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Haine en ligne et anonymat : présentez vos papiers !

ONU-Femmes

L’inscription à un réseau social devrait-elle être soumise à la présentation préalable d’une pièce d’identité ? C’est la proposition que formule le sénateur français Alain Cadec dans un texte déposé ce 14 octobre. Afin de faciliter la poursuite des auteurs d’infractions en ligne, l’ancien député européen propose de mettre sur pied une autorité indépendante de contrôle de l’identité numérique et ce, afin d’éviter que les géants du web ne collectent les données personnelles des internautes.

Faut-il en finir avec l’anonymat en ligne ? La question n’est pas nouvelle. Cela fait près de vingt ans qu’elle revient régulièrement dans le débat public sans jamais être vraiment tranchée. La problématique vient de connaître un rebond. Pour endiguer l’augmentation du cyberharcèlement, le sénateur Alain Cadec a déposé une proposition de loi qui obligerait les utilisateurs des plateformes telles que Facebook et Twitter à faire authentifier leur identité officielle par une autorité administrative indépendante s’ils veulent s’y inscrire.

Alain Cadec, sénateur LR

Faciliter l’identification

Si l’intéressé se dit pour la liberté d’expression, il considère que l’anonymat a quelque chose de choquant. Se cacher derrière un pseudonyme fausse le débat. Il faut donc s’emparer du sujet et réglementer. « Face à ces violences, chantages, moqueries, injures, souvent sous-estimées car exercées derrière le paravent d’un clavier et d’un écran, il est important de légiférer pour mettre en place un outil qui permettra d’identifier plus rapidement les auteurs des agressions », explique le sénateur dans son exposé des motifs (proposition de loi instituant une Autorité de contrôle de l’identité numérique du 14 octobre 2021 : http://www.senat.fr/leg/ppl21-061.html). « L’envoi du scan de leur pièce d’identité doit faire prendre conscience aux auteurs de messages haineux, racistes, homophobes ou sexistes qu’ils peuvent être identifiés rapidement », argumente encore l’élu.

Simplifier les poursuites

Le rôle de cette nouvelle institution, si elle devait voir le jour, serait d’être une sorte d’interface entre les personnes souhaitant rejoindre un site communautaire et ces plateformes. Cette structure éviterait ainsi d’avoir à transmettre des documents officiels aux GAFAM en les conservant dans une structure nationale qui en préserverait la confidentialité. En outre, les données d’identification fournies par l’internaute au moment de l’inscription via cette nouvelle autorité « seraient transmises sur seule requête du juge en cas d’action pénale, ce qui éviterait d’être soumis au bon vouloir d’une entreprise située en Californie ou ailleurs dans le monde ». Le but ? Faciliter les poursuites en cas de crime ou de délit. Autre particularité du texte que soumet Alain Cadec, celle de viser non seulement les nouvelles inscriptions, mais aussi les comptes déjà existants.

Pseudonymat, stop ou encore ?

La question de l’anonymat, ou plus précisément du pseudonymat, s’est déjà invitée plusieurs fois dans l’actualité politique. En 2016 déjà, après l’attentat au camion-bélier de Nice, le député Éric Ciotti souhaitait « rendre obligatoire pour les réseaux sociaux la vérification de l’identité de leurs membres ». Quelques années plus tard, en janvier 2021, le même principe était défendu par Valérie Bazin-Malgras et Emmanuelle Antoine lors des débats autour du projet de loi « séparatisme », devenu par la suite « respect des principes de la République ».

Pour d’aucuns toutefois, faire de la lutte contre l’anonymat le fer de lance de la lutte contre les cyberviolences, c’est servir sur un plateau d’argent de nouveaux arguments de censure à nombre de gouvernements autoritaires. Les associations de défense des droits l’homme, notamment, privilégient la sensibilisation et la prévention au contrôle.