrait annoncer un durcissement des mesures sanitaires dans notre pays, alors que pour une fois, le bourgmestre de Charleroi Paul Magnette pousse un coup de gueule exaspéré par une « cacophonie sans nom de mesures différentes en fonction des régions » et réclame la vaccination obligatoire, pour tous les Belges dès 18 ans, « seule solution cohérente selon lui contre le rebond épidémique », l’Union Wallonne des Entreprises regrette, elle, la coude menace du  (re) passage au télétravail obligatoire et généralisé.

Depuis mars 2020, les analyses scientifiques n’ont pas révélé une hausse des contaminations sur les lieux de travail ; le télétravail obligatoire est donc une mesure inutile et aux effets indirects contre-productifs

Les entreprises sont bien évidemment conscientes de la nécessité de mettre en place, de manière urgente, de nouvelles mesures afin de faire barrage à la nouvelle progression inquiétante des contaminations, de protéger les capacités hospitalières – problématique qui remonte déjà à un an et demi –  et de ne pas alourdir encore la charge du travail de tous les personnels de santé.

Cependant, l’UWE rappelle tout d’abord que les entreprises respectent le guide sanitaire et que le télétravail n’a jamais cessé d’être fortement privilégié dans toutes les situations où il était possible… Néanmoins, rendre le télétravail obligatoire est une mesure incohérente. « A aucun moment depuis mars 2020, les analyses scientifiques n’ont révélé une hausse des contaminations sur les lieux de travail. Rendre le télétravail obligatoire est donc une mesure inutile et aux effets indirects contre-productifs », estime l’Union Wallonne des Entreprises.

Et le bien-être mental dans tout ça ?

L’UWE insiste également sur l’importance d’un ensemble de mesures cohérentes afin d’en faciliter la lisibilité et d’augmenter l’adhésion de la population.
Comme le souligne Olivier de Wasseige, Administrateur délégué et Directeur général UWE : « Nous nous sommes évidemment réjouis de la reprise des activités sociales, récréatives et sportives et nous soutenons tous les acteurs de ces secteurs. Mais, à force de multiplier des mesures spécifiques pour des situations particulières de la vie professionnelle, familiale et sociale, la population risque de ne plus comprendre la logique de ces décisions asymétriques et de ne plus adhérer à leurs objectifs. Ne pas imposer aveuglément le télétravail participe donc à ce devoir de cohérence ! »

Olivier De Wasseiges, CEO de l’Union Wallonne des Entreprises.

Et de poursuivre : « Il est à craindre désormais que l’obligation de recourir au télétravail ne permette aucune avancée en matière sanitaire mais, au contraire, pénalise directement et indirectement l’activité économique. Avec, comme conséquence, un risque important pour les entreprises, leur activité, leur pérennité, et pour toutes celles et tous ceux qui y travaillent, en dépendent ou en vivent », poursuit-il.

Une telle situation qui nécessiterait la mise en place de mesures de soutien longues et coûteuses…parfaitement évitables. L’Union wallonne des Entreprises ne veut pas non plus passer sous silence l’impact important d’une telle mesure sur la santé mentale des collaborateurs. Il s’agit là d’un enjeu de première importance pour le bien-être de tous.

Afin de ne pas mettre en péril les fragiles équilibres actuels, l’UWE invite chacune et chacun, y compris donc dans les entreprises, à redoubler de prudence. Elle invite dès lors les autorités à redoubler d’efforts pour sensibiliser le plus grand nombre à la vaccination et au respect des mesures sanitaires.

On en revient dès lors au cri de ras-le-bol de l’ancien homme fort du PS et actuel bourgmestre de Charleroi :  seule la vaccination apparai, actuellement, comme étant, sans doute, l’approche la plus efficace depuis le début de la pandémie.

Photo Une: Olivier De Wasseiges, CEO de l’Union Wallonne des Entreprises.