La ministre-Présidente, Elisabeth Degryse, tacle avec tact Georges-Louis Bouchez sur la culture
Journaliste – Rédacteur en chef.
Dans un entretien du week-end accordé au quotidien « Le Soir », le président du MR semble plaider pour une suppression du ministère de la Culture. « J’ai mon idée en termes de modèle politique idéal. Je ne vois pas pourquoi on a un ministre de la Culture. Il n’y en a pas aux Etats-Unis et la culture américaine domine le monde », a confié Georges-Louis Bouchez confié à nos confrères. Avant de faire sa déclaration, il prévenait qu’il allait jeter un « pavé dans la mare ». Les réactions politiques n’ont pas tardé notamment celle de la ministre-Présidente du Gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles, Elisabeth Degryse (Les Engagés), en charge de la Culture. « Il nous faut un ministère de la Culture comme chef d’orchestre doté d’une volonté qui garantit la défense de l’intérêt général et le respect de la diversité culturelle. (…). Aujourd’hui, nous courons le risque majeur d’une culture anglo-saxonne dominante empêchant les autres cultures de langues d’être découvertes par les algorithmes. Au rêve américain, je préfère défendre notre originalité culturelle inhérente à notre histoire et à nos identités », a-t-elle réagi sur le réseau X (ex-Twitter). A noter que Les Engagés sont les partenaires du MR au sein de l’exécutif communautaire. Elle précise par ailleurs que « la culture est essentielle, elle nous donne à comprendre, nous construire et nous divertir ». Secrétaire de la Fédération européenne des journalistes (FEJ), Ricardo Gutiérrez, reproche au président du MR de « mépriser un secteur économique quoi génère 5% du PIB » et qui emploie 250.000 travailleurs.
En accordant un entretien à nos confrères du « Soir », publié le samedi 4 janvier 2025, Georges-Louis Bouchez se doutait bien que des éléments de sa sortie ne passeraient pas inaperçus et qu’ils susciteraient diverses réactions. Il faut dire que les déclarations du président des Libéraux francophones entraînent souvent, voire toujours, une levée de boucliers, car l’homme ne tourne pas autour du pot pour dire ce qu’il pense.
Je ne vois pas pourquoi on a un ministre de la Culture. Il n’y en a pas aux Etats-Unis, et la culture américaine domine le monde, et pas seulement les blockbusters, ceux-ci financent le cinéma d’auteurs.
Dans l’entretien, il partage une réflexion sur la culture en faisant une comparaison avec la situation aux USA. « Si vous voulez un pavé dans la mare, moi, je ne vois pas pourquoi on a un ministre de la Culture. Il n’y en a pas aux Etats-Unis, et la culture américaine domine le monde, et pas seulement les blockbusters, ceux-ci financent le cinéma d’auteurs », a confié Georges-Louis Bouchez.
Mépris pour les 250.000 travailleurs
Cette partie de l’entretien n’a pas tardé à susciter des réactions. « Quel mépris pour un secteur économique qui génère, en Belgique, 5% du PIB. Quel mépris pour les 22.000 employeurs et les 250.000 travailleurs (dont 56.000 indépendants) des industries culturelles et créatives belges, y compris les médias », a commenté dès samedi Ricardo Gutiérrez, secrétaire général de la Fédération européenne des journalistes (FEJ).
Quel mépris pour les 22.000 employeurs et les 250.000 travailleurs (dont 56.000 indépendants) des industries culturelles et créatives belges, y compris les médias.
Dans la foulée, il accuse le président du MR d’emboîter le pas à d’autres dirigeants d’extrême droite qui n’ont de cesse de s’en prendre à la presse, notamment aux USA, en Hongrie, en Slovaquie, en Slovénie et en Grèce. « Un discours qui s’inscrit dans la droite ligne des néo-conservateurs illibéraux (Trump, Orban, Fico ; Jansa, Mitsotákis…), qui ont tous pour point commun la haine du journalisme et des médias », précise Ricardo Gutiérrez, ancien journaliste au Soir.
Un chef d’orchestre
Son post sur Facebook a suscité de nombreux commentaires qui vont pratiquement tous dans le sens d’une dénonciation de la position du président des Libéraux francophones.
Dimanche 5 janvier 2025, c’est la ministre-présidente du Gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles, Elisabeth Degryse (Les Engagés) qui vendait d’une sortie sur le réseau X (ex-Twitter) fustigeant, avec tact, les déclarations du président du MR, sur la culture. Pour rappel, les deux partis sont partenaires au sein du gouvernement communautaire francophone et Elisabeth Degryse a la culture dans ses compétences. « Une société, une histoire, une CULTURE n’est pas l’autre. Il nous faut un ministère de la Culture comme chef d’orchestre doté d’une volonté qui garantit la défense de l’intérêt général et le respect de la diversité culturelle », écrit-elle.
Il nous faut un ministère de la Culture comme chef d’orchestre doté d’une volonté qui garantit la défense de l’intérêt général et le respect de la diversité culturelle.
Elisabeth Degryse poursuit son communiqué en rappelant qu’il ne faut pas associer une valeur marchande à la culture et cite André Malraux, résistant, romancier et ancien ministre de la Culture du général de Gaulle. « La CULTURE ne peut être laissée à la seule économe de marché, à l’audience, au nombre de clics. Le ministre de la Culture incarné à l’époque par André Malraux est une instance qui est le dépositaire de cette diversité en ne s’enfermant pas dans une logique d’archiviste, de glorification du passé, mais en soutenant la diversité vivante et la création », poursuit-elle.
Elisabeth Degryse convoque Malraux et Sarkozy
L’ancienne vice-présidente de la Mutualité chrétienne qui a participé pour la première fois aux élections fédérales sous la bannière des Engagés en décrochant un mandat de députée cite un autre politique français, appréciée par Georges-Louis Bouchez.
Il s’agit de Nicolas Sarkozy, alors Président de la République, et qui relevait l’importance de la culture dans un discours prononcé en 2012. « Plus la tempête est forte, plus le vent souffle, plus la Culture doit nous servir de boussole. La Culture, c’est la réponse française à la crise. Je devrais dire aux crises. A la crise des valeurs. La Culture nous fournit un héritage, des repères, un monde commun à partager. Il est capital de comprendre qu’en face d’une crise sans précédent, le choix de la France, c’est de s’appuyer sur sa politique culturelle », avait déclaré Nicolas Sarkozy, cité par Elisabeth Degryse dans son communiqué.
Au rêve américain, je préfère défendre notre originalité culturelle inhérente à notre histoire et à nos identités.
Elle rappelle que « la CULTURE est essentielle, elle nous donne à comprendre, nous construire et nous divertir ».
Avant de conclure : « Nous avons besoin d’un ministère de la Culture pour apporter cette plus-value culturelle au niveau de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Le marché, l’économie, le mécénat ne peuvent être seuls à donner l’impulsion. Loin des canons et cultures monolithiques, la nôtre se veut diverse. Aujourd’hui, nous courons le risque majeur d’une culture anglo-saxonne dominante empêchant les autres cultures de langues d’être découvertes par les algorithmes. Au rêve américain, je préfère défendre notre originalité culturelle inhérente à notre histoire et à nos identités ».