CINQ ANS APRES LE BREXIT

Brexit : une rupture dont les effets négatifs continuent à peser sur l’économie brtitannique

Le Brexit continuent à peser négativement sur l'économie britannique, 5 ans après la sortie de l'Union européenne. AFP

Loin d’être résolus, les effets du Brexit compliquent toujours la vie des acteurs économiques et politiques britanniques depuis la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne le 31 janvier 2020. L’impact sur l’économie est d’ailleurs jugé préoccupant.  Et ils devraient encore se faire sentir pendant plusieurs années. La nécessité de revoir les accords bilatéraux et de renforcer la coopération sur des sujets cruciaux comme la sécurité ou le changement climatique persistera encore longtemps. « Il s’agit d’un processus vaste et complexe », concède Anan Menond, directeur du groupe de réflexion UK in a Changing Europe (UKICE), lors de la présentation d’un rapport, mardi dernier, pour le cinquième anniversaire de la rupture, survenue le 31 janvier 2020 après le référendum de 2016. « La relation entre le Royaume-Uni et l’UE continuera d’évoluer, que les textes juridiques qui la régissent – l’accord de retrait et l’accord de commerce et de coopération – soient formellement révisés ou non », a-t-il ajouté.

Le Brexit trouve son origine dans le référendum du 23 juin 2016, où 51,9% des électeurs britanniques ont choisi de quitter l’Union européenne. La procédure de retrait, lancée officiellement le 29 mars 2017 avec l’activation de l’article 50 du traité sur l’Union européenne, a entraîné une série de négociations complexes entre le Royaume-Uni et l’UE.

Ces discussions ont culminé avec la signature d’un accord visant à organiser le retrait effectif du Royaume-Uni du bloc communautaire, un processus qui allait marquer le début d’une nouvelle ère pour les deux parties.

L’étude, rédigée par plusieurs experts, examine l’impact du Brexit, qu’ils jugent à la fois négatif et, à certains égards, moins grave que prévu.

L’étude, rédigée par plusieurs experts, examine l’impact du Brexit, qu’ils jugent à la fois négatif et, à certains égards, moins grave que prévu. Si l’effet sur l’économie britannique reste préoccupant, les experts soulignent que les conséquences pourraient être moins dramatiques que ce qu’on redoutait.

Le rapport met également en garde contre les éventuels écueils que pourrait rencontrer le Gouvernement travailliste dans la renégociation de ses relations avec l’UE.

Les perspectives d’une nouvelle relation avec l’UE

Depuis son arrivée au pouvoir le 4 juillet 2024, le Premier ministre britannique, Keir Starmer, a exprimé sa volonté de renforcer les liens avec les Vingt-Sept pays de l’Union européenne. Toutefois, cette démarche reste « assez floue », selon les experts.

En partie, cette ambiguïté découle du souhait de Keir Starmer de ne pas réactiver un débat qui pourrait nuire au Parti travailliste, notamment en attirant des voix vers le Parti conservateur ou l’extrême droite de Reform UK.

Les propositions actuelles du Gouvernement travailliste s’articulent autour de la conclusion d’un pacte sanitaire et phytosanitaire visant à réduire les frictions commerciales, des améliorations pour les artistes en tournée, une harmonisation des qualifications professionnelles et d’une collaboration renforcée en matière de défense.

Un retour au marché unique, à l’union douanière et à la liberté de circulation est exclu.

« Un retour au marché unique, à l’union douanière et à la liberté de circulation est exclu », a précisé Simon Usherwood. Selon lui, cette approche déboucherait sur un accord « limité, technique, et de faible impact ».

De plus, contrairement à l’époque des négociations sur le retrait et les accords commerciaux, il n’y a désormais plus de pression urgente pour agir, a-t-il ajouté.

Des opportunités à saisir, mais des obstacles persistent

Toutefois, de nombreuses opportunités se présentent dans les mois à venir pour rapprocher le Royaume-Uni et l’UE. Parmi celles-ci, une réunion informelle des dirigeants européens (elle a eu lieu le 3 février à Bruxelles), et un sommet Royaume-Uni-UE à venir. Ce sommet marquera la première fois qu’un dirigeant britannique se joint aux 27 leaders européens depuis le départ officiel du Royaume-Uni de l’UE, il y a cinq ans.

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Keir Starmer (à gauche sur la photo) et le président du Conseil européen, Antonio Costa, lors du passage du Premier ministre britannique à Bruxelles le 3 février 2025. (Photo par Olivier HOSLET / POOL / AFP).

Mais certains obstacles subsistent, notamment des différends juridiques sur la pêche, les droits des citoyens communautaires, et l’absence d’accord sur le statut de Gibraltar après le Brexit. De plus, la position de Keir Starmer vis-à-vis de l’UE pourrait être influencée par les résultats des élections municipales de mai 2025 et par les stratégies géopolitiques, notamment celle de Donald Trump.

Une économie en transformation lente, mais marquée par le Brexit

L’effet du Brexit sur l’économie britannique n’a pas pris la forme d’un choc brutal, mais d’une « crevaison lente », observe l’économiste Jonathan Portas lors de la présentation du rapport. Bien que le Bureau de la responsabilité budgétaire prévoie une réduction de 4 % de la productivité à long terme, les effets concrets du Brexit se sont révélés moins dramatiques que prévu.

Si les exportations de biens ont diminué, celles de services ont, quant à elles, augmenté de 7,5 % par an.

Si les exportations de biens ont diminué, celles de services ont, quant à elles, augmenté de 7,5 % par an, propulsant le Royaume-Uni au rang de grande puissance derrière les Etats-Unis. Le retrait de l’UE a cependant entraîné une chute des investissements dans le pays, le nouveau Fonds national de richesse britannique n’ayant pas les moyens de rivaliser avec la Banque européenne d’investissement (BEI).

Une des « surprises » du Brexit a été l’effet positif du nouveau système d’immigration, qui n’accorde plus la priorité aux citoyens européens. Selon les experts, cela a contribué à stimuler l’emploi et la croissance du PIB britannique.

Un paysage politique en mouvement

Sur le plan politique, le Parti libéral-démocrate, troisième force parlementaire, a récemment réaffirmé ses positions pro-européennes, réclamant un retour à l’union douanière et formant un front commun contre Donald Trump.

Ce retour des libéraux pro-européens pourrait représenter un défi supplémentaire pour le Premier ministre britannique qui devra non seulement gérer la pression de la droite europhobe, mais aussi celle des libéraux, plus favorables à un rapprochement avec l’UE.

Cinq ans après la rupture, le Brexit semble avoir donné naissance à une nouvelle ère de doutes et de réajustements. Le Royaume-Uni, dans sa quête de redéfinition, s’engage dans un processus de transformation qui pourrait durer bien plus longtemps que prévu.

Alexander Seale (à Londres)