DANS QUELLE SITUATION SE TROUVE LA WALLONIE ?

Discours sur l’Etat de la Wallonie : Elio Di Rupo défend une région forte et engagée pour l’environnement

Le ministre-Président Elio Di Rupo a dressé un tableau positif de la Wallonie. BELGA

Dans son discours sur l’état de la Wallonie, le ministre-Président Elio Di Rupo (PS) a plaidé pour la réindustrialisation de la région et mis en avant le chemin parcouru en la matière, notamment le développement de nouvelles filières comme l’hydrogène. Il a rappelé l’engagement de la Wallonie en matière de réduction des émissions de CO2. La lutte contre la pauvreté et le chômage figurent au cœur des préoccupations wallonnes. Il a annoncé le montant de l’aide apportée aux sinistrés des inondations de juillet 2021 : 1,030 milliard d’euros. Pas de nouvelles taxes à l’horizon. Danis l’opposition, Les Engagés ont dénoncé un discours qui ne donne aucun cap et qui met en avant des éléments qui arrangent la majorité. Le PTB fustige un discours qui ne reflète pas la réalité notamment en ce qui concerne la lutte contre la pauvreté et les enjeux climatiques.

Le ministre-Président wallon, Elio Di Rupo (PS) a présenté ce mercredi 31 mai au Parlement wallon l’état de la Wallonie et ses ambitions dans un discours assez dense et fouillé. Le ton est donné dès l’entame. « La Wallonie est une Région forte. Une Région qui croit en son avenir Une Région qui prend son avenir en main. Nous avons connu de terribles crises successives. Elles renforcent la détermination du gouvernement à faire de la Wallonie une Région plus autonome et plus solide sur tous les plans. Dans ce monde incertain, la Wallonie s’adapte, se relève et se révèle être une Région dynamique au cœur de l’Europe. La Wallonie répond au défi environnemental ; au défi numérique ; au défi industriel ; au défi social enfin », a démarré Elio Di Rupo. Avant de passer en revue différents chapitres présentant un bon bulletin de la Wallonie.

Lutte contre la précarité et le chômage

La Lutte contre la pauvreté figure au premier rang des objectifs des autorités wallonnes. Il a rappelé qu’avant la formation du gouvernement régional en 2018, le risque de pauvreté était de 22%, à fin 2022, il a chuté à 17,8%. « La précarité a certes diminué depuis le début de la législature, mais elle reste malheureusement trop élevée », observe-t-il, assurant que l’objectif est de réduire de moitié d’ici 2030 (par rapport à 2015) le nombre de la population wallonne exposée au risque de pauvreté ou d’exclusion sociale.

La Wallonie est une Région forte. Une Région qui croit en son avenir Une Région qui prend son avenir en main.

Un des éléments permettant de lutter contre la précarité est l’accès à l’emploi. Mais encore faudrait-il avoir un minimum de formation. D’où la volonté du gouvernement qui a décidé de mettre l’accent sur l’amélioration de l’éducation et de la formation dans le plan de relance. « Selon l’Iweps (Institut wallon de l’évaluation, de la prospective et de la statistique, ndlr), parmi la population wallonne qui a, au moins 25 ans, le taux de pauvreté de ceux qui n’ont pas de diplôme du secondaire supérieur s’élève à 27%. Celui des diplômés de l’enseignement supérieur est de 7%. C’est pour ces raisons que le gouvernement a décidé de faire de la politique de formation LA priorité du Plan de relance », dit-il.

Chef de groupe au Parlement wallon, François Desquesnes (Les Engagés) dénonce un discours qui ne reflète pas la réalité des Wallons. BELGA

Francois Desquesnes ne partage pas le bilan enjolivé de l’état de la Wallonie. (PHOTO BELGA)

Sur le front de l’emploi, le Premier wallon estime que la région est sur une bonne voie. « L’emploi intérieur en Wallonie a crû de 2% en moyenne annuelle en 2022 par rapport à 2021, année de rattrapage post-Covid. En 2022, il y a eu en moyenne autant d’emplois qui ont été créés qu’en 2021, c’est de l’ordre de 25.000 emplois. Selon l’enquête sur les forces de travail de Statbel (institut belge des statistiques, ndlr), le taux de chômage wallon des 15 à 64 ans, au sens du Bureau International du Travail, a reculé en un an de 0,5% et s’établit désormais à 8,4% en 2022. En moyenne annuelle, le nombre de chômeurs complets indemnisés s’est réduit et est ainsi passé de 132.000 en 2021 à 123.600 en 2022 », poursuit Elio Di Rupo, évoquant au passage la situation des chômeurs de longue durée, celle des emplois vacants ainsi que des chômeurs dépourvus des compétences professionnelles requises.

Pour inciter les chômeurs à se former afin d’augmenter leur chance de réinsertion sur le marché de l’emploi, le gouvernement investit dans la politique de formation. A titre d’exemple, les chômeurs qui acceptent de se former dans les métiers en pénurie, notamment dans le secteur de la construction, reçoivent une prime de 2.00 euros et des aides pour passer le permis de conduire.

Réindustrialiser la Wallonie

La réindustrialisation est un axe important de la politique wallonne. Le ministre-Président évoque les initiatives prises pour développer de nouvelles filières. Il cite ici deux projets : Colombus visant à utiliser le CO2 libéré lors d’un processus de production de la chaux sous forme d’e-méthane, du CH4 de synthèse ou encore la promotion de la filière de production de l’hydrogène vert par le groupe John Cockerill (avec son alliance avec l’entreprise française, Technip energies). Le ministre-Président wallon a fait allusion aux projets de recherche du secteur aéronautique relatifs à la transition écologique et numérique. Il est question aussi de relever le défi de l’intelligence artificielle.

La réindustrialisation passe aussi par la relocalisation d’activités en Wallonie en stimulant l’esprit d’entreprendre. Elio Di Rupo a rappelé que le taux de création d’entreprise a progressé de 9,8% en 2021, permettant d’avoir un taux de création nette d’entreprise de 3,6%.

Ce discours sur l’état de la Wallonie devrait être un débat de fond et non pas une opération de marketing où l’on se félicite que tout va bien.

Le combat pour réduire les émissions polluantes demeure une priorité, avec comme corollaire le développement des énergies renouvelables. « La Wallonie a émis 34 millions de tonnes de gaz à effet de serre en 2020 (soit 32% des émissions annuelles de la Belgique). Cela représente une diminution de 38,5% par rapport à 1990. La Wallonie progresse bien, mais elle a encore du chemin à parcourir pour atteindre ses objectifs climatiques. Des efforts supplémentaires sont requis. C’est tout l’enjeu du Plan Air-Climat-Energie qui a été adopté par le gouvernement. En 2020, la part des énergies renouvelables dans la consommation finale de la Wallonie s’est accrue pour atteindre 14%. En 2005, cette part n’était que de 4% », relève Elio Di Rupo.

La bouteille à moitié pleine

Il a évoqué les inondations de juillet 2021, en livrant le montant des aides apportées aux sinistrés : 1.030 milliard d’euros, soit 50% du montant total des dégâts, l’autre moitié étant prise en charge par les assurances pour solde de tout compte. Il a rassuré sur un point qui touche le portefeuille des Wallons : pas de nouvelles taxes prévues au programme.

L’opposition a apporté sa contribution pour relever les points sombres sur le tableau idyllique d’Elio Di Rupo. Chef de groupe des Engagés au Parlement wallon, François Desquesnes a fustigé un discours qui a principalement présenté la bouteille à moitié pleine. « Vous avez l’art de choisir les chiffres qui vous conviennent », notamment en matière de taux d’emploi, de risque de pauvreté, de fréquentation des transports en commun ou de PIB qui augmenterait plus vite que dans les autres régions. « C’est possible que ce soit le cas en 2022 par rapport à 2021 mais sur la période 2019-2022, la part wallonne du PIB s’est réduite par rapport aux autres entités. C’est sur l’ensemble de la période qu’il faut comparer et ne pas choisir les chiffres les plus flatteurs. Ce discours sur l’état de la Wallonie devrait être un débat de fond et non pas une opération de marketing où l’on se félicite que tout va bien », a souligné François Desquesnes.

Le chef de groupe PTB au Parlement wallon, Germain Mugemangango reproche à Elio Di Rupo d’avoir ignoré dans son discours le point sur la mauvaise gouvernance et le train de vie de certains responsables politiques. BELGA

Germain Mugemangango (PTB) fustige un discours mensonger dans el chef du ministre-Président, Elio Di Rupo. (BELGA PHOTO)

Le chef de groupe des Engagés déplore l’absence des chapitres relatifs à la santé et au bien-être des Wallons dans le discours du ministre-Président Di Rupo. « Je crains que la réalité que vivent les Wallons soit très éloignée de ce que vous avez raconté. Loin de nous l’idée de dire que rien ne va, mais il faut comprendre ce qui ne va pas pour essayer d’améliorer les choses. Si on change chaque année de thermomètre, on n’aura jamais ce regard lucide nécessaire pour que la Wallonie progresse », a-t-il résumé. Et d’appuyer : « Quelle sera la feuille de route, pour les 12 prochains mois, du gouvernement dont vous êtes le capitaine ? Quelles sont vos priorités ? Où sont les réformes basculantes ? ».

Un discours mensonger, d’après le PTB

Le son de cloche n’est pas très différent du côté du PTB. « Le ministre-Président Elio Di Rupo prétend que le gouvernement wallon lutte contre la pauvreté, mais c’est tout simplement faux. Hier encore, tous les partis de sa majorité – PS, MR et Ecolo – ont refusé de voter notre proposition de trêve hivernale sur les expulsions de locataires. De plus, ils refusent d’encadrer les loyers avec une grille contraignante. Or, tous les experts le disent, l’accès au logement est justement un des principaux remparts contre la pauvreté », a abondé Germain Mugemangango, chef de groupe du Parti du travail de Belgique (PTB).

Le ministre-Président Elio Di Rupo prétend que le gouvernement wallon lutte contre la pauvreté, mais c’est tout simplement faux.

Il accuse Elio Di Rupo d’embellir la réalité en parlant des avancées sur le front environnemental. « En matière climatique aussi, ce gouvernement prétend prendre des mesures, mais en réalité, il punit les travailleurs pour protéger le mode de vie des ultra-riches. Au lieu de bannir des aéroports wallons les jets privés, qui ont pollué autant que 27.000 voitures en 2022, le gouvernement préfère instaurer une zone de basses émissions qui ne concernera que 17.000 voitures et touchera avant tout les travailleurs. Autrement dit, il est fort avec les faibles et faible avec les forts », poursuit-il. Avant de reprocher à Elio Di Rupo d’avoir ignoré dans son discours le point sur la mauvaise gouvernance et le train de vie de certains responsables politiques. « Cela ne surprend pas venant de quelqu’un qui ose dire à la radio que 18.000 euros pour un canapé, c’est du confort et non du luxe. Mais cela confirme, une fois de plus, la déconnexion totale entre ce gouvernement wallon et les travailleurs », conclut Germain Mugemangango.