JEUX EN LIGNE

L’essor des jeux en ligne durant la pandémie ne se confirme pas dans un contexte de crise

La crise économique pénalise le secteur des jeux en ligne. Crédit: Ladbrokes

La pandémie et les différentes restrictions imposées, dont le confinement, ont vu une hausse du temps passé en ligne, et pas seulement pour le travail. Certains secteurs en ont tiré profit, comme le monde du jeux vidéo et les sites de jeux d’argent en ligne qui ont enregistré des records d’audiences, comme des records de mise en 2020 et 2021. Avec la fermeture des casinos, ceux qui y jouaient se sont repliés sur les web. Et ceux, qui n’y jouaient pas, ont, peut-être, découvert un nouveau passe-temps. Un constat qui fait crier au loup, le ministre de la Justice, Vincent Van Quickenborne (Open VLD), en croisade contre le secteur depuis plusieurs mois. Il est toutefois nécessaire de nuancer ces augmentations constatées. L’entreprise Entain, anciennement GVC Holdings, spécialisée dans les paris sur Internet et propriétaire de Ladbrokes, a revu ses prévisions à la baisse pour 2022. La hausse des prix du carburant et de la nourriture oblige désormais les clients à réduire les dépenses non essentielles. Ce qui tend aussi à démontrer l’absence d’addiction dans le chef de la majorité des joueurs lorsqu’il faut faire des choix.

Ladbrokes est une marque internationale qui est exploitée en Belgique par la société DERBY S.A., laquelle est une filiale de la multinationale Entain Holdings PLC. Cotée à la bourse de Londres, l’entreprise londonienne qui existe depuis 1886, a dû revoir ses prévisions de revenus à la baisse. Les parieurs en ligne dépensent moins d’argent en raison de la compression du coût de la vie, a affirmé l’entreprise par voie de communiqué, ce qui a fait chuter le prix de l’action de la société.

 Une chute de 7% au deuxième trimestre

Entain, qui prévoyait en mars 2022 une croissance annuelle du chiffre d’affaires net des jeux en ligne dans une fourchette moyenne à haute, a déclaré qu’ « un environnement macroéconomique plus faible réduisait le taux de dépense des clients, modérant ainsi la croissance globale en ligne ». Le revenu net des jeux en ligne d’Entain, qui possède également les boutiques de paris, Coral, et les marques en ligne, bwin et partypoker, a ainsi chuté de 7 % au deuxième trimestre de cette année.

Un environnement macroéconomique plus faible réduisait le taux de dépense des clients, modérant ainsi la croissance globale en ligne.

Le groupe de paris, qui compte plus de 15.000 collaborateurs à travers le monde et alimente de facto l’économie de marché, a précisé que ses perspectives de recettes nettes des jeux pour l’ensemble de l’année ne comprenait pas, à ce stade, une éventuelle nouvelle baisse de ses revenus liée à un contexte d’incertitude réglementaire au Royaume-Uni, comme dans d’autres pays du groupe. La Grande-Bretagne devrait, comme cela est en cours en Belgique, publier prochainement de nouvelles règles en septembre prochain, après avoir introduit plusieurs règles ces dernières années, notamment un plafonnement de la mise maximale, des contrôles d’âge et d’identité plus stricts pour les jeux en ligne et un soutien accru pour les personnes qui deviennent dépendantes.

Moins de pouvoir d’achat

Avec le déconfinement et la crise déclarée en Ukraine qui plombe le pouvoir d’achat, il y a donc moins de joueurs en ligne, ce qui préjudicie le secteur. Ce constat pose aussi la question du jeu problématique. Quels en sont ses ressorts ? Comme toutes les dépendances, celle-ci peut être le résultat de plusieurs facteurs. Parmi eux : la génétique de la personne dépendante, comme sa personnalité et son environnement. Addiction Vs économie de marché : les jeux d’argent et de hasard se situent à la croisée d’intérêts antagonistes qui entrent inévitablement en conflit. Ces jeux, quelle que soit leur nature, comportent tout à la fois un risque d’addiction pour les joueurs et représentent, depuis toujours, un intérêt financier non négligeable pour l’Etat. La régulation du secteur exprime donc cet équilibre à devoir trouver entre des joueurs à conserver et des addicts à traiter.

 Un poids, deux mesures

S’il est malheureux que les conséquences du jeu soient néfastes et préjudiciables pour une faible partie des joueurs, les jeux présentent un risque dans l’absolu, qu’ils soient proposés par l’opérateur public, soit la Loterie Nationale, ou par les opérateurs privés et qu’ils soient proposés de manière virtuelle ou de manière physique (tirage, grattage, etc.). Curieuse position donc que celle du ministre Van Quickenborne (Open VLD) de défendre la protection de la santé publique pour étrangler le secteur privé des jeux en ligne et, dans le même temps, d’en négliger d’autres aspects impactants, lorsqu’il s’agit de la Loterie Nationale, alors que ce sont pourtant, à l’évidence, des combats similaires. On évoque beaucoup en cette période la construction de « l’après » crise économique, ne serait-il pas le bienvenu de s’intéresser au « pendant » ? Cela permettrait, à tout le moins, de garantir la viabilité économique du secteur légal en évitant un cadre législatif et règlementaire trop strict imposé au seul secteur privé.