EDITO

Junior Masudi Wasso : un enfermement qui interpelle

BELGA

Parti de sa République démocratique du Congo (RDC) avec des rêves plein la tête, notamment celui de poursuivre ses études supérieures en faculté d’économie à l’Université catholique de Louvain (UCL),  Junio Masudi Wasso est aujourd’hui détenu dans un centre fermé depuis le 18 septembre.  Ces structures, dont l’utilité reste encore à démontrer, ne sont-elles pas réservées à des ressortissants étrangers, en situation irrégulière et en attente d’expulsion ?

Déjà critiquées, à juste titre, pour servir de lieu de détention de personnes n’ayant commis aucun crime, mais qui ont eu la malchance de ne pas disposer de papiers en règle, voilà maintenant que les autorités belges y envoient un jeune homme de 20 ans, muni d’un passeport valide et d’un visa en règle, délivrés par l’ambassade belge à Kinshasa. Il avait également en sa possession un document  de l’Université qu’il doit rejoindre attestant qu’il y est valablement inscrit ou qu’il est admis à s’y inscrire. Mais visiblement, la police des frontières doute de ses motifs de voyage, estimant qu’il n’avait pas en sa possession une preuve d’inscription effective à l’université, ni de preuve qu’il disposait de moyens financiers suffisants pour séjourner en Belgique.

Comment une autorité judiciaire peut-elle, dans un Etat de droit, cautionner un tel comportement en reconnaissant la légalité de l’enfermement d’un être humain à qui il a été délivré un document par l’autorité administrative de ce même pays ?

Ces documents ont dû être fournis dans le dossier soumis pour l’obtention du visa auprès des autorités belges. Les autorités académiques de l’UCL ont certainement demandé et obtenu tous les éléments nécessaires avant d’autoriser son admission au sein de leur institution universitaire. La situation a de quoi interpeler. On croirait à une mauvaise blague ou à un fâcheux quiproquo qui prêterait à sourire si tout ceci n’était pas dramatique et dommageable. Où se situe le dysfonctionnement : au niveau des autorités diplomatiques belges à Kinshasa qui ont délivré le visa lequel est présumé ouvrir la porte de la frontière belge ou les agents de la police des frontières auraient-ils fait preuve d’excès de zèle? Comment une autorité judiciaire peut-elle, dans un Etat de droit, cautionner un tel comportement en reconnaissant la légalité de l’enfermement d’un être humain à qui il a été délivré un document par l’autorité administrative de ce même pays ? Que s’est-il passé pour qu’un jeune homme de 20 ans se retrouve aujourd’hui en centre fermé, alors que ses documents sont en règle ? Pire encore, il a déjà fait l’objet de deux tentatives d’expulsion qui ont échoué.

La situation de Junior Masudi Wasso mérite des explications. Le secrétaire d’Etat à l’Asile et à la migration, Sammy Mahdi (CD&V) doit sortir de son silence et intervenir pour répondre aux interrogations tant des recteurs et des rectrices des universités francophones que de la ministre de l’Enseignement supérieur, Valérie Glatigny (MR). Le traitement au jeune étudiant n’honore pas notre pays et donne de nos institutions une image peu glorieuse. Depuis lors, aucune enquête n’a été menée pour tirer la situation au clair et permettre à Junior Masudi Wasso de recouvrer sa liberté afin de poursuivre dans la sérénité ce pour quoi il est venu en Belgique, c’est-à-dire poursuivre ses études supérieures. Les députés doivent aussi jouer leur rôle et interpeler les responsables politiques pour savoir ce qui s’est passé. Au nom de la transparence et du respect des droits humains.