Ressources naturelles : 10 ans d’emprisonnement pour les dommages environnementaux graves
La criminalité environnementale est la quatrième activité criminelle au monde derrière le trafic de stupéfiants, la traite des êtres humains et la contrefaçon. Or, nos ressources ne sont pas inépuisables. L’UE veut durcir les sanctions. La Commission européenne demande des peines plus sévères, notamment une peine de prison maximale de 10 ans, et l’élargissement du champ d’application de la directive européenne sur la criminalité environnementale pour couvrir de nouveaux domaines tels que le commerce illégal du bois. Un projet qui s’inscrit dans le débat sur la reconnaissance internationale d’un crime d’ « écocide ».
L’exploitation criminelle des ressources naturelles de la planète affecte nos existences, des aliments que nous consommons à l’air que nous respirons. Or, les ressources naturelles ne sont pas inépuisables. Les crimes environnementaux les plus graves comprennent le trafic illicite de déchets et d’espèces sauvages, la criminalité liée à la pollution et le commerce illicite de substances dangereuses. Les auteurs d’atteintes à l’environnement constituent une menace grave pour nos existences, notre planète et les générations futures. Les frontières ne permettent pas de confiner la criminalité environnementale, qui englobe le trafic d’ivoire, la surpêche d’espèces protégées, l’exploitation illégale du bois, et le déversement de déchets dangereux. Les itinéraires empruntés pour la contrebande d’espèces sauvages entre les pays et les continents sont aussi souvent utilisés pour le trafic d’armes, le trafic de drogues et la traite d’êtres humains. La criminalité environnementale va souvent de pair avec d’autres infractions comme la fraude de passeport, la corruption, le blanchiment d’argent, et même le meurtre. L’Europe entend donc sévir.
Trop peu de poursuites
La criminalité environnementale est actuellement couverte par la directive Directive 2008/99/CE — Protection de l’environnement par le droit pénal (Link vers : https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=LEGISSUM%3Aev0012). En vertu de cette législation, tous les pays de l’UE doivent appliquer des sanctions pénales effectives, proportionnées et dissuasives pour les crimes contre l’environnement lorsqu’ils sont commis intentionnellement ou par négligence grave. Le fait d’inciter à commettre de manière intentionnelle un crime contre l’environnement ou de s’en rendre complice est également passible de sanctions en tant qu’infraction pénale.
Cependant, l’exécutif européen estime que les sanctions et les poursuites ne sont pas toujours assez dissuasives. Elle vient donc de proposer une révision du texte obligeant les États membres à réprimer les crimes contre l’environnement. « Trop souvent en Europe, il n’existe pas de véritable sanction pour les crimes environnementaux. Les auteurs de ces crimes peuvent rester impunis et il y a trop peu de mesures incitant à respecter la loi », a déclaré le commissaire européen à l’Environnement, Virginijus Sinkevičius, qui a présenté la proposition le 15 décembre dernier.
Un durcissement des sanctions
La proposition de la Commission prévoit une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à dix ans si l’infraction est susceptible de causer ou a causé la mort ou bien si elle a entraîné des blessures graves. En ce qui concerne les entreprises, une sanction financière pouvant atteindre 5 % du chiffre d’affaires global est prévue. Le champ d’application de la directive a également été élargi pour inclure des activités telles que le commerce illégal du bois, le recyclage illégal des navires ou encore le captage illégal de l’eau.
Parallèlement, la Commission européenne souhaite améliorer les poursuites et les mesures de dissuasion en coopérant avec les autorités nationales chargées de l’application de la législation en place pour lutter contre les infractions. Il s’agit notamment de proposer des formations et de donner plus de ressources aux inspecteurs, aux policiers, aux procureurs et aux juges afin de rendre les enquêtes et les procédures pénales plus efficaces.
Un soutien aux militants écologistes
La proposition prévoit également un soutien aux militants écologistes, qui risquent parfois leur vie pour défendre la nature, avec une obligation pour les États membres de l’UE d’aider ceux qui signalent des infractions environnementales. L’écocide n’est pas non plus actuellement considéré comme un crime au regard du droit européen, ce que le Parlement européen pourrait décider de réclamer lors des négociations avec les États membres de l’UE sur la révision de la directive relative à la criminalité environnementale.
L’Union européenne n’est cependant pas partie prenante au Statut de Rome régissant la Cour pénale internationale. Il est donc inhabituel que des crimes soient réglementés au niveau de l’UE. Dans la mesure où les infractions environnementales relèvent souvent du crime organisé et entraînent des répercussions au-delà des frontières nationales, la Commission européenne a néanmoins décidé d’intervenir. Toutefois, une fois la législation adoptée, il appartiendra aux États membres de l’UE de la faire appliquer. Son succès ou son échec dépendra de la manière dont ces derniers s’y prendront.