CRISE DE L'AZOTE EN FLANDRE

Crise de l’azote : Après le succès du BBB aux Pays-Bas, la N-VA maintient l’accord quand CD&V entend le signal

La ministre flamande de l'Environnement et de l’Energie, Zuhal Demir (N-VA à gauche sur la photo) et son homologue de l'Economie et de l'Agriculture Jo Brouns (CD&V, à droite) n’ont pas la même interprétation de l’impact des résultats des élections provinciales aux Pays-Bas sur la question de l’azote en Flande. BELGA

Le cabinet du ministre flamand N-VA de l’Environnement Zuhal Demir « ne voit pas la pertinence pour la Flandre » de la victoire retentissante du parti paysan néerlandais, le BBB, lors des élections provinciales. Le collègue de Zuhal Demir en charge de l’Agriculture, Jo Brouns (CD&V), demande quant à lui que le signal soit interprété comme une invitation à faire de « plus de bon sens ». De nouveau, la crise de l’azote au sein du Gouvernement flamand est loin d’être terminée.

Aux Pays-Bas, le parti BoerBurgerBeweging (BBB) ​​​​mené par sa fondatrice, Caroline van der Plas, a remporté les élections provinciales du 15 mars, comme prévu. Bien que le parti n’ait remporté qu’un seul siège à la Chambre des représentants lors des dernières élections législatives, il est devenu, mercredi dernier, le plus grand parti dans pas moins de dix provinces néerlandaises. Les élections provinciales auront des répercussions au Sénat néerlandais, lorsque les nouveaux élus provinciaux désigneront les candidats fin mai. Le score élevé du BBB est considéré par tous les commentateurs politiques comme un signal fort indiquant que non seulement le secteur agricole lui-même, mais aussi une grande partie de la population néerlandaise, rejette la politique actuelle du gouvernement en matière d’azote.

Ajustement en vue ?

En raison des règles strictes en matière d’émissions d’azote, il est devenu impossible aux Pays-Bas de se développer en tant qu’entreprise agricole. L’exploitation des fermes existantes est également devenue très incertaine. Dans certaines provinces néerlandaises telles que Noord-Brabant – qui borde la Flandre – il y a actuellement un gel des permis. Ce qui signifie qu’il est devenu impossible d’encore construire des infrastructures publiques ou particulières, car les valeurs d’azote présumées dans cette province sont jugées trop élevées.

On s’attend à ce que le Premier ministre néerlandais Mark Rutte – qui a également perdu avec son VVD libéral lors des élections – ajuste sa politique stricte en matière d’azote. Même si le parti libéral de gauche D66, qui forme une coalition avec Mark Rutte, a déclaré que cela ne pouvait pas du tout être le cas.

Zuhal Demir : « l’extrême droite en recul »

Comme vous avez pu lire dans nos éditions précédentes, la Flandre a une politique d’azote similaire, bien que légèrement moins stricte, à celle des Pays-Bas. Bien que la Flandre dispose officiellement d’un accord sur l’azote qui devrait éviter une situation conflictuelle des permis comme aux Pays-Bas, les partis au pouvoir N-VA et CD&V continuent d’avoir une interprétation radicalement différente de cet accord. « Le signal positif des élections néerlandaises est principalement que le parti Forum voor Democratie (FvD, droite radicale, ndlr) a perdu les élections », a déclaré Andy Pieters, porte-parole du ministre flamand de l’Environnement Zuhal Demir (N-VA). « Nous ne voyons pas la pertinence des élections néerlandaises pour la Flandre. Il y a un accord sur l’azote ici, mais pas aux Pays-Bas ».

Appel au bon sens du fermier

Cependant, son collègue, le ministre flamand de l’Agriculture Jo Brouns (CD&V), fait référence sur Twitter à une lettre ouverte qu’il a lui-même rédigée, intitulée « Meer gezond boerenverstand graag » (« Plus de bon sens, svp », aussi une allusion sur le fait que, dans la langue néerlandaise, « bon sens » est généralement traduit en Flandre comme « boerenverstand », ce qui signifie littéralement « le bon sens d’un fermier », mot utilisé par Mr Brouns, ndlr). Dans cette lettre, Jo Brouns voit les résultats des élections aux Pays-Bas principalement comme un signal fort de la population qui veut des perspectives pour les agriculteurs. « Les résultats des élections confirment ce que je ressens depuis un certain temps en Flandre. Oui, nous allons réduire l’azote, mais ça doit être accompagné par une perspective d’avenir claire pour l’agriculture et la campagne. Je suis très curieux de voir comment la politique de l’azote aux Pays-Bas évoluera », a commenté le ministre flamand de l’Agriculture, Jo Brouns.

Boire une chope

« Nous, les politiciens, devons arrêter de tout verser dans des règles inexplicables. Vouloir tout vérifier. De cette façon, nous enlevons la croyance en la politique. Les politiciens doivent être accessibles et réapprendre à parler avec les agriculteurs, les citoyens et les entreprises, plutôt qu’à leur sujet », a-t-il poursuivi. « En tant que Flamand, fier Limbourgeois et garçon de la campagne, je plaide pour plus de bon sens en politique: bosser, agir normalement et boire régulièrement une chope avec les gens. Les Flamands apprécieront cette attitude, car notre agriculture est dans l’âme de la Flandre », affirme-t-il.

Si la politique de l’azote aux Pays-Bas risque d’être radicalement remise en question sous la pression des récents résultats électoraux, la Flandre sera la seule en Europe à mener une politique agricole extrêmement stricte sur l’azote. En Wallonie, la discussion n’est pas pertinente, car le secteur agricole en Wallonie, contrairement à la Flandre, est plus axé sur le local et est soumis à des règles beaucoup moins sévères.

Christophe Degreef