EDITO

Pause dans les normes environnementales : juste du bon sens et du pragmatisme au niveau européen

Le Premierministre Alexander De Croo fait preuve de réalisme et de pragmatisme en prônant une pause dans les mesures environnementales au niveau européen. BELGA

En indiquant ce mardi 23 mai sa préférence pour une pause dans les normes environnementales au niveau européen, le Premier ministre Alexander De Croo (Open VLD) prend de court ses partenaires écologistes du Gouvernement fédéral. Et comme on pouvait s’y attendre, ces derniers n’ont pas du tout goûté à la sortie du chef de l’exécutif fédéral. Le co-président d’Ecolo, Jean-Marc Nollet, a immédiatement réagi en estimant que « les déclarations d’Alexander De Croo sont hallucinantes » et que « ce n’est pas le Premier ministre qui s’est exprimé ce soir ». Cette dernière phrase du co-président indique qu’Alexander De Croo se projette déjà dans la campagne électorale. Pour Jean-Marc Nollet, « nature, climat, environnement nécessitent au contraire une accélération des politiques de protection et de transition ».

Certes, Alexander De Croo adopte probablement une posture qui préfigure certains messages que son parti défendra lors des élections de juin 2024, mais le Premier ministre belge ne fait qu’adopter une ligne pragmatique et réaliste. Aujourd’hui, la transition énergétique et la lutte contre le réchauffement climatique sont pratiquement intégrées dans toutes les politiques d’investissement et nul ne peut les ignorer dans ses projets au risque de se retrouver au ban de la société. Mais force est de constater que beaucoup de pays européens sont allés loin dans les règlementations pour sensibiliser et obliger la population à changer de comportement. Les différents secteurs économiques, y compris l’industrie, sont aussi engagés sur la voie. Certes, il y a encore du chemin à faire, mais il est temps de faire une sorte de « pit stop » comme dans une course de Formule 1 pour digérer tout ce qui a été décidé et implémenter les différentes mesures avant de poursuivre la course contre le réchauffement climatique. A défaut, le moteur économique européen risque de s’essouffler et l’on perdra les bénéfices des actions positives engagées jusqu’à présent. L’abandon des véhicules thermiques décrété au niveau européen est une bonne chose, même s’il ne faut pas trop se focaliser sur l’échéance de 2035, car elle est irréaliste et risque de créer plus de complications qu’autre chose. La population adopte de plus en plus les véhicules électriques et des projets se concrétisent pour développer la production et l’utilisation de l’hydrogène vert.

Il est temps de faire un « pit stop » comme dans une course de Formule 1 pour digérer tout ce qui a été décidé et implémenter les différentes mesures avant de poursuivre la course contre le réchauffement climatique.

Par ailleurs, la rénovation des bâtis pour éliminer les passoires énergétiques fait l’objet d’une attention particulière dans différents pays, notamment en Belgique. L’industrie a compris qu’il faut rapatrier des activités en Europe pour garantir une production locale. Force est aussi de constater que d’après Eurostat, les émissions de CO2 ont baissé de 4% au quatrième trimestre 2022 en Europe par rapport à la même période de 2021. Ce mouvement ne fera que se poursuivre si on fait une pause et qu’on met en œuvre les mesures déjà prises.

Dire qu’il faut faire une pause dans les normes environnementales au niveau européen ne signifie qu’il faut s’arrêter et ne rien faire, ou encore moins enclencher un retour en arrière. Non. Par ailleurs, c’est un mouvement qui commence à émerger dans des pays européens, notamment en France où le président Emmanuel Macron avait pratiquement tenu les mêmes propos avant Alexander De Croo. Les résultats des récentes élections régionales aux Pays-Bas où les électeurs ont accordé leurs voix  à un petit parti populiste engagé contre le plan gouvernemental de réduction de l’azote indique que la population commence à montrer des signes d’agacement et qu’il ne faut plus trop lui imposer de nouvelles mesures environnementales au risque de la voir se rebeller totalement. La volte-face allemande sur la fin décrétée des voitures thermiques en est aussi une belle illustration d’un mouvement qu’il faut entendre et prendre en considération. Car ce n’est pas l’appel à un retour en arrière, mais juste l’illustration d’un ras-le-bol face à ce qui est perçu comme l’écologie punitive.

Dire qu’il faut faire une pause dans les normes environnementales au niveau européen ne signifie qu’il faut s’arrêter et ne rien faire, ou encore moins enclencher un retour en arrière.

Par sa sortie de ce mardi 23 mai, Alexander De Croo ne fait d’ailleurs que poursuivre dans la foulée de ses récentes déclarations à Berlin où, devant un parterre d’industriels allemands, il a vanté les mérites du nucléaire et soutenu que celui-ci fait partie de la solution atteindre la neutralité carbone en Europe. Il est désormais temps de s’arrêter pour reprendre son souffle avant de se lancer dans une nouvelle phase de mesures environnementales pour préserver l’économie qui est désormais engagée sur la voie inexorablement dirigée vers son verdissement et le bas carbone.