DISPARITION

L’avocat et ancien ministre français de la justice, Robert Badinter, est mort

AFP

Son nom est entré dans l’histoire à jamais comme l’homme qui a obtenu de la France l’abolition de la peine de mort. Infatigable plaidoyer, puis ministre de la Justice sous François Mitterrand, Robert Badinter, aussi un ardent un défenseur des droits des minorités, s’est éteint la nuit dernière, à l’âge de 95 ans. Depuis l’annonce de sa disparition, les hommages politiques ne cesse de pleuvoir et d’ores et déjà, le président Macron a annoncé un hommage national.

Robert Badinter s’en est allé la nuit dernière, c’est ce que nous apprenions, ce vendredi, en fin de matinée. Celui que l’on peut qualifier de l’homme aux mille vies a en effet un parcours qu’il est difficile de résumer en quelques lignes. Pourtant, c’est ce que s’est essayé à faire le président Emmanuel Macron qui lui rendait hommage ce matin sur X:

L’ancien ministre de Mitterrand ici avec Emmanuel Macron. X.com

Le président, actuellement en déplacement, a annoncé que Robert Badinter bénéficiera d’un hommage national et qu’il est actuellement en discussion avec la famille Badinter pour une éventuelle panthéonisation. D’autres personnalités politiques ont, elles aussi, formulé leurs hommages.

François Ruffin de la France Insoumise a dit sur X: « Victor Hugo l’avait rêvé, Robert Badinter l’a fait : l’abolition de la peine de mort. Une grande figure morale disparaît. Condoléances à sa famille, ses proches. » Jordan Bardella du Rassemblement National s’est lui aussi exprimé sur X ce matin : « Ancien ministre de la Justice, homme de lettres, Robert Badinter a défendu toute sa vie ses idéaux, avec constance et éloquence. »

Qui était Robert Badinter?

Né à Paris, en 1928, ce qui a marqué la vie de Badinter, c’est d’abord, son rapport compliqué à Dieu. Après la perte de son père et de ses deux grands-parents paternels dans les camps de concentration, il avouera avoir perdu la foi après le décès de ses proches aux mains des nazis. Il ne fêtera donc jamais sa Bar-mitsva, cependant, il épousera tout de même Élisabeth Bleustein-Blanchet en seconde noce, à la synagogue.

Après des études de droit, il se lance dans une carrière brillante d’avocat pénaliste. Parallèlement, en 1946, il rencontre un certain François Mitterrand avec qui il se liera d’amitié. Amitié qui sera déterminante pour sa carrière politique.

Parce qu’aucune justice ne peut être absolument infaillible, la peine de mort est moralement inacceptable.

Mais ce qui a fait rentrer Badinter dans les livres d’histoire, c’est le grand combat qu’il mènera pour l’abolition de la peine de mort. Celui qui, tout au long de sa carrière d’avocat, a sauvé la tête de 6 condamnés, s’est toujours opposé de manière farouche à la peine de mort.
Dans son discours prononcé en septembre 1981, peu après sa nomination en tant que garde des Sceaux sous le nouveau président de gauche, François Mitterrand, il s’exclamera : « Parce qu’aucun homme n’est totalement responsable, parce qu’aucune justice ne peut être absolument infaillible, la peine de mort est moralement inacceptable. »

La Bibliothèque nationale de France (BNF) a publié ce matin, le manuscrit complet de ce discours historique sur X:

Capture d'écran sur X

Comme le rappelle son ancien collègue, l’ancien ministre de la Culture Jack Lang, Badinter n’était pas seulement un symbole de l’abolition de la peine de mort, mais aussi un défenseur des droits des minorités : «Il est celui qui, à la mort de François Mitterrand, a dépénalisé l’homosexualité.» Combat souligné par l’association LGBT, SOS Homophobie, qui eux aussi rendent hommage à Badinter :

https://x.com/SOShomophobie/status/1755923418560487877?s=20

Robert Badinter avait en effet exprimé à l’époque en toute simplicité : « Je déteste les lois d’exception. »

Mais la vie de Robert Badinter c’était aussi son histoire d’amour avec la tout aussi iconique Élisabeth Badinter qu’il avait épousée en 1966. Elle-même agrégée de la Sorbonne, grande défenderesse de la cause féministe, et qui, sans être dans l’ombre de son mari, l’a accompagné jusqu’à son dernier souffle, avait déclaré de lui en 2016 : «  Un homme qui est heureux quand il arrive quelque chose d’heureux à sa femme, pour moi, c’est un féministe ».

L’homme de 95 ans laisse derrière lui donc une veuve et 3 enfants, mais aussi tout un pays endeuillé pour lequel il s’est battu toute sa vie, pour que la France soit digne de sa devise: Liberté, Égalité, Fraternité.

Léna JOB