POLITIQUE

Et le Prix du Livre politique 2021 à “De quoi le Covid est-il le nom?”


LIEGE. C’est dans le cadre de la 14ème édition de la Foire du Livre politique que le jury a récompensé, hier, à la Cité Miroir, le lauréat 2021, François Ost, auteur de « De quoi le Covid est-il le nom ? ». Qu’il soit considéré comme mâle ou femelle, qu’importe en fait,  c’est en tout cas le problème auquel est confrontée toute la Planète depuis près de deux ans. Ce bref essai en dit long sur le phénomène Covid.

Le prix  du livre politique est décerné depuis 12 ans dans le cadre de la Foire du Livre politique afin de récompenser un ouvrage qui contribue à alimenter la discussion démocratique. Cette année,  lors de la sélection finale, il était question d’homophobie, de Covid, évidemment, de profit, de coulisses politiques et de comportement électoraux.

Or, c’est l’ouvrage de François Ost, “De quoi le Covid-est il le nom?”, édition de l’Académie royale de Belgique, Collection L’Académie de Poche qui fut finalement retenu et récompensé. L’auteur, François Ost, est juriste, professeur de droit et de philosophie du droit à l’université Saint-Louis – Bruxelles, où il enseigne le droit et la philosophie du droit.  Il a également enseigné au Collège Belgique. Il est encore le fondateur et codirecteur de l’Académie européenne de théorie du droit, et président de la Fondation pour les Générations Futures.

C’est l’histoire d’une crise qui n’en finit pas

Cet ouvrage, d’une actualité brûlante aborde la pandémie, plus précisément les effets des mesures sanitaires, de leur légitimité juridique et de leur pertinence philosophique. Ainsi, donc le ou la Covid hante nos esprits, monopolise nos conversations, contrarie nos envies, nos projets et nos vies, sans parler bien évidemment, et surtout, des souffrances qu’il crée, des victimes qu’il cause, de la surcharge de travail qu’il occasionne en particulier pour les professionnels de la santé.

Alors de quoi le Covid est-il le nom ? Telle est en tout cas la question que se pose François Ost dans son ouvrage synthétique de 108 pages. Selon le jury, composés de journalistes originaires de médias divers et variés, ce titre passe-partout, osons peut-être même dire banal, n’avait pas vraiment retenu l’attention lorsqu’ils ont reçu la sélection des 6 ouvrages présentés à leur appréciation au printemps dernier.

Ceux qui ne connaissaient pas François Ost ont pu croire pour certains que sous ce titre se cachait un essai sur l’origine des coronarovirus, ceux qui le connaissaient s’attendaient par contre plutôt à un essai philosophico-juridique de haut vol à destination d’une poignée d’érudits de la cause seulement. Au final, l’essai qui a retenu l’attention du jury n’est ni l’un, ni l’autre. Si son titre, n’a pas emporté le jury, c’est sans doute pour mieux en apprécier son contenu.

Une pause intelligente pour mieux comprendre

Comme une pause dans une crise qui n’en finit pas de durer, comme une pause dans une crise qui n’en finit pas de nécessiter l’adoption de mesures exceptionnelles, dérogatoires, portant atteintes à nos libertés, désagréables et profondément coûteuses pour la bonne marche de notre société, de nos entreprises et associations, et particulièrement de nos pouvoirs et finances publics. Une pause. Un instant pour réfléchir à ce à quoi nous sommes confrontés. Un instant pour nous interroger sur la juste mesure à ne pas oublier. Pour se rappeler que notre société est organisée autour d’un corpus de règles juridiques, et que le sens du mot exception n’est pas celui de nouvelle normalité.

Une pause aussi qui explique, critique mais ne condamne pas aveuglément celles et ceux qui ont dû décider, gérer, travailler dans un contexte inédit pour notre société occidentale organisée, dont les dirigeants n’étaient pas – à tort peut-être – vraiment préparés, et dont la science médicale a été dépourvue et dépassée face à un virus méconnu, imprévisible, imperceptible.

Mais si la pause à laquelle invite François Ost ne condamne pas aveuglément, elle n’en pas pour autant complaisante. Sans jamais tomber dans le procès facile, l’essai interroge sur nos choix en matière de financement des soins de santé, sur nos modes de vie, sur la puissance des sociétés pharmaceutiques ou encore sur l’espace laissé par les villes à la nature.

L’essai nous ramène aussi dans la réalité de ce qu’est et doit rester un Etat de droit. Cet Etat et ce droit qui ont tant souffert de toutes les mesures d’exceptions et dérogatoires au droit constitutionnel et commun qui ont été prises, certainement le plus souvent parce qu’il le fallait, fondamentalement, mais en oubliant parfois de s’interroger sur la question de savoir si on le pouvait, juridiquement. L’ouvrage nous pousse  à nous interroger aussi sur le sens et l’importance à donner à la santé, à la jeunesse, à la vie et à la mort. Quels sont les rapports qu’il faut établir entre ces concepts, existe-t-il une hiérarchie morale ou naturelle, comment les organiser ou les faire coexister dans une société profondément bouleversée par une pandémie planétaire ?

Un bref essai qui tout ou presque

Puis il y a la question de l’argent, et celle des finances publiques en particulier. La crise sanitaire a balayé tous les dogmes établis sur l’équilibre des finances publiques, l’importance de lutter contre les déficits et les risques que fait peser la dette sur l’avenir des Etats et de leurs populations. Mais cette liberté retrouvée de dépenser sans compter est-elle une nouvelle réalité pérenne ou une fiction de laquelle il va falloir sortir au plus vite pour éviter des lendemains bien douloureux ?

Toutes ces questions, François Ost les aborde avec intelligence, équilibre mais aussi une bonne dose de modestie. Car l’essai qu’il nous livre entend moins répondre à tout que de s’assurer que toutes les bonnes questions soient posées, et inviter à y répondre dans le cadre d’un débat démocratique et profondément politique, dans le bon et le meilleur sens du terme.

C’est pour toutes ces raisons qu’il est apparu au jury du prix livre politique que l’ouvrage de François Ost avait toutes les qualités pour recevoir le prix 2021